Bon, je me lance dans mon récit de course. Je vais essayer d’être rapide (c’est pas gagné). C’était y’a 2 ans, j’avais fait le « minimum syndical » (relire : récit course Nicolas Miquel, Trail des Templiers) et j’avais prévu de revenir mieux préparé. C’était le deal !
Une préparation « plaisir », sans sacrifice
Octobre 2017, je considère le chemin pour arriver ici plutôt bon. Des séances diverses et variées, des week-ends choc course, du vélo, de la vitesse, des bosses, des escaliers, du gainage et pleins de trucs pour occuper les soirées pluvieuses (quoi ? il n’a pas plu !).
Mais surtout de sacrées découvertes sur des endroits insolites, sur des organisations, sur des personnes rencontrées … et sur moi-même. Bref du plaisir avec une impression de ne pas avoir eu à faire de sacrifice et de ne pas avoir mis en péril ni mon travail ni ma famille. Je suis serein quoi !
Le seul petit bémol sera au niveau poids de forme. Je suis en hors forfait car je n’ai pas su me faire violence de ce côté-là. 66,5kg pour à peine 1m70 le matin même. J’ai connu bien mieux et ça fait pas très gabarit coureur de fond, mais c’est en ligne avec ces derniers mois. Au moins j’aurai des réserves.
Ah oui les réserves et les ravitos on va faire comment ? Et bien je ne suis plus à 500 grammes près. 2 bouteilles de 500mL en plastique remplies au 2/3 à l’avant, 3 flasques vides avec déjà de la poudre isotonique dans le dos, le téléphone, la couverture de survie, le k-way, le sifflet, 2 barres énergétique, 4 pâtes de fruits, 1 compote, 1 gel.
On est bien je crois là … et largement au-dessus du matos obligatoire. Oui, j’ai juste envie de rester encore un peu serein.
On y est.
Je vous épargne les détails de la mise en place, du pourquoi du comment je suis là. De toute façon, cette épreuve me plait dans son ensemble. Du caractère, une certaine authenticité et une identité qui me semble à l’image de son organisateur qui invite au voyage et à la réflexion.
Je ne cherche pas plus à comprendre, ni à me justifier surtout que l’aspect « superproduction » devrait me rebuter. Mais j’ai accepté le fait qu’à chaque venue ici, mon temps est lié aux Templiers. Dans ce récit je ne m’attarderai pas sur les paysages, les déclinaisons de couleur proposées par la végétations et les différents causses parcourus sinon je devrais écrire un livre.
Km0, 6h, le départ est donné. Sur ces premiers kilomètres bitumés tout va bien.
Km3, petit plaisir furtif dans la 1ère montée, je passe en tête sur 100m. Je suis parti en adidas adios (parce que les Boston ce n’est pas adapté il parait. [Dédicace à 2015]) pour rentabiliser les parties roulantes jusqu’au 1er voir 2ème ravito. L’idée sur le papier me semble bonne, l’application plus délicate.
Km4, dès les premiers hectomètres de sentiers, je sens que mon choix est un peu bancal. Adhérence limite dans les gros pourcentages. La pluie de ces derniers jours a engendré une fine couche glissante. C’est pas la mort mais et il me tarde déjà le 1er ravito pour faire le changement.
Arrivé sur le 1er plateau, je suis environ 20ème, je me trouve un peu poussif avec une sensation de foulée pas très fluide. Je pioche déjà pour maintenir le rythme. Dans mes rêves les plus fous je pensais rester un peu avec les meilleurs. Tant pis. Je me greffe sur le rythme d’un gars qui a une bonne frontale. Je vais prendre peu de relais, et j’en suis désolé, mais je ne suis pas frais et quand je passe devant je ne vois plus rien ou presque. Le sentier est large, roulant mais pas encore très funky.
Jamais deux sans trois
Km18 arrivent alors les premiers singles. Il est content le Nicolas ! Pas pour longtemps. Je me paie 3 gamelles d’anthologie en moins de 3km. Zen, soyons zen ! Et un petit doigt tordu sur la 1ère ! Un ! [double dédicace à 2015] ! Et une bouteille éclatée sur la 2nde ! Une ! Sur la 3ème rien à déclarer, c’était surement pour le « jamais 2 sans 3 ».
Les chaussures, la frontale pas top, les sensations bof … mais ça sentirait presque le hors sujet. Je crois que j’étais franchement mieux lors de mes 2 dernières venues sur cette section.
