Dans la vie, il y a des moments de remise en question, de besoin de renouveau, de challenge, de défi …
A 36 ans j’ai toujours fait du sport. Plus particulièrement de l’athlétisme depuis l’âge de 12ans (lancer de disque). Là, vous vient la question : mais que fait ce récit sur U-RUN ?
12 semaines pour se préparer !
Allez, je continue ! Amateur de rando en montagne, faisant quelques footings tranquilles 10 à 15km grand max… j’avais un rêve : faire un trail long 45km en montagne comme j’en voyais dans tant d’articles…
Ce matin-là, je me réveille et vois ce jeu concours sur U-RUN pour un ultra en Andorre… je tente ma chance ! Quelques jours plus tard, message de Sissi pour m’annoncer que j’ai gagné. Et là tout s’accélère…il ne reste plus que 86 jours pour me préparer.
Il parait que pour un Ultra il ne faut pas si prendre au dernier moment. Je crois que c’est raté pour le coup !
J’ai la chance de faire partie du club de Balma où rapidement, coach Alain me délivre mon plan d’entraînement à raison de 3-4 séances semaines. Ma vie, hors boulot et enfants, se calque donc à présent à la préparation physique et logistique.
Le physique, c’est la découverte de séances d’entraînement trail (nouveau pour moi qui étais plutôt à faire de la ppg, musculation et répétition de lancer…) : séances de fractionné en côtes, sorties longues… Les sorties, qui étaient un max en distance, avant ça, deviennent juste banales… intense mais que du plaisir en voyant ma progression à chaque sortie !
C’est aussi la découverte de nouveaux muscles en conséquence, des bobos du coureur : du musculaire, au podologique et du coup de la bobologie adéquate.
Mais ça fait partie de l’apprentissage et de la prépa physique et du coup de la logistique aussi pour prévoir : l’équipement préventif ou curatif pour cette bobologie-là, l’alimentation en course (facteur, que j’ai découvert, non négligeable car la tuyauterie est quand même bien mise à mal dans ces épreuves, moi qui était plutôt Aligot Saucisse en tant que bon Aveyronnais 😉)…
et je zappe le bon Camelbak, les bâtons… car j’ai opté de me servir de mes bras aussi pour grimper !
Les courses de préparation
En 12 semaines de prépa, je serai donc passé de 15km max à un 42km avec 3000m de D+ au Marathon du Mourtis (je recommande, très jolis paysages) et ça, au bout de 4 semaines d’entraînement.
4 semaines encore plus tard, direction une nouvelle fois les Pyrénées, pour enchaîner 2 épreuves dans le week-end : le KV et le 35km du Cagire. Je retiendrais le KV : une épreuve pour moi atypique et folle avec ce départ en contre la montre que j’ai trouvé super motivante et un cardio qui grimpe aussi vite que le dénivelé franchi !
Enfin, 2 semaines avant le jour J, j’ai été faire un petit repérage de l’Andorre, qui aura été utile pour la mise en confiance surtout pour la première partie de course avec le départ à minuit.
Ça m’aura aussi permis de faire mon pronostic de course avec mes temps de passage, d’une pour que mes supporters/accompagnants ne me loupent pas et de deux, pour avoir un minimum de repère. Objectif fixé à 18h45…
Objectif : 18h45 !
Et voilà le jour J qui arrive. Un peu de pression oui, mais essentiellement sur le « comment ça se passe ? », « est-ce que je n’ai pas oublié quelques choses ?… » les questions d’un jeune bizu j’imagine »
Dans ce joli petit Village d’Ordino, on est rapidement mis dans l’ambiance de cet évènement, on sent une organisation bien rodée pour cette 10ième édition.
Remise du dossard …l’excitation déjà à bloc…monte encore plus… je suis comme un gamin pressé d’ouvrir ses cadeaux…briefing
d’avant course, des rencontres, des partages avec des traileurs plus expérimentés…et maintenant on attend tranquillement le départ…. Et mes supporters qui arrivent quelques heures avant la course…
Déjà rien que là je suis heureux, je prends un plaisir fou de partager ça avec eux, j’ai tout à gagner et rien à perdre dans ce défi. Ma seule crainte, avoir un problème d’ampoules qui me contraindrait à l’abandon… Physiquement, pas d’appréhension et sur la distance non plus… je crois que je ne réalise certainement pas mais bon cet excès de confiance est salutaire et va me porter tout du long de la course.
