Mythique course nature française de fin d’année, la Saintélyon est une course très populaire, qui rassemble chaque année de nombreux passionnés !
Un évènement qui attire : ma 7ème participation cette année !
Avec 17 000 participants répartis sur plusieurs formats (relais, 23km, 44km, 76km ou encore 152km depuis cette année), la Saintélyon ne perd pas de son attrait !
C’est qu’on aime les difficultés, et aussi ça qu’on vient chercher sur cette belle classique de fin de saison : une course nocturne, avec des conditions climatiques souvent extrêmes … qui obligent à puiser ses dernières forces de l’année pour aller au bout !
Pour ma part, je la coche à mon calendrier de course depuis mes débuts en trail. Ça sera donc ma 7ème participation cette année !
Pas une seule ombre à ma motivation, par contre côté forme c’est encore l’inconnu, avec une année sportive très bien remplie et usante pour mon organisme.
Je me sens en forme, bien préparée, et j’ai envie de bien faire. Pour le résultat, cela ne dépendra pas que de moi ! A priori, le niveau est très relevé chez les filles cette année encore, donc le top 5 sera déjà un bel objectif.
2 fois 2ème (2014 et 2016), 2 fois 3ème (2010 et 2018), 4ème en 2017 et 5ème en 2015 : je tourne autour du top 5 depuis mes débuts, mais la chance ne me sourira peut être pas à chaque fois !!!
Un avant-course bien (trop) chargé !
i-Run étant partenaire de l’évènement, tous les collègues arrivent sur place dès le jeudi soir pour installer le stand et être en place vendredi midi.
Je les retrouve le vendredi pour le diner au restaurant, et « assurer » une présence pour diverses opérations le samedi midi et après midi.
Je sais qu’il ne faut pas que je perde trop d’énergie la journée du samedi, le départ étant programmé à 23h30 … mais je dois « jouer le jeu », c’est le minimum pour mes partenaires et pour l’organisation.
Au final, je reste au salon de 11h30 à 17h. Présence sur le stand i-Run, présentation du nouvel épisode E-Motion Trail, retrait des dossards et le coucou et blabla à droite à gauche …
ça passe vite et j’ai avalé, à l’arrache, un tupper de riz/sardines que j’avais préparé à l’avance !
Bon, et bien au moins, je n’aurais pas eu le temps de stresser avant la course !! lol
J’arrive tout de même à m’échapper du salon vers 17h, et mon Lolo me dépose gentiment à Saint-Étienne pour que je puisse me reposer un peu et me préparer tranquillement.
J’essaye de siester, mais en vain …. ! Pas grave, je suis au calme, c’est déjà un moyen de recharger les batteries.
L’heure du départ !
19h/19h30, Manu me retrouve à l’hôtel de Saint Étienne. On prend le temps de manger, simple : riz / poulet ! Pas simple à gérer ce dernier repas d’avant course : tu ne sais jamais à quelle heure le prendre et quelle quantité manger.
Partagé entre bien se remplir, sans trop se gaver non plus pour ne pas avoir l’estomac trop rempli au départ. L’heure tourne vite, on prépare nos ravitos et on commence tranquillement à s’équiper.
Laurent Ardito nous retrouve, c’est lui qui va assurer l’assistance cette nuit ! Merci infiniment Laurent. Fidèle au RDV, comme toujours. On fignole tout ça avec lui, et vers 22h50, on se dirige vers la zone du départ.
Les températures ne sont pas si fraîches cette année, mais c’est humide et même s’il ne pleut pas encore, les prévisions annoncent des belles averses cette nuit.
Avec l’expérience, on préfère donc prévoir et anticiper : je pars en collant, avec un bonnet, un manche-longue et une veste légère par dessus. J’ai chaud après quelques foulées d’échauffement, mais je ne change rien, je sais qu’on peut être surpris à la Saintélyon …
Au départ, j’aperçois quelques têtes connues, et des coureuses que je sais très rapides !!! Ça va aller vite ! Certains sont vraiment habillés léger … ça me fait presque douter … tant pis, j’enlèverai la veste si j’ai trop chaud.