Km24 ! 1er ravito ! Enfin ! Finalement personne avec mes autres chaussures. Ce sera pareil pour les autres. Mode « solo dingo » jusqu’au bout. Ça me fera la b … euh les pieds ! J’en souris presque car cela s’est décidé la veille à 22h aussi. Je prends une bouteille en plastique pour remplacer celle qui a morflé et zou !
Désormais je vais me forcer à m’appliquer sur ma foulée, car je sens déjà les limites de la fine semelle de mes runnings Je m’improvise alors biomécanicien. J’essaye de bien courir sur l’avant du pied, de mieux caler mon bassin pour avoir une foulée économe, revoit mes montées de genoux, tout cela afin minimiser les chocs, etc etc.
Bref mon corps fera l’amorti comme il peut. Et en 3km, ça commence à payer. En plus, petit à petit avec le jour qui se lève, la confiance et le plaisir reviennent. J’ai aussi le décor pour me changer les idées. Les kilomètres défilent et reviens petit à petit sur des petits groupes ou des athlètes esseulés.
On reste sage jusqu’au km45
Km30, quand je reprends Manu Gault (une valeur sure ici, même si 2017 n’est pas dans sa meilleure saison) je me dis que je ne suis pas complétement hors sujet. On m’annonce dans les 12 ! OK je prends.
Km33, 2ème ravito. Les ravitos se font en mode freestyle. Je fais des mélanges improbables : eau gazeuse, coca, boisson énergétique. Effet « geyser » garanti à la première gorgée ! Comme je suis le 1er concurrent à « profiter » des bénévoles, j’en mets plusieurs à contribution en même temps, ce qui explique ces mélanges.
J’en oublie mes flasques dans le dos. Ils sont tout contents de me voir piocher dans leur trucs (bananes, pâtes de fruits principalement) car ils étaient impatients, même si pas forcément prêts. C’est l’occasion de balancer 2, 3 vannes pourries comme j’en ai le secret et de les réveiller aussi.
Je « perds » à chaque fois un peu de temps mais pas tant que ça non plus. De toute façon je ne suis pas à la minute près aujourd’hui. Une minute de gagnée ici cela peut être 10 minutes de perdues plus tard.
Je passe donc une bonne partie de la course à me dire « Ne fais pas le couillon, il n’y a rien à rattraper », « Court bien mais ne crame pas ton capital fraîcheur ». Parfois (j’ai bien dit parfois) j’ai envie d’accélérer mais je me raisonne. On reste sage jusqu’au km45, au moins !
La stratégie du placement sécurisé
Km45, comme il y a 2 ans, c’est le moment où Alex Nichols semble commencer sa course. Il me rejoint au même endroit [triple dédicace à 2015] et me passe (ce sera le seul gars à me doubler d’ailleurs). Je me dis « allez, suis-le un peu », car là je ne suis pas dans le rouge … ah non, finalement, je crois que ça va pas être possible. Lui est en mode ascenseur ou superman, bref là le hors-forfait je le sens bien et me le fait bien comprendre.
Je positive, je suis dans le top10 (On a « croqué » 2 gars entre temps), c’est cool, la vie est belle … mais le plus dur reste à faire.
Donc je reste en mode tactique « Cours quand tu peux ! Fais les bosses sans piocher ». Bref du moment que je peux courir sur le plat, dans les faux plat et que je peux faire les descentes sans couiner c’est que je suis pas loin de la vérité de mes capacités. Et quitte à marcher dans les bosses, profites-en pour boire ou manger.
Ce sera ma tactique jusqu’à l’arrivée : je rattrape Rachid El Morabity (qui me félicitera au passage) puis un « kisprolls » (bref un gars typé viking), Sylvain Court et Adrien Michaud. C’est donc le moment « guide du routard » avec tous ces monuments de la discipline doublés en 10-15km.
Tout ce beau monde abandonnera un peu plus tard. Ça peut paraitre facile mais c’est le tarif ici quand on joue à quitte ou double. J’ai connu ça dans une autre vie et aujourd’hui j’ai pris une autre option, celle du placement sécurisé ! Du coup, ça me booste un peu d’avoir mieux gérer qu’eux, mais j’essaye de ne pas sombrer dans l’euphorie et de faire n’importe quoi.
