Cela doit faire la dixième fois que je viens participer au Gruissan Phoebus Trail depuis mes débuts dans cette discipline. J’y viens par plaisir, mais aussi par attachement à la région que je sillonne depuis tout petit pendant les vacances et pour la mentalité si sympathique des audois.
Oui mais voilà, si j’aime cette course, je me suis longtemps demandé si celle-ci m’aimait bien elle aussi… après un premier podium en 2009, j’ai cumulé les contre-performances sur cette course et surtout les « petits » malheurs du coureur qui font que je suis plusieurs fois « passé à travers »… (virus, fracture de fatigue, état de méforme,…). Cette année, j’avais vraiment la volonté de chasser le « chat noir » de la Clape et de m’appliquer pour arriver en forme. D’habitude, cette course me servait de tremplin pour lancer la saison, cette fois-ci j’avais décidé de me la mettre un peu plus dans la tête et de me mettre un peu la « presssion » pour changer la donne.
Sissi, qui affectionne aussi cette course et qui a toujours réussi de belles performances partage l’envie d’y retourner, d’autant plus avec ce beau plateau féminin annoncé. En bref, on est motivé quoi ! On ne change pas les habitudes et prenons nos marques depuis des années jusqu’à prendre la même place de parking en ce dimanche 12 février ! On essaie d’être sérieux sur l’échauffement, de le débuter assez tôt pour ne pas stresser l’organisme au dernier moment. Bref, tout semble bien se passer. Taz (Thomas Saint Girons) nous a même pris nos dossards, tout va bien! On est relax…
Il nous reste 15′ avant la course et nous retournons à la voiture effectuer les derniers préparatifs et nous découvrir pour aller vers la ligne de départ. Soudain, premier coup de panique, Sissi a complètement zappé de donner ses ravitos (cf son récit) et se met dans un gros stress. Obligée de faire un aller retour voiture ligne voiture pour retrouver son assistance. Je la regarde s’agiter et, en serrant mes chaussures (comme un dingue comme d’habitude), j’explose littéralement la boucle qui tient les lacets de ma Fuji… Cela me fait un énorme espace entre l’avant pied et la cheville et je ne peux pas prendre le départ comme ça… Gros stress pour moi aussi !
Alors que tout se passait bien, je commence à me mettre en panique aussi. Je n’ai qu’une paire de chaussure de rechange : mes ASICS DS Trainer que je mets pour les séances rapides et qui sont très très fatiguées. Dans le bazar ambiant de la voiture, je ne sais même pas où elles sont, j’ai l’impression de vivre le mauvais rêve que l’on fait tous : l’heure du départ qui arrive et que je sens rater parce que je n’ai pas mes chaussures : le sketch, mais pas en cauchemar, en vrai… Je prends plusieurs coups de sueur… La misèèèèrreeee !
Le départ est dans 5′ et je retrouve enfin mes chaussures (très fatiguées mais inusables et que j’adore porter), je fonce sur la ligne en zappant les dernières lignes droites et tout le protocole du parfait petit gars qui soigne son échauffement.Je fais mes lacets sur la ligne, me fais chambrer sur le choix de mes chaussures pour une course archi technique et caillouteuse, lève les bras sur la photo, fais un clin d’oeil à mon fiston et ma fille, le gros bisous de « bonne chance et bonne course » à Sissi et décolle. J’ai bien vu le temps passer… Une course avant la course que Sissi aura vécu aussi avec ses ravitos.
On a connu meilleur départ ! Mais bon le train est lancé et cela part plutôt tranquillement durant plusieurs hectomètres. Cela me va bien et me permet de souffler un coup. Maxime Cazajous trouve que ça ne va pas assez vite et prend la poudre d’escampette rapidement avec un autre coureur. La première bosse arrive rapidement et je me place en première position (derrière les deux fuyards) pour imprimer le tempo qui me convient. Je bascule devant et relance bien juste derrière pour ne pas perdre le bénéfice de ce premier effort.
