En tant qu’ancienne toulousaine, j’avais de nombreuses fois entendu parler de cette magnifique course basque. Et ces échos positifs ne pouvaient que me donner envie d’aller vérifier par moi-même que l’Euskal-Trail n’est vraiment pas une course comme les autres … !
Bon d’accord, la position dans le calendrier n’est pas le top pour nous : 5 jours après mon retour de ce magnifique périple au Népal, et une semaine après l’Éco-Trail d’Oslo pour Manu …. forcément, pas mal de fatigue accumulée.
Mais peu importe si la forme n’est pas eu rendez-vous, l’objectif n’est pas de « perfer », mais de partager et de vivre des bons moments à deux. C’est donc avec beaucoup d’entrain que nous prenons la route du Pays Basque ce jeudi 22 mai !
L’Euskal Trail, c’est une épreuve qui se court en duo. C’est toute la spécificité de l’évènement. On part à deux, on arrive à deux ! Et on prend deux départs puisque la course se déroule sur deux jours (ça fait beaucoup de « 2 », c’est forcément une course pour moi !! ;)).
Deux formats proposés : le deux fois 25km ou le 2 fois 40km. Avec Manu, on préfère opter pour la longue distance, en se disant que ça nous fera un très bon bloc de préparation pour notre prochain gros objectif de l’année : le 80km de l’Eco-Trail de Stockholm.
Les deux jours semblent assez similaires en terme de durée d’effort, avec des parcours aux profils semblables : on annonce 2300mD+ chaque jour. Sur 40km, c’est costaud, et ce n’est pas avec le peu de travail en montagne qu’on a accumulé cette année qu’on peut partir confiants … mais au moins, on fera bosser les cuissots !
Et puis une chose est sûre : on va en prendre pleins les yeux côté panoramas !! Avec cette météo de fou annoncée, on devrait pouvoir profiter de chaque passage en crête ou sommet atteint … mais quelle chance !!
Il va quand même falloir gérer plusieurs points : bon, les deux réveils de suite à 4h du mat déjà (bah ouais, l’un comme l’autre, on n’est pas du tout du matin !), la récup entre les deux épreuves (remettre le couvert après une course de 5h, ça sera une première pour nous deux), la gestion de notre course d’équipe (qui pousse qui ? ;)), … on a déjà couru des petites courses en duo avec Manu, mais pas plus de 14/15km.
Là, c’est autre chose. Une belle expérience nous attend, vivement le départ à 6h30, les jambes trépignent une fois le dossard retiré (qui se savoure forcément avec un bon verre de vin ! ;)).
Les préparatifs–> le plaisir d’une course partagée
Manu >> « Je ne vais pas mentir, ce n’est pas mon premier départ de course et l’adrénaline du « start » n’est pas au rendez-vous en ce vendredi 26 mai à 6h30 du matin. En cause ? Une joie immense avant tout d’être au côté de Sissi et de partager cette course à étape avec elle ! Donc pas de pression ou de stress nauséabonds mais bel et bien une envie de bien faire et de profiter de ce looooonnngs moments à 2 qui se profile… Cela fait des semaines que je suis excité à l’idée de partager cette course avec elle.
Et c’est plutôt dans l’attente et les préparatifs que j’ai trouvé mon premier « temps fort ». Enfin une course à partager au même moment, avec les mêmes impressions, les mêmes galères et la même solidarité. Ça change des courses habituelles où l’on se souhaite bonne chance au départ et où l’on se retrouve l’arrivée. Là, tout est pour moi, du début à la fin!! 😉 Je vais « égoïstement » profiter de ma grenouille tout le long de la course ! Donc au moment du coup de pistolet juste envie de lâcher : « Yes, ça peut commencer !!!!! ».
Le départ : rien ne sert de courir … !
