La variabilité cardiaque, ça vous parle ?
Si vous lisez régulièrement nos articles, vous avez donc déjà des notions sur d’autres sujets du genre : fréquence cardiaque (FC), la fréquence cardiaque maximale (FCM), la fréquence cardiaque de repos voire la fréquence cardiaque de réserve !
Si ce n’est pas encore le cas, référez-vous au glossaire à la fin de l’article.
Aujourd’hui, nous voulons aller un peu plus loin et vous parler de la variabilité de la fréquence cardiaque (VFC).
Qu’est ce que la variabilité cardiaque ?
Si la FC correspond au nombre de battements de votre cœur par minute, la VFC correspond à la variation de temps entre deux battements cardiaques, ce qu’on appelle l’intervalle R-R, et qui s’exprime en millisecondes :
Source : http://www.polar.com
Au même titre que la FC, la VFC est régulée en permanence par le système nerveux orthosympathique dit « sympathique » (accélérateur) et le système nerveux parasympathique (freinateur).
Ces systèmes sont à leur tour soumis aux influences de différents facteurs internes (cycle veille/sommeil, respiration, stress…) et externes (entraînement, climat, altitude,…)(1,2).
Du coup, la durée de l’intervalle R-R varie constamment d’un battement à l’autre.
Au départ, la mesure de la VFC est utilisée dans le domaine médical afin de prédire les risques de pathologies cardio-vasculaires comme de facteurs qui leur sont associés (hypertension artérielle notamment).
Dans le cadre d’un entraînement sportif, évaluer l’amplitude des fluctuations de la fréquence cardiaque d’un battement à l’autre permet d’analyser la capacité du cœur à s’adapter aux sollicitations internes et externes.
A priori, une VFC importante témoignera d’une bonne adaptation et d’un bon niveau de forme.
A l’inverse, une faible VFC sera synonyme de fatigue, de surentraînement ; autrement dit d’une plus grande difficulté du coureur à s’adapter au programme d’entraînement.
Les intérêts de mesurer la variabilité de la fréquence cardiaque
Détecter le surentraînement
A la lecture des différentes études sur le sujet, le premier intérêt de la mesure de la VFC réside dans le diagnostic précoce d’un état de surentrainement (3,4).
Idéalement cet outil devra être couplé à d’autres moyens de détection comme un questionnaire de fatigue voire des analyses sanguines car une baisse de VFC ne peut et ne doit pas systématiquement s’interpréter comme un signe de surcharge et de mauvaise adaptation à l’entraînement.
Connaître et contrôler l’impact réel de l’entraînement
Une mesure fréquente de la VFC peut aider à définir plus exactement l’intensité de l’entraînement, son impact sur l’organisme et ainsi aider à contrôler la dynamique des charges d’entrainement comme de récupération (5).
Pour faire simple, si vous avez une VFC importante, vous êtes dans les meilleures conditions pour réaliser une séance difficile ou prendre part à une compétition.
Au contraire, si votre VFC est basse, il sera plutôt conseillé de sauter l’entrainement ou de l’alléger.
Adapter et individualiser la charge d’entraînement
L’optimisation des performances passe par un subtil équilibre entre la charge d’entraînement et la récupération.
Hors, si la VFC diminue fortement dans les heures qui suivent un entraînement avant de remonter et de dépasser parfois même le niveau initial (phénomène de surcompensation) chez tous les athlètes, chacun ne récupère pas de la même façon (même pour un travail individualisé) :
Cinétique de VFC chez deux joueurs professionnels de handball suite à un exercice intermittent à haute intensité réalisé le lundi soir.
Source : http://www.msport.net/newSite/cardioetsport/cs_07_entrainement.pdf
La mesure de la VFC peut donc servir à individualiser l’entraînement comme les temps de récupération.
Faire cela au quotidien peut s’avérer intéressant voire nécessaire pour un coureur élite. Lissées sur la semaine, une valeur moyenne de VFC peut également aider à planifier les blocs d’entraînement.
Evaluer l’état de forme et prédire les performances
Certaines technologies embarquées dans les ceintures cardio-fréquencemètre haut de gammes estiment également VO2 et VO2Max à partir de la VFC et jouent alors le rôle de prédicteur de performance (6).
Attention, ces informations sont relativement imprécises puisque qu’on estime à environ 12% le pourcentage d’erreur.
Par Jérôme Sordello
Références
1-Ziane et Micheli.Intervention à l’Université Claude Bernard Lyon 1
2-Buchheit. Utilisation de la variabilité de la fréquence cardiaque chez le sportif. http://www.msport.net/newSite/cardioetsport/cs_07_entrainement.pdf
3-Hedelin, Kenttä, Wiklund, Bjerle, and Henriksson-Larsén. Short-Term Overtraining: Effects on Performance, Circulatory Responses, and Heart Rate Variability.” Medicine and Science in Sports and Exercise 32. 2000
4-Achten, Jeukendrup. Heart rate monitoring: applications and limitations. Sports Med. 2003
5-Plews, Daniel, Laursen, Kilding, Buchheit. Heart Rate Variability in Elite Triathletes, Is Variation in Variability the Key to Effective Training? A Case Comparison. European Journal of Applied Physiology. 2012
6-Gratze, Rudnicki, Urban and al. Hemodynamic and autonomic changes induced by Ironman : prediction of competition time by blood pressure variability. J Appl Physiol. 2005.
Glossaire :
1-Fréquence cardiaque (FC) : nombre de contractions ou battements cardiaques par minute.
2-Fréquence cardiaque maximale (FCM) : nombre maximum de battements cardiaques par minute. Elle est propre à chacun et peut être mesurée de façon théorique et/ou pratique.
La formule théorique la plus précise est à ce jour la formule de Gellish et al :
- Si vous avez moins de 30 ans ou plus de 75 ans, FC max = 206,9 – 0,67 x âge.
- Si vous avez moins entre 30 ans et 75 ans, FC max = 191,5 – 0,007 x âge²
3-Fréquence cardiaque de repos : nombre de battements par minute au repos.
4-Fréquence cardiaque de réserve : fréquence cardiaque maximale à laquelle il faut soustraire la fréquence cardiaque de repos : FC réserve = FC max – FC repos.
Elle correspond en fait à l’amplitude cardiaque à l’intérieur de laquelle le coureur va évoluer puisque ce dernier ne pas aller ni en-dessous de sa FC repos, ni au-dessus de sa FC max.
La connaissance de la FC de réserve permet d’affiner plus précisément les intensités d’effort par rapport à la seule connaissance de la FCM : FC cible = FC repos + % (FC maximale – FC repos).