Devant cela ne creuse pas beaucoup et nous tenons (nous sommes une poignée de 6/ 8 coureurs) les deux fuyards en respect à une poignée de secondes. Je mène le bal sur quelques hectomètres et me décide à laisser passer quelques coureurs pour assurer les relais. C’est Emmanuel David qui prend alors les commandes et qui maintient l’écart sur les échappés. Il est très fort dans les petits talus innombrables sur le parcours et me fait bien mal dans ces bosses à répétition. Je reviens sur lui dès que le terrain s’aplanit mais je vois bien qu’il est une jambe au dessus dans la pente. Petit à petit, je lâche du terrain et décide de lever le pied car je connais l’exigence du parcours qui ne laisse aucun répit.
Nous nous retrouvons finalement à 3 en chasse et derrière, les écarts semblent déjà être faits. Je ne regrette pas ma prudence car le rythme que nous maintenons me convient à merveille pour aller jusqu’au premier ravito. Les portions roulantes et linéaires (courtes) alternent parfaitement avec les portions cassantes et pentues. Et je sens quand même que en ce début de course et dans le pentu, ce ne sont pas les « super jambes » qui parlent. J’ai souvent mal aux cuisses en haut des bosses et me sens un peu « bloqué ». Pour autant, j’ai vraiment du jus et sais que ces sensations vont passer à un moment ou un autre (je suis assez coutumier des jambes moyennes en première partie de course).
Je laisse donc les kilomètres défiler et poursuis mon chemin jusqu’au ravito du 28 ème kilomètre où je retrouve la famille au grand complet pour un ravitaillement au grand complet lui aussi! (c’est le premier ravito après 2h10 de course, autant dire qu’on a tous besoin de faire le plein…). Nous sommes toujours 3 mais je me doute que ce n’est plus pour très longtemps… Effectivement, le groupe explose, et dans la difficulté qui suit (un bon pétard de 100 m + en tout), nous nous éparpillons façon puzzle… Seulement, je ne suis pas devant et un de nos compagnons est parti. J’ai préféré être prudent dans cette ascension difficile et préfère attendre encore un peu avant de « mettre en route ».
Les portions qui suivent, bien que techniques, me permettent de maintenir l’écart et j’attends que le terrain soit un peu plus « roulant » pour envoyer. Cela tombe assez bien, les jambes se délient petit à petit et je sens que je peux appuyer de plus en plus. Les écarts se réduisent et la minute de retard que l’on m’annonçait se réduit en 30 secondes puis 20. A 1 kilomètre du ravito du 40ème, je rejoins deux coureurs que je passe finalement assez fort pour ne pas perdre de temps avant de me ravitailler. Le ravito du 40ème est assuré par mon fils Ben et mon père façon « Paddock »! 🙂 Je passe sans m’arrêter et prends tout au vol!
Cette fois, je suis lancé et les jambes répondent bien alors j’en profite. On m’annonce que devant les écarts sont faits donc je gère mon allure pour bien finir sans risquer non plus la défaillance… Je m’aperçois simplement qu je passe bien mieux les bosses en cette fin de course qu’au début et que, comme d’habitude, les jambes sont bel et bien « décoincées ». Il sera trop tard pour le top 2 mais c’est finalement un podium et une 3ème place qui me fuyait depuis des années que j’arrive à décrocher. Cela suffit à mon bonheur tant j’ai vécu des scénarios catastrophes sur cette épreuve qui me tient pourtant à coeur.
Je retrouve la petite famille et c’est Michel (Hortala), le speaker qui vivait ici sa dernière course, qui m’accueille. Petit clin d’œil à lui et à sa passion pour ce qu’il fait et il est temps ensuite d’attendre le résultat de Sissi qui a fait une superbe course une nouvelle fois sur cette épreuve. Elle finira finalement 2nde en ayant réalisé une course vraiment pleine ! Très fier d’elle… Après une bonne cassolette avec la famille, Sylvie et Marc nos relais Narbonnais sur les ravitos et les podiums, reste à se reposer un peu avant de repartir sur la prépa de Paris qui se dessine…
Un peu de repos et… bientôt cap vers la Tour Eiffel !
Emmanuel Gault
Photos : Jérôme SANTA
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