Sissi >> « Comme prévu, il n’a pas été simple de sortir du lit à 4h … et le petit déjeuner n’est pas encore digéré à 6h20 quand nous prenons place sur la ligne de départ … mais quel bonheur d’être là ! Le trajet en navette avec les autres participants nous met bien dans l’ambiance, et le speaker qui nous appelle pour nous confier une balise GPS nous met bien la pression ! Un coucou aux copains du CA Balma (ils sont venus en nombre), et le go est donné !
Ça part vite, mais nous suivons le rythme avec mon coéquipier de choc qui me suit à la trace et me laisse faire le rythme. Petit souci d’ajustement du Camelbak, on prend le temps de le caler et on s’accroche au duo espagnol qui a pris les devants dès le départ. Bon, on aurait mieux fait de ne pas les suivre, parce qu’ils se sont trompés de route en ratant un balisage ! Nous voilà donc passés de la 2ème place à la 6 ou 7ème : grrrrrrrr !! Une bonne dizaine de minutes de perdu, c’est rageant, mais rien de sert de s’énerver, il faut se serrer les coudes pour tenter de recoller maintenant … »
Première partie de course : zen !!
Manu >> « Nous venons sur cet Euskal trails pour nous faire plaisir en premier lieu mais surtout pas pour se promener et faire de la figuration ! Et j’espère découvrir, en partageant ces étapes avec Sissi, des sensations, des émotions de coureur, des retournements de situation qui font que l’on va vivre un scénario intense je l’avoue… Je ne pensais pas que la course allait nous offrir cela sur un plateau dès les premiers hectomètres !
En effet, alors que le début de la première étape est très pentu, nous nous dégageons dans les premiers kilomètres des duos mixtes avec un couple d’espagnols que l’on a appelé les « Gomez » toute la course. Les filles (Sissi et la « Gomez ») sont au coude à coude et ça sent déjà la grosse bataille dès la seconde rampe de la course. Je me dis alors qu’on va passer une sacrée journée … On se fait d’ailleurs une petite tape amicale avec mon collègue espagnol pour se dire que nos moitiés ont du tempérament et que ça va sûrement bagarrer sec entre elles.
C’est le sport, ça me fait vibrer et je vois bien qu’on se comprend bien avec mon homologue espagnol. Nous échangeons un regard complice et admiratif pour ces valeurs que les filles nous démontrent et je suis très fier de Sissi dont je vois bien qu’elle « défend le bifteck » comme une lionne. Ce coude à coude dure tellement que nous nous faisons rattraper par un cri qui nous signale que nous ne sommes pas sur le bon chemin… Regards croisés franco-espagnols à 4 paires d’yeux qui veut dire « oh mince, on se fait la guerre depuis un bout de chemin pour rien ! ». Résultat : un demi-tour express pour rattraper tout le temps perdu (une bonne poignée de temps évaluée à 10 minutes) et un « reculé » au classement général à la sixième place.
On redescend donc droit dans le pentu et reprenons le bon chemin qui est un long single très étroit où tout le peloton s’est engagé. Grosse « galère » à remonter. Sissi est survoltée, elle monte sur les talus à droite, à gauche pour doubler et produit un énorme effort pour rattraper le temps perdu. Franchement, ça décoiffe. Elle fait du large dans les chemins. Elle m’épate. Rien que pour ça, je suis content qu’on ai pris un peu de retard. La chasse va être longue et sûrement nous coûter cher à un moment donné mais au moins, j’aurais vu de quel bois se chauffe la grenouille quand elle est en colère contre le sort…! ;)) »
Une technique qui fonctionne bien !
Sissi >> « bon, une fois ce chaos de début de course tassé, l’effort fourni pour essayer de retrouver sa place dans le peloton, on se remet dans la course en essayant de reprendre un rythme de croisière qui nous permette de finir sans trop le payer demain. Finalement, on se prend vraiment au jeu de la compétition … le fait d’avoir Manu a mes côtés me rajoute une petite pression que je n’avais pas imaginé : j’ai envie de le rendre fier et d’être à la hauteur de sa personnalité de compétiteur !!