Je couine comme jamais dans les 2 dernières montées avec ces pu%@!# … euh sacrées portions d’escalades. J’ai beau savoir qu’il va falloir la jouer Cliffhanger ici, je fais comme les copains et je « maudis » un peu ces sommets qui n’arrivent jamais.
Je fais gaffe à pas chopper de crampes à faisant ces grands écarts à la verticale … mais j’ai toujours la « fraicheur » pour courir sur le plat et dans les descentes. L’autre difficulté pour moi c’est de gérer les encouragements. Un truc que j’ai toujours un peu du mal à assimiler. C’est ainsi !
En plus comme j’ai mon mp3 sur les oreilles qui n’a jamais marché de la journée, peut-être que les gens crient encore plus fort pour être sûr que je les entends. Allez savoir.
Km65, au ravito du Cade je passe 6ème.
C’est noël aujourd’hui ou quoi ? Celui que je viens de doubler a un maillot qui me rappelle quelques souvenirs [spécial dédicace à ma péripétie du Trail du Cassoulet], donc même si il a l’air gentil, qu’il me met de manière légitime un peu la pression dans la dernière ascension, je mets un point d’honneur à faire l’ultime descente comme il faut pour finir devant.
Je suis sur le cul de pouvoir faire cette descente presque en décontraction. Quel changement par rapport à 2015 ! Finalement en running ça passe quand on a encore les quadris en état !
Km76, je finis presque « frais ». De quoi dire que j’en ai trop gardé et quelques kilomètres en plus ne m’aurait même pas dérangé ? Non ! Je vous rassure ce constat est uniquement valable avec l’ « euphorie » de l’arrivée et serait vrai accessoirement sur du plat ou profil descendant, car j’ai été assez mauvais en D+ et particulièrement sur la fin.
D’ailleurs dans les 500 derniers mètres je prends conscience de mon « exploit » et je craque (fais chier) … bref je chiale comme un gamin qui découvrirait un sapin de noël avec pleins de cadeaux à son pied alors qu’il pensait ne rien mériter. Bref j’ai les yeux bien embués, pas besoin de kilomètres en plus, assurément. Putain ! 6ème des Templiers ça le fait !
Je réalise aussi que j’ai trouvé un peu ce que je venais chercher ici.
Des paysages, des sensations, des émotions, de la concurrence et un peu d’autosatisfaction. On m’annonce même en équipe de France et aux prochains mondiaux.
Bon c’est vraiment un truc que je n’ai pas calculé sachant que je n’ai pas de club pas de licence pas d’entraineur … bref tout se mélange un peu et je me dis que ça mérite clarification.
Sur le moment, je me sens « juste » flatté, même si une part de moi considère déjà que je ne suis pas fait pour ça, que des candidats bien plus armés que moi sont juste passés au travers de la course et devraient y aller à ma place. C’est les Templiers, une course, un profil à part !
Petite déception à signaler, je me suis presque retenu d’uriner sur le final car je m’étais dit que j’aurais surement gagné un petit contrôle anti-dopage. Bref j’étais prêt, prêt à éviter une attente interminable due à ce genre d’obligation. Et bien même pas. Pas « tiré au sort » apparemment … tant pis j’irai arrosé les fleurs.
Je profite bien du ravito bien garni et du repas d’après course. Et je rentre chez mon hébergeur de luxe en marchant les 3km pour y arriver sans couiner. Je suis sur le cul. Pas une crampe. Bon faut pas me demander un footing non plus.
Je serais capable de revenir à l’arrivée un peu plus tard en vélo, juste pour avoir l’occasion de parler avec le sélectionneur Philippe Propage qui va me confirmer qu’il fallait être licencié le Jour J. Je me sens presque libéré d’un poids que je n’aurais surement pas su supporter.
Il ne faut y voir rien contre le championnat ou la fédé. Je me connais suffisamment pour savoir que finalement cette situation est surement la meilleure pour moi. Ni plus ni moins. Ce sera juste désormais l’opportunité d’un nouvel axe de réflexion lorsque je m’ennuierai … et si jamais cette situation me donnait finalement l’envie d’aller plus loin, j’ai encore bien des choses à prouver et surement plein d’opportunités pour le faire. A moi, et uniquement à moi, de savoir si cette envie est vraie.
Voilà les Templiers 2017 c’est fini. Je m’étais dit que ce serait probablement la dernière mais comme j’ai gagné un ticket pour revenir, et avec hôtel inclu cette fois (et accessoirement un petit chèque de 500 euros aussi en passant pour être totalement transparent), je me dis qu’il y a moyen de revenir faire encore cet incroyable voyage en 2018 et de manière différente. Salut Millau et à bientôt.