Le départ…un vrai spectacle, des échassiers, des percus, une torche humaine, des feux d’artifices… franchement : frissons garantis, c’est purement énorme et à vivre.
3,2,1 Go : cette fois c’est parti, on ne recule plus. Nous sommes 434 partants
5-6km de faux plats montants jusqu’au village de Llorts, mi-route, mi-sentier… toujours dans l’ambiance Klaxons des voitures, habitants aux balcons, c’est motivant… les muscles se dérouillent rapidement sur un rythme un peu plus soutenu que prévu et encore je me force à
ne pas suivre le train du 1er km que je passe sur un tempo de 5 min…
ça part vite …tellement bien qu’au passage à Llorts mes accompagnants ne m’ont pas vu passer…lol pas bien grave. Sortie du Village de Llorts, on plonge dans la forêt pour une montée jusqu’au Pla de l’Estany, en passant par le Coll de les Cases… montée en file indienne, piste single…. Dur de doubler… pourtant l’envie est là mais techniquement difficile.
Au diable la frustration, je suis le tempo et dès que je peux je passe. Avoir un départ plus rapide aurait pu m’éviter les bouchons, mais avec des si on en ferait des choses !
1er ravito et temps intermédiaire, je suis à 10-20min de mon temps prévisionnel au bout de 3h01 de course (179°/434)… 1er ravito techniquement difficile… beaucoup de monde qui attend, le froid me gagne… je décide un peu tardivement d’écourter, j’ai assez de provisions sur moi, je fais le plein d’eau je m’habille, car on attaque les hauteurs dégagées de toutes végétations, et hop c’est reparti.
Premier ravitaillement passé !
Direction le refuge de Comapedrosa, montée caillouteuse, nous ne sommes déjà plus en file indienne, le 1er ravito a régulé au final. La montée je l’avais repérée, dans le sens descendant, mais je sais où je vais, je sais quand je peux relancer ou au contraire si je dois calmer un peu.
Toujours de bonnes sensations, les jambes sont là, le mental aussi. Tellement ravi de participer que la difficulté est occultée. Arrivée au refuge (4h28 – 213°/434 l’effet du 1er ravito sur le classement se fait sentir) je vois déjà certains coureurs dans le rouge, assis et sans l’air d’être motivé pour repartir.
De mon côté, je me sers de l’expérience du 1er ravito. Je fais le plein d’eau en priorité et mange un peu de solide dans la foulée et go je repars : pas de pause pour le physique car les ressentis sont bons.
La partie après le refuge est une belle montée vers le Pic del Port vell, le point culminant de la course…mon prévisionnel m’indique un passage sur les crêtes vers 5h du matin, chose faite et magnifique levé de soleil en prime… avec le balai de frontale derrière et devant.
Ce passage-là était pour moi signe de la 1ere moitié de course car malgré qu’on ne soit qu’à 24-25km jusqu’au 45ième km (lieu de base de vie) il ne restait que de la descente, hormis cette montée casse pattes au Col de la Botella (3ième ravito – passage en 6h37 (192°/434) toujours avec 10-20min de décalage par rapport à mon prévisionnel, c’est rassurant).
Mes supporters arrivent à l’entrée en même temps que moi
Col de la Botella direction Prat Gran, la base de vie, 15km de profil négatif. La descente se fait sur un bon tempo… enfin le mien bien sûr car le 1er est déjà à plus que la mi-course lol. La chaleur se fait sentir surtout en arrivant en ville sur le bitume.
Base de vie en visu et mes supporters qui arrivent à l’entrée en même temps que moi. Perfect ! Je m’accorde une petite pause de 45min, toujours prévu dans mon timing, et je repars comme neuf avec la chaleur en plus…et 198ième en sortie des stands !
