La capacité d’accélération est une qualité commune à tous les athlètes des disciplines de fond, de demi-fond et de sprint. Bien qu’exploitant leurs potentialités différemment, ces sportifs peuvent régulièrement constater que le dernier à accélérer en tête de la course a de grandes chances de gagner.
Étonnamment, la mise en condition mentale, freinée par des pratiques ancrées dans la relaxation, propose peu de solutions pour optimiser cette aptitude. Prenons l’exemple du « coureur qui est dans sa bulle », il utilise son imagination pour se protéger du stress provoqué dans son environnement sensé troubler sa concentration. C’est un schéma « type » qui rendra encore de nombreux services, mais il existe d’autres possibilités de travail.
L’hypnose, avec beaucoup de souplesse, suit l’évolution des disciplines. La concentration et la régulation des émotions peuvent être améliorées sans isoler l’athlète des signaux extérieurs susceptibles de le parasiter. L’emploi régulier et progressif de la transe amène l’individu à un excellent niveau d’attention en situation de compétition. Se détourner d’une grande partie de la réalité par une utilisation erronée de l’imagination est contre-productif.
Cette orientation libère de l’espace pour une technique qui s’oppose à l’utilisation de l’imagerie mentale dans l’action. Il s’agit de l’emploi d’un geste conditionné (1) dont l’aboutissement est la production d’une forte accélération à un moment clé. Plutôt que de refuser la tension (le stress, la nervosité) en la considérant comme nuisible et énergivore, l’individu se donne la possibilité de la transformer en carburant. Cette réserve sera libérée par le geste conditionné. Une conception qui change radicalement l’éprouvé du stress avant et pendant la course.
Généralités sur l’emploi de l’hypnose dans le sport
Il serait faux de prétendre donner une exacte définition de l’hypnose. La transe (2), expérimentée différemment d’un individu à un autre, est le produit de ce qui est perçu comme une situation vécue. Les sensations, à l’identique de la conscience, échappent à la mesure !
Plutôt que d’essayer d’expliquer les phénomènes liés à la discipline, considérons l’hypnose comme un moyen qui encourage le sportif à écouter son corps autrement. L’athlète, positionné dans l’ici et maintenant, pense en fonction du contexte et non pas du résultat. Il s’adapte, en rythme et sans précipitation, aux difficultés qu’il rencontre car l’anticipation entraînerait une prise de risque inconsidérée pour le résultat de l’action (exemple: un faux départ).
L’hypnose place l’individu dans la réalité de l’action à mener. Cet état n’efface pas la peur mais permet de la ramener dans des proportions moins pénalisantes. Cette prise en compte des tensions diminue considérablement la quantité et l’intensité des ruminations. Ce processus protège le compétiteur d’un effondrement de ses performances individuelles, quel que soit l’enjeu.
Savoir s’installer calmement, dans les postures assise et debout, suffit à mettre le corps dans une relation différente avec l’espace extracorporel. La transe invite la personne à accéder à sa sensorialité. Elle permet de clairement distinguer les informations qui proviennent de l’extérieur et leur interprétation à un niveau plus intime. La peau fixe les limites de l’enveloppe corporelle, les organes des sens assurent la liaison entre l’extérieur et l’intérieur. Les signaux comme les sons guident quasi-systématiquement le regard. Instinctivement, ce que nous percevons influence notre comportement. Ignorer la dimension corporelle reviendrait à réprimer les émotions. La gestion des affects, tout autant que la force physique et l’habileté technique, participe à la bonne marche de la performance.
Le geste conditionné pour accélérer !
Quand la physiologie nous amène sur le terrain des émotions, les études tendent à prouver que l’action serait subordonnée à l’état affectif de la personne. Il est possible d’imaginer que la qualité de la plasticité cérébrale de l’élite des sportifs dans un environnement immédiat défavorable, augmente la prise d’initiative.
L’être humain est une machine à traiter de l’information. Tout ce qui est récupéré par les différents récepteurs (signaux, stimuli) est classé, hiérarchisé de façon à fournir une réponse motrice, à initier une action en fonction du contexte. Le cerveau exprime l’éprouvé du corps. Quand l’effort est difficilement soutenable, les idées qui traversent l’esprit ne sont pas positives. Il est possible, pour quelques secondes seulement, d’isoler volontairement le raisonnement sans couper l’athlète des sensations douloureuses. C’est dans cet espace que le geste signal trouve sa place.
Les séances d’hypnose ont permis d’ancrer un réflexe conditionné qui entraîne instantanément une forte accélération. C’est d’autant plus utile que dans ces phases de course où une majorité de compétiteurs sont fatigués, il existe une forme de contagion affective. Ce geste n’a rien de magique et n’amène pas l’homme à se surpasser dangereusement. Il ne pourra produire cette accélération que s’il en a réellement les moyens. Ce qui fait la différence, c’est qu’à potentiel physique égal, pendant que l’un hésite, l’autre prend l’initiative d’accélérer. Il est important de fixer des limites à l’interprétation de cet entraînement mental. Avec l’hypnose, l’athlète n’est pas doté d’un pouvoir magique.
C’est la sensibilité de l’hypnotisant qui va déterminer l’intentionnalité du praticien et le nombre de séances. Une fois que le niveau de transe est de qualité, ce qui peut prendre du temps, le sportif vit la séance comme la réalité. Se présentent alors plusieurs possibilités, la plus évidente est de ramener à la conscience un souvenir dans lequel l’athlète s’est senti particulièrement fort physiquement et confiant. Il faut alors fixer ce souvenir dans l’esprit et y associer le geste conditionné. La séance suivante sera consacrée à l’association du geste avec une situation de compétition ou l’individu pourra produire une accélération tout en bénéficiant de la confiance qu’il a ramenée de son expérience passée.
Le praticien ne doit rien attendre du résultat, il évite ainsi de tomber dans le piège de ce que les psychanalystes nomment le contre transfert(3). Par cette simple mesure, il fait preuve de neutralité et de bienveillance.
Les séances de geste conditionné
Phase de préparation (8 à 10mn) : prise de conscience des sensations internes, externes (perceptions thermiques et corporelles) et de la peau.
Phase d’approfondissement (8 à 10mn) : Utilisation de l’hypnose classique avec deux phénomènes, la lévitation du bras (mouvements inconscients du bras droit dans l’espace) et la catalepsie des yeux (fixation des paupières).
Fixation du geste conditionné (10mn) : Le sentiment de confiance associé à la capacité d’accélération sont fixés dans la conscience et dans le corps par l’intermédiaire du poing gauche.
Phase de récupération (5mn) : reprise progressive du tonus musculaire.
Texte : Laurent Favarel.
« réflexe pavlovien
état naturel entre veille et sommeil
projections du praticien sur le sportif »
Crédit photos : Nicolas Mascaro