Elle sera au départ de ces championnats de France de cross-country, qui se dérouleront cette année sur l’hippodrome Joseph Desjoyaux de Saint-Galmier.
Anaïs Dechamps, athlète ambassadrice i-Run, est partie un mois au Kenya afin de se préparer au mieux pour ce prochain RDV. Elle nous raconte ce stage inoubliable auprès de tous ces champions.
« Partir en stage au Kenya ? Loin du confort et avec des personnes qui courent trois fois plus vite que moi ?! J’ai hésité. J’estimais avoir eu ma dose de souffrance pour l’année …
Finalement, à force d’entendre que j’aurais tort de me priver d’une telle opportunité, je m’y suis envolée pour un mois, «passer les fêtes de fin d’année», avec une petite partie du groupe d’entraînement. Et franchement, j’ai bien fait.
Les doudounes dans le sac, après plusieurs escales, à Dubaï et Nairobi, il ne nous restait plus que 30 kilomètres à parcourir en matatu pour rallier Eldoret à Iten. 8h du matin, lunettes de soleil, à travers la vitre du matatu, avec Farouk et Jean-Francois Pontier, j’entre dans le décor. Une route unique sans réglementation apparente, parsemée de ralentisseurs faits de cailloux et de terre que les locaux ont pris l’habitude de franchir en diagonale, shops, baraques en taule, des chèvres, des vaches, des motos sur les chemins qui longent la route laissant derrière eux des nuages de terre… Ça monte, ça descend… Puis ça remonte une dernière fois jusqu’à l’entrée d’Iten où s’élève la fameuse porte « Welcome to Iten, home of champions ».
Plus qu’un kilomètre de descente sur un petit chemin de terre et nous arrivons à notre hébergement. La découverte du site est à couper le souffle. En plus de dénoter avec le tableau environnant, l’hôtel offre une vue imprenable sur la vallée du Kerio : un immense rift où se mêlent terre rouge, verdure et chaînes montagneuses à perte de vue. On respire, on est bien, c’est beau, c’est calme.
L’accueil et la qualité des services à notre hôtel sont exceptionnels, et la carte fournie même si on ne prend pas le risque de tout manger. Finalement on aura surtout fait une bonne cure d’avocats, de riz, d’ugali (purée de maïs), de chapati (galette de pain), de poulet et de mangues ! Noël et nouvel an compris. Les bagages posés, le ventre rempli, et après une bonne sieste, on continue d’en prendre plein les mirettes lors de notre premier footing.
Bob Tahri et Timothée Bommier qui étaient déjà sur place, nous emmènent à la découverte de ce qui nous attend pour le mois à venir : des côtes, de la terre, des cailloux, le tout à 2400m d’altitude. On a vite compris qu’on n’avait pas intérêt à faire les marioles à aller trop vite si on voulait tenir le coup ! Les jambes sont lourdes, on s’essouffle plus vite. En chemin on découvre une piste posée au milieu de nulle part : une belle piste en tartan engrillagée et vide, avec accès payant, celle que Lornah Kiplagat a fait construire. Finalement on passera souvent devant pendant les footings mais on n’y rentrera jamais.
Ce n’est qu’au deuxième jour qu’on fait connaissance avec notre terrain de jeu : la piste en terre du Kamariny Stadium. Là où tous se rendent, où il paraît qu’on compte jusqu’à 200 athlètes les mardis et jeudis matin. On y fait d’abord un footing sur l’herbe puis des lignes droites sur la terre. Chaque 100 mètres est repéré par un bâton planté et surmonté d’une bouteille d’eau ou d’une brique de lait. La corde est marquée d’un sillon laissé par les innombrables passages tout comme les diagonales sur le terrain en herbe au centre.
A l’arrivée, il y a un escalier de marches en bois où se perchent les coachs, et la dernière ligne droite est surplombée d’une modeste tribune en bois aux poteaux colorés. Dans la ligne droite opposée des tribunes « en dur » sont à travaux, les ouvriers s’amusent à regarder les athlètes. Parfois une vache se balade parmi les groupes qui enchaînent les séries, d’autres qui font leurs gammes, se changent sur l’herbe, ou se balaient jambes et baskets avec des feuilles pour se séparer de la terre rouge qui les recouvre. Au stade on y allait quelque fois juste pour regarder, on lorgnait les chronos, admirait les foulées, c’était impressionnant. Ce soir de footing la sœur de Bernard Lagat enchainait les 1000m toute seule. C’était si fluide que ça paraissait facile, à plus de 18km/h… Ce n’est pas un mythe, à Iten presque tout le monde court. Et ceux qui courent, courent vite !