En chaussures : aucun doute, j’opte pour les plus accrocheuses, les Asics Fuji Trabuco Pro. Le terrain est annoncé glissant, alors on assure ! :)))
Saint-Étienne – Sainte Catherine : le début des grosses galères !
Comme d’habitude, le départ fait son petit effet, avec une ambiance du tonnerre, qui te fait dresser les poils sur les bras !
Je pense à Juliette, à Stéphane, à mon papa … à toutes les personnes qui vont m’aider à aller au bout de ce nouveau défi du jour et qui me donneront probablement la force de me dépasser !
Quand le départ est donné à 23h30, la météo est calme et les conditions plutôt optimales. C’est parti pour 76km et 2200mD+, à la frontale !
Les avions de chasse féminins au départ : Camille Bruyas, vice Championne de France de Trail long 2018 et 3ème de la CCC 2019, fait partie figure de grande favorite !
Lucie Jamsin, Mathilde Guillaumot, Claire Bannwart, Delphine Avenier, Anaëlle Peri, Julie Brand, Chrystelle Lambert, Amandine Roux, Estelle Munia, Gaëlle Decorse, Carole Souchon, Marine Chalaye … et j’en oublie !!!
Avec tout ça, sur la première portion, je suis très loin dans le classement. Mais je ne m’en soucie pas, l’an dernier j’avais pointé 8ème à Sainte Catherine, et j’ai réussi à remonter à la 3ème place à l’arrivée. Donc cela ne veut rien dire.
Et je n’ai pas eu l’impression de partir doucement, ni même d’être dans le dur. Je gère à mon rythme et les sensations restent bonnes : je pointe 15ème au km17,5, à Saint Christo. 1h34 de course, j’avais planifié 1h40 sur mon plan de route. Je rassure Laurent présent au ravito : tout roule !
La pluie s’est invitée sur le parcours un peu avant ce premier ravitaillement. Au début discrète, elle se fait de plus en plus intense et de plus en plus gênante. je prévois donc de prendre une veste Gore-Tex à Sainte-Catherine, dans 15km environ.
Mais 15km, dans ces conditions, ça peut être long. Le terrain est de plus en plus gras et j’ai de plus en plus de mal à me réchauffer. On fait le yoyo avec Carole, avec qui je cours un bon moment, c’est chouette de partager quelques kilomètres comme à Gruissan avec elle ! :)))
Non sans grelotter, je rejoins Sainte-Catherine en 3h03. Je pointe 13ème, j’ai gagné quelques places, mais j’ai perdu quelques points de vie là …. la pluie ne semble pas vouloir se calmer, et les températures ont sensiblement chuté !!
Je retrouve du réconfort auprès de Laurent qui m’attend pour l’assistance. Après l’avoir cherché un peu, je le vois juste avant la tente, sous la pluie. Je suis surprise qu’il ne se soit pas mis à l’abri, au sec, mais je ne cherche pas trop à comprendre …
Je lui explique que je suis gelée et que j’aimerais me changer ! Allez hop, il me tend une veste sèche en Gore-Tex, je l’enfile à la place de l’autre, trempée et bonne à essorer ! Mais grosse erreur stratégique : je ne change pas le manche-longue mouillé dessous …
Manu nous rejoint, il a décidé de mettre le clignotant ici. Il est en sécurité avec Laurent, tout va bien, il n’est pas blessé.
Sainte-Catherine – Soucieu en Jarrest : en mode survie !
Lorsque je repars de Sainte-Catherine, je regrette assez vite de ne pas avoir fait le nécessaire au niveau équipement … et quelques mètres après avoir quitté la zone : je tremblotte à nouveau !
Je prie que la pluie nous laisse un peu tranquille, et que je puisse rejoindre Soucieu avec un peu plus de confort. Mais les choses vont très vite s’empirer pour devenir un véritable enfer.