Bric à Brac « entrainement » / équipement :
Bon juste quelques éléments en vrac sur mon entrainement et les choses que j’ai fait évoluer pour ne pas arriver les mains dans les poches.
- Etre plus souvent débout
J’ai remarqué que souvent les personnes qui « performaient » étaient du monde militaire et je me suis dit que faire des gardes (genre 24h débout) participaient surement à leur aptitude à faire des longues distances (pas uniquement forcément).
Donc j’ai un peu appliqué cela : être débout plus souvent puisque désormais nos modes de vie nous incitent à être souvent assis. Et si vous ajoutez une ou deux randos en mode gros sac à dos ou enfant sur les épaules pendant une paire d’heure, vous êtes pas mal.
Car accessoirement sur ce genre d’épreuve on est donc débout au minimum 7h d’affilé avec un peu plus de poids sur le dos qu’à l’accoutumée (enfin surtout pour moi)/
- Gainage/muscu
Le gainage pour le haut du corps type « planche » (car on court avec tout son corps) et de la musculation souple (basée principalement sur le poids du corps) type squat, des fentes avant … le genre de trucs que tu peux par exemple caser autour du skate park sur lequel ton fils fait de la trottinette.
C’est certes l’occasion de passer pour un martien mais bon on est tous le martien de quelqu’un plus ou moins. Tout ceci permet de faire du renforcement musculaire (qui me semble indispensable pour les longues distances) sans forcément faire du cardio. Bref j’étais plutôt du genre à m’appliquer sur les mouvements et que de vouloir les faire vite.
- Du vélo sans pédales auto
Toujours du vélo mais désormais sans pédales auto : j’ai toujours fait beaucoup de vélo, mais cette année j’ai décidé d’enlever les pédales auto car tirer sur les pédales ne me semblait pas servir à grand-chose si transposé à la course à pied. Je vais moins vite mais cela n’a pas d’importance. Autre bon point, cela simplifie les session « duathlon » car pas de changement de chaussures à prévoir.
Aussi j’ai essayé de plus varier les positions (j’avais la fâcheuse tendance à faire trop de danseuse qui est une position que j’ai beaucoup travaillé par le passé), donc retour le cul sur la selle plus souvent pour faire travailler les cuisses en puissance et moins en dynamique.
- Les week-end choc
Les weekend choc c’est la base ! Faire sur 2 jours un kilométrage et dénivelé au moins équivalent à l’objectif. Chose que j’avais eu un peu de mal à appliquer jusqu’à présent pour cette distance. Perso, j’ai vu plus loin avec bien souvent du vélo en plus. Dans mon cas cette année, cela aurait été 1 gros weekend choc axé CàP un mois avant et un dernier mixant CàP et vélo 2 semaines avant la date objectif.
Weekend chocs sur lesquels j’ai testé pas mal de chose niveau alimentation afin de trouver la recette gagnante ou au moins éviter de reproduire les situations qui ne marchaient pas.
- L’équipement
Par exemple pour moi le salé ou et les barres de céréales sont à proscrire (attention l’alimentation en course à pied est plus exigeante que celle en vélo). C’est aussi durant ces weekend que j’ai pu voir que j’avais 2 options niveau équipement : soit chaussures de trail, soit chaussures de running avec manchons de mollets (surtout pour le maintien musculaire) qui est vendue pour la récup (allez comprendre).
Test de la paire de chaussures de trail que j’avais validée (un vrai coup de cœur qui ne m’a pas servi finalement : test KOA TR SAUCONY). Et donc une valeur sure pour moi (même si pas forcément adaptée pour le trail) : adidas adizero adios Boost 3.
- La diététique
Et niveau diététique, c’est un échec pourtant intéressant. Je n’ai jamais autant mangé que cette année sans forcément prendre de poids (mais encore moins en perdre). Aucun conseil à donner.
Je fais juste le constat que ne pas me priver m’a surement servi à presque ne jamais tomber malade cette année (il y a d’autres raisons). L’effet collatéral à cela est qu’un affutage en devient encore plus dur car les mauvaises habitudes ont la vie dure.
Par Nicolas MIQUEL
les résultats de la Grande Course des Templiers : résultats trail des templiers 2017