Après un premier mois de reprise depuis mon retour de centre de rééducation, l’idée du stage était de reprendre la voie de l’entraînement sans en rajouter, les conditions d’altitude suffisant à elles mêmes pour compliquer le travail. Les allures sur les footings étaient moindres, et les temps de récupération sur les séances étaient gonflés et comprenaient souvent de la marche. Nous faisions la plupart de nos entraînements entre nous avec Vincent, Tarik, Meschak et Mark ses sparring partners, Farouk, d’autres français sur place, Bob, Timothée, Samir, Mohrad et des amis que nous nous sommes faits à l’hôtel, Akara, Hikegami, Ohara… Certains soir je remplaçais les footings de récupération par des marches pour des petits moments d’évasion au cœur d’Iten, sur le marché, avec les enfants.
Mais les entraînements les plus mémorables furent certainement ceux avec les kenyans. Ils ont par exemple pour habitude de faire des footings longs le mercredi à l’aube. Le soleil n’est pas encore levé et chaque carrefour se transforme en un point de rendez vous où se retrouvent plusieurs dizaines de coureurs. La première fois, aiguillés par Benjamin, un ami kenyan, on changea de groupe au dernier moment. Et nous avons bien fait car nous avons appris après coup que ce premier groupe avait couru à plus de 18km/h !
Après avoir traversé Iten par la route principale, le groupe que nous avons finalement intégré (avec notamment les amis de Tarik, Benjamin, sa femme Stacy Ndiwa et Meryem Akdag) prit la direction de chemins qui n’en finissaient pas de monter, de descendre et de s’enfoncer dans la campagne. Je me souviens avoir tenu… 24 minutes ! Car en descente comme en montée, en virage comme en ligne droite, sur la route comme sur la terre, le kenyan ne faiblit pas !
La deuxième fois, dans un autre groupe, je profitai que nous restions plus longtemps sur la route pour faire demi tour avant d’entrer dans la forêt et, après m’être réjouie d’avoir tenu la moitié de la sortie avec le groupe, rentrer en active à mon rythme. La forêt nous y sommes allés à deux reprises dans le séjour. Le cadre est magnifique, ombragé, le sol est souple,… et le dénivelé dantesque ! De toute façon pour courir sur du plat à Iten, il n’y a que le stade, et Moïben road à 20 minutes de la ville, quoique pas si plat que ça.
L’autre expérience qui pique fût un mardi matin. Les athlètes kenyans qui ne vont pas sur la piste font un fartlek de 20×1/1’ en nature. Le rendez vous est donné à 9h à la sortie d’Iten après Saint Patrick High School, à gauche, au début d’un chemin de terre. Nous sommes à l’heure, 50 personnes sont déjà là, puis 80, puis peut être 150, le point de rendez vous s’est rempli en quelque minutes ! Pas d’attente, un homme monte sur un talus et donne le départ. On commence par la minute lente, ce qui m’a permit de courir entourée un peu plus longtemps car au bout de la deuxième répétition j’étais déjà loin derrière. Alors que le groupe s’enfonçait dans la campagne vallonnée, on tachait avec Farouk et une femme qui nous accompagnait pour l’occasion de ne pas se perdre. Ce qu’on n’a pas réussi à faire ! Une fois n’est pas coutume, le retour à l’hôtel s’est fait en moto. Il y en a qui passent tout le temps et partout, et qui, pour quelques sous, nous ont souvent évité de longues marches.
Pour le reste des entraînements il y a eu ces footings dans le vent où nous avons braver les nuages de terre, les séances de musculation bricolées à l’hôtel, des 30/30 à Moïben avec Stacy (8’30 au 3000m et 5è des derniers championnats du monde de cross qui reprend après être devenue maman), des 2 minutes dans les foulées de Bob et Timothée qui faisaient des 10 000, un fartlek en aller-retour dans une côte qui a eu raison de Tarik et moi, et surtout beaucoup de plaisir à fouler la terre du Kamariny Stadium.
Enfin s’il y a quelque chose qui a rendu ce séjour si particulier, ce sont les enfants. Ceux qu’on croisaient tous les jours en montant avec des bidons d’eau plus gros qu’eux, ceux qui nous courraient après, ceux qui nous criaient « muzungu » « how are you » à tout bout de champs et aux quatre coins des parcours d’entraînements, ceux qui venaient s’émerveiller à chaque départ de parapente au pied de l’hôtel… Un bonheur quand on a l’impression de ne plus pouvoir lever les jambes, un bonheur de leur distribuer des bonbons, un bonheur d’avoir fait ce bout de chemin avec eux.
Aujourd’hui, à quelques jours des championnats de France de cross, si le vent, la poussière, les côtes et l’altitude ne me manquent pas vraiment, nul doute qu’ils me seront d’une grande aide à Saint Galmier …! »
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