Et là je rentre dans le dur pour 11km jusqu’au prochain ravitaillement, erreur de débutant, j’ai trop serré mes chaussures pour éviter une ampoule car je sentais un échauffement avant la base de vie…
5 km de montée sur des cailloux, ça passe mais je sens de plus en plus la pose du pied gauche difficile pour en arriver sur la partie la plus roulante de la course 6km de plat ou faux plat descendant où je ne peux que marcher et la pause du pied devient très douloureuse.
Le moral en prend un coup, car j’ai les jambes, je ne suis pas essoufflé, bref je suis en forme sauf ce pied… Arrivé au ravito de Pardines 56ième km à 12h21 et 213ième … Décision à prendre… on tente le massage de pied par mon super assistant Alex, je chausse une vieille paire de trail sans serrer fort cette fois et un strap au niveau de l’échauffement pour ne pas surenchérir avec une ampoule.
Là je ne voulais pas arrêter mais je me posais sérieusement la question de ce que j’avais et comment je pouvais finir dans cet état… Pendant le massage j’ai vu une grosse dizaine de coureur passer… Grrrr… je ne jouais pas une place mais mon esprit de compétiteur en prend un coup quand même.
Un petit moment d’incertitude … et ça repart !
On se motive, je repars…Merci à mes accompagnants qui m’ont bien poussé mentalement sur ce moment dur. 3-4km plus tard plus de douleur… le mental reprend le dessus et je sais que je finirai, dans ma tête plus rien ne pouvait m’arrêter.
Je remonte coureur sur coureur, dès que j’en vois un devant, il faut que je le passe… je veux rattraper le temps perdu… quelques kilomètres plus loin, à un croisement je croise mes joyeux supporters qui voient de suite mon état de forme et surtout le sourire aux lèvres retrouvé. Je les abandonne jusqu’au départ de la dernière montée vers le Coll d’Arenes au 70ième km.
La banane avant d’attaquer ces 4-5km de grimpette que je finis en évitant de justesse l’orage de grêle. Les 7-8 coureurs doublés sont dessous, je vois un écran blanc de cette grêle qui se déverse sur eux. Quant à moi, je bascule sur le dernier ravitaillement et les 9 derniers kilomètres de descente.
Ravitaillement rapide, il est 16h40, je me dis que la barrière des 18h est peut-être jouable, les estimatifs de course me prévoyaient une arrivée vers 18h40-45… Mon inconscience me pousse à viser ces 18h et ne rien lâcher… me fixer comme objectif de ne faire que courir et essayer de doubler encore et encore…
La dernière ligne droite : on ne lâche rien jusqu’à l’arrivée !!
En 9 km, 26 coureurs doublés….! Mais avant de finir ces 9km, une surprise m’attend à 2km de l’arrivée. 3 de mes supporters sont là, dont Alex avec qui je voulais passer la ligne d’arrivée… un final dont je me rappellerai… moi, qui, il y a 12 semaines, courrais péniblement 15-16km à 9,5km/h je finis ces 2 derniers kilomètres à 12km/h.
Tellement euphorique de finir, obnubilé par les 18h, porté par les supporters au bord de la route, les coureurs qui ont déjà fini et l’adrénaline, j’en oublie qu’un de mes accompagnants n’arrive plus à me suivre et ne me verra pas franchir la ligne d’arrivée en direct. Dommage on aurait pu passer à 4…
mais le plaisir y est quand même pour tout le monde… mes accompagnants famille et amis, une partie de ma famille qui a pu suivre à distance ma progression et me voir en live franchir la ligne d’arrivée…et le mien de plaisir !!! Une vraie satisfaction personnelle et comme je l’avais dit la seule limite c’est nous même !!!
1er Ultra fini, en 18h00’46’’ au final et 133ième au général !
Merci à U-RUN pour ce dossard, Alain pour son plan, mes supporters en directs ou en live derrière l’écran et toutes les personnes qui ont suivis de près ou de loin mon évolution dans mon entraînement et pendant la course…
Et merci pour leur patience car j’ai dû en saouler plus d’un, tellement content de cette aventure qui en amènera certainement bien d’autres !
Par Benoît Gardelle
Infos sur la course : ANDORRA ULTRA TRAIL