Il me booste, je vois qu’il n’a pas envie de se contenter de balader … ok, Manu, alors, je te propose de bosser aussi : j’ai vu un duo qui se tirait, pourquoi on ne ferait pas pareil ? Voilà donc Manu qui n’hésite pas à me mettre la main aux fesses pour pousser pousser pousser dans les montées !! Ah bah voilà, une méthode gagnante-gagnante ! Bon, c’est vrai que cela nécessite une bonne coordination, mais une fois la bonne technique adoptée, ça nous permet de gagner en puissance, et Manu m’impressionne de par le travail supplémentaire qu’il parvient à fournir.
Grâce à ce superbe travail d’équipe et à notre régularité sur l’ensemble de la distance, on parvient finalement à remonter à la seconde place, à 2/3′ des premiers, le duo Martin/Mougin ! »
Plus de peur que de mal !
Manu >> « Fin de la première ascension négociée très vite. Les « Gomez » ont lâché un peu de terrain et nous parvenons finalement à repasser 3ème, mais une morale me revient à l’esprit trop tard: « quand on se suit de trop près, on a du mal à lire le sentier ».
Résultat : sur un sentier relativement propre que nous traversons à vive allure, je ne lève pas les pieds et me prends la jambe gauche dans un caillou que je n’ai pas vu en suivant Sissi de trop près. Je chute lourdement, énorme douleur et grosse « pastille » sur le genou. Ça saigne bien … Sissi se retourne, s’inquiète. Elle prend le temps de me demander si ça va, de m’assurer qu’on peut tout arrêter, que c’est pas grave. Solidarité.
J’essaie de ne pas me poser de question et de recommencer à courir tout de suite pour ne pas tergiverser sur la douleur et ne pas perdre le temps acquis. Plus de peur que de mal, je pourrais courir normalement jusqu’à la fin de l’étape. Mais j’apprécie que Sissi ai eu le réflexe de « tout arrêter » si il le fallait… »
Se remobiliser, mais sans prises de risques intitules
Sissi >> « forcément ces épisodes de chutes refroidissent toujours un peu, et lorsque nous repartons, la vigilance est multipliée. D’autant que la seconde partie du parcours est très technique, avec des descentes cassantes et très raides ! La chaleur commence à peser sur les organismes, il faut se forcer à bien s’hydrater pour ne pas en payer les conséquences plus tard …
Je manque à mon tour plusieurs fois de faire le vol plané : essayons de garder un peu de lucidité pour terminer. D’autant qu’il va falloir remettre ça demain, alors bon .. !! On décide donc de lever le pied pour terminer, sans même tenter de rivaliser sur le duo espagnol qui nous reprend dans la dernière descente. Ils semblaient clairement plus frais et à l’aise que nous sur cette portion ! On fera les comptes demain soir, pour le moment, on savoure ces derniers kilomètres partagés et la joie d’avoir bien défendu notre équipe jusqu’à l’arrivée ! :)) »
La joie de franchir cette première ligne d’arrivée !
Manu : « nous finirons 3ème (à moins de 3′ des premiers) de cette étape et bien fatigués. J’aurais aidé Sissi au maximum dans les montées, mais le temps perdu en début d’étape et la « remontada » qui nous aura coûté beaucoup d’énergie en début d’étape nous aura été fatale sur la fin.
Un couple est resté devant et les espagnols finiront mieux que nous. Mais cette 3ème place a le goût du dépassement, mon préféré. Je suis content de passer la ligne et nous nous serrons avec Sissi avec le sentiment du devoir accompli. On aura vraiment rien lâché. C’était beau et bon à vivre au côté de Sissi.
Géniale première journée ! Avec des paysages à couper le souffle et une fin dans la fournaise basque. Bref, un scénario pour ne pas s’ennuyer ! Vivement le lendemain ! :)) »
Par Sylvaine Cussot et Emmanuel Gault
Informations sur la course : EUSKAL TRAIL