C’est la fin de saison pour Sébastien Larue, qui termine l’année avec le 10km de Vénissieux ce 18 novembre dernier. Après une saison 2018 qui ne lui a pas donné entière satisfaction, Seb prend le départ de ce 10km avec un sentiment partagé : l’espoir et les doutes.
Début de saison sous la signe de la déception
« Cette année, comme à mon habitude, un chrono sous les 34’ fait partie de mes objectifs annuels : ça n’a pas très bien démarré au printemps. J’avais pourtant fait l’effort de participer aux cross. (Des épreuves que j’aime, mais qui ne me le rendent pas : je n’avance pas sur ce terrain-là !) Je pensais que ça me permettrait de faire un beau printemps sur route.
Il n’en a rien été : 10 km de Bourg en Bresse : 34’56. Quelle déception ! Jambes misérables. Le contre coup d’un déménagement quelques jours plus tôt ? Je n’en sais rien. En tout cas les chiffres sont là : mes 2 derniers 10 km labellisés : 34’57 et 34’56.
Je crois que je viens de comprendre pourquoi il existe une catégorie vétéran !! Ces chronos sont (étaient ?) normalement mes temps de passage sur semi-marathon…
J’avais ensuite réalisé 1h15’28 sur semi-marathon à Feurs et 2h41’01 au championnat de France de marathon à Albi, c’était déjà mieux, mais en deçà de mes résultats les années précédentes. Psychologiquement, c’était pour moi les indicateurs évidents d’un inexorable début de régression.
À bicyclette !!! ;-))
Après ce championnat de France de marathon. J’ai décidé de mixer davantage vélo et course à pied. J’ai d’ailleurs pris une licence de cyclisme en FSGT 4 au club de Saint Denis les Bourg, pour participer à quelques coursettes et me faire plaisir à vélo.
Cela m’a permis de faire des rencontres sympa et de passer de très bons moments. Entre mai et Aout, je n’ai rien planifié de particulier : je me suis entrainé aux sensations, sans prise de tête et sans objectif précis. J’ai participé à des courses de vélo, à des run and bike, à quelques corridas estivales.
En aout, j’ai monté mes premiers cols alpestres avec Yoann Seigneuret, Lionel Vignon et Daniel Georgel. Je suis resté actif, mais sans me poser de contraintes du genre : « essaye de faire au moins 70 km hebdo en CAP ».
Je redoutais de prendre encore un peu plus de cuisse que je n’en ai déjà, et que cela accélère davantage mon déclin en CAP, mais tant pis. J’aime le vélo.
J’aime le vélo depuis longtemps, et j’en ai marre de m’inhiber à ne pas en faire de peur de prendre trop de viande.
Et la confiance revient à pied !
Chemin faisant, en septembre, l’envie de me remobiliser pour faire un chrono sur route est revenue. Après quelques courses de rodage dans l’Ain, je participe au 10 km de MACON. Verdict : énorme fessée !! 35’50. Rien dans les cannes.
Bon… Et ben on va continuer à ne pas trop se prendre la tête alors… Vaut mieux pour ne pas déprimer… J’en suis désormais à 3 mauvais résultats sur mes 3 derniers kilomètres labellisés. C’est moche.
Je participe 6 jours après au 10 km d’Attignat : ça se passe déjà mieux. J’arrive, en courant seul tout le long, à limiter la casse sur Joao Ferreira et Georges Ribeiro. Cool. Ça fait plaisir !
Je projette ensuite de participer aux Foulée de la Veyle à Polliat, une course qui me motive et me convient souvent bien. J’étais « mentalisé » sur cet événement, mais Séb Charnay, le leader de notre club, m’a motivé pour participer à la place au Run In Lyon qui a lieu le même jour. Sur le 10 km.
Nous nous entrainons sans nous prendre la tête et le jour J, je réalise un encourageant 34’16. Qui me ravit ! Cela faisait 19 mois que je n’avais pas couru à ce niveau-là sur un 10 km.
Mon esprit se focalise alors sur le 10 km de Vénissieux. En gros « le championnat AURA automnal du 10 km ». Je me dis qu’en m’entrainant plus sérieusement, il y a peut-être moyen de gratter 17’’. Je l’espère.