Le froid ne me quitte plus, à un tel point d’intensité que le moindre mouvement me glace … je n’ai même plus les capacités d’attraper mon bidon de ma ceinture, je ne sens plus mes mains.
En 40km, je n’ai même pas bu l’intégralité d’un bidon de 650mL … et je n’ai même pas réussi manger une barre entière. Je suis focalisée sur deux choses : rester concentrée sur mes appuis pour gérer du mieux possible ce sol devenant de plus en plus impraticable. Et essayer d’oublier que je suis pétrifiée de froid ….
Sauf qu’au bout d’un moment, entre la perte d’énergie à cause du froid, de la vigilance accrue, des kilomètres qui s’accumulent … et le peu de calorie que j’ingurgite … je commence à sentir que je n’arriverai malheureusement pas à passer la seconde, et que la remontée s’annonce compliquée !
Je n’ai aucune idée de mon classement quand je passe au 3ème ravitaillement, à Saint Genou, km40, mais je réalise que rallier le prochain point d’assistance va être très compliqué. Voir cauchemardesque !
J’ai mis la tête dans la capuche, les mains dans les manches … et le buff sur la bouche, pour profiter de la petite chaleur de mon souffle qui parvient à apporter un peu de chaleur à mon visage.
Je ne sens plus mes pieds non plus. J’ai débranché mon cerveau pour ne plus penser à rien et surtout m’enlever de la tête l’option de l’abandon. Mais je sens que si je m’arrête (ou juste, si je ralentis trop), je risque l’hypothermie.
Le peloton n’a jamais été aussi silencieux … on sent que tout le monde subit et que tout le monde vit le même enfer, avec un même ojbectif : arriver, le plus vite possible ! Non pas pour faire un chrono ou une place, mais pour se mettre sous une douche brulante !
Entre le brouillard, le sol ravagé par la boue et la pluie, la pluie incessante, le froid … je ne prends aucun plaisir et réalise que je ne suis plus du tout dans ma course à ce moment là. J’ai juste une chose en tête : arriver pour me mettre au chaud et mettre un terme à ce cauchemar … !
Je ne sais même pas comment j’arrive à rejoindre Soucieu; J’ai perdu toute notion de temps ! Comme déconnectée de la réalité pour moins souffrir. Le pire c’est que les jambes vont bien. Mais le problème est ailleurs aujourd’hui ….
Le ravitaillement de Soucieu en Jarrest : une lueur d’espoir et de réconfort !
Je ne pense qu’à retrouver mon assistance en arrivant à Soucieu en Jarrest. En fait j’y pense depuis déjà un long moment, ça me motive à avancer … je visualise ce moment où je vais pouvoir me mettre au sec et enfin retrouver un peu de chaleur !
Comme j’ai les mains enfermées dans mes manches et que j’évite les mouvements (j’ai l’impression d’être un playmobil à courir bras et jambes tendus ! lol), je ne regarde plus ma montre et je ne connais si mes allures, ni le kilométrage, ni l’heure …
Mais je reconnais (près 6 participations, ça commence à rentrer !), les lieux et l’arrivée dans le village. Il me tarde ce gymnase chauffé et je me dis que Laurent et toute la clique ont dû se mettre au chaud là bas pour m’attendre.
Mais surprise ! Ils se sont installés juste en entrée de zone, sous un abri-bus en plein vent et dans le froid ! Mais non !! Je n’en reviens pas, mes espoirs de réconfort partent en fumée et ma colère, poussée par le désarroi, l’impuissance, la déception … s’exprime.
Je m’énerve sur Laurent en lui disant que c’est un peu n’importe quoi de s’être installé ici, que j’étais frigorifiée que j’avais envie de tout, sauf de me changer dans ces circonstances.
Bon râler me fait du bien (encore milles excuses Laurent !!), mais ne change rien. Me voilà donc à claquer des dents, en brassière, dehors dans la nuit. Il est 5h du mat et il doit faire 2 degrés, tout va bien.
je change tout en haut, enfile un autre haut manche-longue, un veste sans manche par-dessus, une 3ème veste Gore-Tex sèche, une nouvelle paire de gants, un buff sec pour le cou et un autre sur la tête pour remplacer mon bonnet trempé … hop, une nouvelle frontale rechargée et go !