Cela me permettrait d’accomplir une 11ème saison avec un « saison best » sous les 34’ au 10 km. Un 33’59 me comblerait. Au pire, si je me plante, ça me fera un SB à 34’16.
Le 10km de Vénissieux en ligne de mire !
Les Foulées Vénissiannes, j’y réalise la plupart du temps mes « saison best » : 33’21 en 2009, 33’26 en 2010, 33’14 en 2011, 33’15 en 2012, 33’25 en 2013, 33’45 en 2015, 33’59 en 2016.
La seule édition où j’ai franchement raté ma course c’était l’an dernier. Un vilain 34’57 : une récup post marathon (Francfort 2017) incomplète ? Quelques restes d’une prépa automnale contrariée par la scarlatine (quelle saloperie !!) ? Le stress d’une inspection imminente ? Le stress de la vente de ma maison ? …
Une mini entorse cheville gauche au km 2.2 en bonus : bien jouéééé… Bref, une bien mauvaise édition 2017 pour moi, où la déception a pu être, en partie, atténuée par les franches réussites des copains.
Un constat s’impose de toute façon : il m’est de plus en plus difficile, et c’est logique, d’accrocher un « saison best » sous les 34′. D’ailleurs, sur 10 km, je ne me bats plus que pour ça. Je résonne désormais en « saison best ». J’ai accepté le fait (depuis quelques années) que mon record sur cette distance, et probablement sur toutes les autres distances, soit définitif.
Ce record restera donc à 33’14 en temps officiel. (Lors de la « fameuse » édition 2011, où tout le monde s’est vu crédité de 3 » de plus sur le chrono officiel par rapport au chrono réel… Sans jamais qu’on sache pourquoi. Je revois encore le visage des 3 gars qui avaient réalisé 31’58/31’58/31’59… Ils étaient très satisfaits ! Quelle ne fût pas leur déception et leur incrédulité quand ils virent le classement tomber avec 32’01/32’01/32’02… Les têtes…).
Ce jour-là, j’avais 33’11 à ma montre. Le panneau digital de la course affichait bien 33’11 également lors de mon passage sur la ligne… A l’époque (et encore !), ça m’avait bien fait chier de me faire enfler (désolé pour les gros mots, mais faut que ça sorte !) de 3 » pour rien sur un chrono qui allait probablement constituer mon record définitif… C’est ainsi…
Après un bloc de 4 semaines d’entrainement « sérieux » en volume (43h30’ de sport), mais sans aucune planification. (Parfois en roulant avec mon fils de 14 ans à 24 km/h de moyenne, parfois en accompagnant un pote sur un bloc de 30’ de 30/30 à 2.5 km/h en dessous de ma VMA sur les efforts, parfois en faisant des sorties longues en endurance alors que je prépare un effort de moins de 35’, parfois en « m’incrustant » au dernier moment sur une séance de VMA organisée par le coach du club de tri de mon fils, etc…).
Bref, du volume, principalement en aérobie. Juste à 2 semaines de l’objectif, un bon petit décrassage en règle sur un Run and Bike avec un pote de mon club de vélo : Florian Bey, avec qui j’avais déjà participé à une épreuve semblable en juin.
Ensuite 2 semaines vraiment (exagérément ?) légères, mais avec, à J-8, ma traditionnelle 4000/2000/1000 à allures marathon/semi/10 km. Sur routes vallonnées. En respectant mes sensations du jour. Histoire de réviser un peu mes gammes. Bilan 14’33/7’02/3’27. Bon, c’est correct, mais ce n’est pas la folie non plus. Va falloir se faire bien mal pour aller chercher ce 33’59 !! Ce n’est pas fait !
4 jours à manger des pâtes, saupoudrées de germe de blé : c’est vraiment dégueulasse ! Mais il parait que c’est bon pour l’organisme. Autant faire ce petit effort pour ma dernière course de la saison. Ma dernière chance d’accrocher un petit 33’59 en 2018. Peut-être ma dernière chance tout court, pour réaliser un 15ème chrono sous les 34’.
Jour J : les foulées de Vénissiannes
La 39ème édition des Foulées Vénissiannes s’est déroulée le dimanche 18 novembre 2018. Comme chaque année, il y a un très beau plateau.
La multiplicité des épreuves en ce week end hors stade souvent très chargé (marathon du beaujolais la veille à Villefranche sur Saône, les cross de sélection pour les Europe de cross…) n’y change rien : plus de 2150 inscrits (sur le 10 km et le semi-marathon) viennent en découdre avec le chronomètre sur ce parcours favorable aux performances.
La météo le jour J est optimale : 2 à 3 °C, vent entre 0 et 2 km/h, grisaille et humidité. Nous l’appelons d’ailleurs, entre potes, depuis quelques années : la « météo vénissianne ». Statistiquement, 4 éditions sur 5 se courent avec cette grisaille fraiche qui accompagne les coureurs en quête de performance sur cette course.
Je fais la route avec des copains de l’Entente Athlétique Bressane. Sur place je retrouve Olivier Gaillard, avec qui je m’échauffe. Les sensations sont normales. Nous nous rangeons dans le tas. Il fait 2°C, j’étais congelé après avoir enlevé mes vêtements d’échauffement, mais une fois dans le tas, collé aux autres, no problème !
Pan, c’est parti ! Il se passe 2 bonnes secondes avant que je passe le tapi électronique de départ, qui a été bien secoué ! J’entends le bruit d’une grosse chute plus loin sur ma droite… Dans le peloton, je retrouve beaucoup de gars que je connais et qui sont autant de repères pour moi.
Mais je me concentre en priorité sur l’intensité cible à maintenir. J’anticipe les mouvements de foule sur les premiers hectomètres : quelle densité ! Les feuilles mortes au sol suivent par saltation les gars qui me précèdent ! Il y a un phénomène d’aspiration sur des courses comme celle-là.
Je passe au km 1 : 3’16 ! Joliiii et en plus mes premières sensations ne sont plutôt pas moches ! Je ne m’emballe pas pour autant, ce n’est pas la première fois que je pars à 18.5 km/h sur un 10 km, et ça s’est plus souvent mal terminé que bien. Yoann Seigneuret me passe et me glisse un petit mot amical.
Je distingue aussi Michel et Georges Ribeiro. Je vois aussi Joao Ferreira et Sébastien Baron, des amis que je connais bien. Ils sont quelques secondes devant moi. Il y a aussi Marceline Jeronnoh avec qui je lutte régulièrement, comme au championnat de France de semi à Bourg en 2017 par exemple.
Passage au km 2 : 6’34. Mais bordel ! Ça va tout seul aujourd’hui !! Bien sûr je suis dans l’effort, mais à l’intensité qu’il faut ! Le froid fait rougir les mains, mais il procure un confort respiratoire qui me convient parfaitement. Je recolle sur le petit groupe mené par Sébastien Baron et Joao Ferreira. Leur tempo est idéal pour moi. Je me sens en mesure de durer avec eux.
Km 3 : 9’53. SU PER ! Quoi qu’il arrive, je suis convaincu que le – de 34’ va sortir aujourd’hui. Faut s’appliquer, mais ça va sortir, je le sais. Je glisse à mon ami Joao (qui bute depuis un bon moment déjà sur cette barrière des 34’ au 10 km) entre 2 souffles : « Joao, c’est ton jour. Ton RP va péter ». Notre petit groupe remonte sur quelques coureurs un peu trop téméraires, mais il n’y en a pas tant que ça à Vénissieux : peu de mecs explosent.
Je reste concentré sur l’effort. Je ne suis pas en mesure de relayer Séb Baron. Joao quant à lui semble coincer un peu… Il n’a apparemment pas encore récupéré de son marathon.
Merde. Km 5 : 16’40 !! La vache !! Mais ce n’est pas le – de 34’ qui va sortir, mais peut être la perf IR3 !! (- de 33’30). Et les jambes tiennent !! Je me décale pour passer un relai à Séb (dossard 14). J’étais bien planqué jusque-là. Nous négocions bien le virage à 180°, l’an dernier, je m’étais laissé aller à encourager les amis que je croisais en ayant conscience que mon chrono serait médiocre, mais cette année, je reste concentré au mieux, je croise juste du regard Florent Derail, qui est seul, puis Olivier Gaillard, qui n’est pas aussi loin de moi que d’habitude.