J’évite de me poser trop de questions, sinon je ne vais jamais repartir ! Je repars toujours aussi frigorifiée, mais avec un petit confort supplémentaire qui fait du bien au moral.
J’ai pointé 10ème à Soucieu, 5h35 de course, km53,5.
Pas de répit pour ces 23 derniers kilomètres !
Dur dur de repartir dans la nuit, le froid et sous la pluie, après avoir traversé le gymnase bien chauffé de Soucieu.
Je considère un peu ça comme un suicide, mais je me raccroche au positif : je suis au sec pour un petit moment, profites-en ! Et il ne reste plus qu’une vingtaine de kilomètres, ça va passer vite normalement !
Sauf que non, en fait, rien n’est passé vite … le temps est resté au mauvais, pour ne pas dire, au déluge, et les sentiers étaient de plus en plus ravagés, nous laissant parfois de l’eau (glacée bien-sûr) jusqu’aux genoux !!
Je fais route depuis un moment avec les mêmes coureurs, et je reconnais soudain l’un d’eux. Sylvain, que j’ai déjà croisé sur d’autres évènements, et avec qui j’avais déjà partagé quelques bouts de courses !
On commence à papoter. Un peu, parce que le visage glacé et la bouche emmitouflée dans le buff, c’est pas facile ! Et puis assez rapidement, on se soutient mutuellement, en silence; pas besoin de parler finalement pour se sentir soutenu par quelqu’un qui vit la même galère que toi …
En suivant bêtement un autre coureur, on arrive à se planter de route et à sa rajouter quasiment un kilomètre ! Le brouillard bien présent depuis le départ brouille bien les pistes aussi …
Pas grave, on se remobilise et franchement, on n’est plus à un kilomètre près là … on arrive au km65 : 6h56 de course, toujours 10ème.
Le soutien mutuel nous aide à nous remobiliser pour tenter de se remettre un autre objectif que simplement « franchir cette ligne pour aller vite se mettre au chaud ! », et l’espace de quelques secondes, on parle d’essayer de rentrer en moins de 8h ….
Mais étant donné l’état du terrain, on se rend vite compte que c’est peine perdu, et de toute façon, la tête n’y est pas … on se ravise et on le verbalise même : c’est mort, on va dérouler jusqu’à l’arrivée hein, ça ira très bien !! lol
Un chantier sans nom sur les dernières portions en sentiers avant d’arriver sur Lyon … une épaisseur de boue impressionnante nous faisant glisser à chaque foulée, et de l’eau ruisselant de partout.
Le jour se lève à peine lorsque nous arrivons dans la ville et nous franchissons la ligne avec un soulagement qui n’a finalement aucune saveur d’accomplissement ou de satisfaction personnelle …. juste une arche franchie synonyme de : ouf, cauchemar terminé !
Je termine donc 10ème féminine en 8h14. Ma première Saintélyon, en 7 participations, où je ne prends aucun plaisir … certains se demanderont pourquoi ne pas avoir jeté l’éponge avant …
tout simplement parce que je n’aime pas renoncer, parce que j’avais toujours une bonne raison de continuer, parce que je ne suis pas du genre à baisser les bras à la première difficulté, parce que dans la vie, pour prendre du plaisir, il faut aussi parfois passer par des moments durs et des échecs, … parce que ces difficultés, elles font aussi grandir !!!
Je félicite toutes les personnes qui sont allés au bout de ce chantier SAINTÉLYON 2019, et encore plus les bénévoles que j’ai croisé, qui sont restés des heures sous la pluie et dans le froid, pour assurer notre sécurité …
Je reviendrai sûrement, mais laissez-moi le temps de me réchauffer, j’ai encore froid rien que d’y penser ! ;)))
Par Sylvaine CUSSOT
Les résultats de la Saintélyon 2019
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