Je maintiens un rythme linéaire. Marceline est toujours avec nous. Le 6ème km est réalisé en 3’17’’7, le 7ème en 3’21’’6. Nous venons de dépasser Ramzi Boujdai. Séb Baron et Marceline me repassent. Je m’accroche. Les kilomètres 7 et 8, c’est l’heure de vérité sur 10 km. Une mini bosse vers la sortie du parc est à 2 doigts de m’éjecter par l’arrière du groupe mais la mini descente derrière me permet de recoller. Chaud !
Au km 9 : 30’04. Je ne fais pas de calcul. Je le dis juste aux membres du groupe entre 2 souffles avant de finir de vider le réservoir. Certains regardent leur montre tous les 100 m mais moi je fonce sans réfléchir. Les spectateurs crient. La voix du speaker se fait plus audible. Dernier virage, les dernières forces.
Je passe la ligne à pleine vitesse, je stoppe la montre 33’15 : WOUAW !!!
Olivier m’a attendu : il réalise tout de suite la portée de ce que je viens de réaliser (pour moi) et connaissait mon état d’esprit d’avant course, il savait que faire – de 34’ comptait beaucoup pour moi et savais que c’était loin d’être fait. Il me dit avec insistance : « Je suis hyper content pour toi ». Je le remercie pour ces mots. Il a réalisé 32’13. Une perf d’un tout autre calibre.
Autour de moi, plein de visages marqués, mais aussi beaucoup de sourires et de marques d’apaisement : Je crois qu’il y a pas mal de record perso qui ont pris une calotte !! (Les résultats plus tard le confirmeront : un grand cru cette édition 2018).
Quant à moi, j’ai du mal à réaliser. Sortir ce résultat sur ma prépa automnale peut être la plus décousue. Moi qui craignais que le vélo ne me fasse prendre des cuisses trop pesantes. J’ai eu des sensations comme rarement. Je m’étais depuis de nombreux mois configuré le mental sur l’idée du vieillissement et de la régression. Réaliser ça ! Je suis ivre de bonheur !!
Séb Baron arrive également. Il est aux anges, RP explosé. 33’17.Son premier à plus de 18 km/h. Nous ne risquons pas d’oublier ce dossard !
Le temps de l’analyse
Lors de la récup avec Olivier, j’ai la banane. Mais je ne peux m’empêcher de me dire : « quand même 33’15. A 1’’ du record officiel, c’est quand même con ! ». Je ne venais pas pour ça. J’étais fort loin d’imaginer courir à cette vitesse.
Mon vieux record me paraissait inaccessible. Mais en voyant ce 33’15 sur ma montre… Je me rappelle également que j’ai passé la ligne 2 bonnes secondes après le coup de pétard. Peut-être que si ça veut faire… ça serait top… Mais n’y pensons pas.
Plus tard, avec Olivier, nous découvrons les résultats au gymnase, et là : 65ème en 33’13 temps réel puce ! (Depuis cette année, les temps puce sont enregistrés comme le temps officiels, alors qu’auparavant, c’était le temps de coup de pistolet à ligne d’arrivée qui étaient retenu pour les athlètes de niveau supérieur à IR4).
C’est fait ! Un record perso officiel abaissé de 1’’ (Pas la valeur réelle réalisée, qui reste et restera sans doute le 33’11 de 2011) à presque 39 piges ! J’ai encore du mal à réaliser.
Mon 15ème 10 km sous les 34’, mon 7ème sous les 33’30, mon 4ème à plus de 18 km/h. Mais ce qui fait vraiment plaisir, c’est surtout que je croyais que c’était fini. Alors que non.
Je remercie sincèrement Séb Baron pour sa contribution à cette belle réussite.
Beaucoup d’athlètes ont établi leur nouveau record personnel. Énormément. Il y a eu également beaucoup de saison best. Vénissieux quoi ! 9 gars sont sous les 31’, 26 athlètes sont sous les 32’, 98 sont sous les 34’ et 155 sont sous les 35’.
Décembre arrive, je vais pouvoir me reposer en toute quiétude dans les semaines à venir avant de préparer la saison 2019. Motivé et rassuré. »
BRAVO SEB, vivement Vénissieux 2019 pour un nouveau best !!! :)))