Courir de nuit reste une expérience particulière et lorsqu’il s’agit de courir un marathon, la chose est encore moins anodine. C’est ce que le Marathon de Bordeaux propose et c’est une des principales raisons pour laquelle je suis venu poser mes baskets ici.
En fait je ne connais pas la ville et l’idée de la découvrir de nuit au travers d’une épreuve sportive me semble être une idée plus que sympathique. On est un peu moins de 8000 partants sur cette distance, individuels et relais confondus dont à peu près 3500 individuels. Pour les chiffres exacts, il faudra creuser un peu plus mais le « score » me semble plus qu’honorable. Le départ est donné à 20h30 le long des quais de la Garonne avec un public venu en masse. Ça le fait !
Les conditions météo sont finalement quasi idéales, le vent est assez faible et il fait frais mais pas froid, alors qu’il a plu toute la journée. Royal ! C’est donc parti pour 42km195 !!! Rapidement je suis dans le top 10. Je suis à deux doigts de chercher à rester avec les 5 premiers qui sont groupés, mais au bout de 2 km et le passage d’un superbe pont bombé, je décide de rester sage et sur mes aspirations initiales de 3min40s environ au kilo et d’un potentiel 2h36min. Je ne suis pas seul car Sam, un anglophone bavard et plutôt exubérant me rejoint. Il est en chemise et cravate s’il vous plait … mais cela ne l’empêche pas de cavaler le bougre ! On va faire route ensemble jusqu’au km15. Il a les faveurs du public et n’hésite pas à taper dans les mains dans certains passages dignes des grandes étapes du Tour de France.
Vous l’aurez deviné, dans le centre-ville c’est vraiment la fête. Encouragements, applaudissements, grands rassemblements. Top ! Pour ne rien gâcher, les monuments sont bien mis en valeur avec certains éclairages bien pensés. Bref la vie est belle, euh la ville est belle !!! Désormais direction Pessac dans un cadre plus intimiste, les restaurants et bars ici ou là participent à la fête. Certaines familles sont sorties aussi. Ambiance populaire très plaisante. Ca tombe bien car le circuit est tout de même un poil bosselé et donc avec des relances donc toute motivation est bienvenue.
Par contre le passage du premier relai va être le théâtre d’un petit « couac » concernant mon duo et Cyril qui est en train de nous revenir dessus puisque un signaleur nous somme d’aller dans l’aller-retour dédié aux relayeurs. On s’exécute sauf que nous serons les seuls trois individuels à avoir ce privilège. Je m’en serais bien passé. Désormais, alors que ma montre GPS et les indications kilométriques étaient raccord avant cet épisode, j’ai quasiment 700 mètres d’écart. Et de 45s de retard, nous avons désormais presque 3 minutes. Sacrée addition ! Il faut faire abstraction, pas le choix ! On redouble quelques concurrents qui se sont intercalés. Viennent alors quelques passages sablonneux et épisodes de sentiers au milieu des vignes et châteaux.
Sam craque et c’est Cyril qui est désormais avec moi. Je le connais bien puisqu’ il courrait du coté de Toulouse avant et est désormais installé dans la région bordelaise depuis quelques années. Il est donc à domicile et semble lui aussi ultra motivé. Il encense la foule, la relance … bref il m’impressionne. Je reste calé avec lui, ou plutôt derrière lui car je ne suis pas très confortable au niveau du ventre. Sans rentrer dans les détails, je suis un peu constipé depuis deux jours et donc j’ai comme un poids qui me dérange. Vers le km30, je laisse Cyril partir car je ne suis au top. Il va me falloir presque 5km plus calmes, plus détendus, mais surtout plus lents pour faire partir la gêne. Je ne vois même plus Cyril.
Finalement le retour en ville me permet d’être à nouveau dans un tempo correct. Il faut dire que certains passages esseulé, un peu dans l’ombre avec des groupuscules de spectateurs un peu « électriques » et joyeusement alcoolisés ne m’ont pas rendu la tâche facile. Mais bon, les remarques étaient potaches et la démarche inoffensive, et ils ont surement ressenti le fait que je n’étais pas très loquace, car dans une mauvaise phase.
Bref dans les lumières de la ville tout redevient plus festif, et je me sens mieux. Bon par contre depuis le début je n’ai aucune idée précise de mon classement, on m’annonce généralement 6ème, mais parfois pas loin du 2nd alors que d’autres me disent que je suis 15ème ou bien plus loin. Je me raccroche donc au chrono tout simplement mais depuis un moment j’ai 1,2km en plus. D’ailleurs, entre le 25 et 27 km, les pancartes n’étaient vraiment pas très précises, comme si on les avait déplacées. Parfois trop éloignées, mais vraiment, parfois trop proches, mais vraiment aussi. Mais hormis ce détail kilométrique, tout est bien fait. Et quel plaisir de retrouver cette ambiance « Tour de France ».
Sur les 5 derniers kilomètres, je rattrape une ou 2 personnes et surtout j’aperçois à nouveau Cyril. J’ai envie de faire l’effort mais je sens que je peux le payer au niveau « digestion » … obligé de réguler l’effort, mais il n’empêche qu’à 500m de l’arrivée, le long des quais, un miracle se produit. Non pas que je rattrape Cyril, mais j’attends le speaker dire « Et voici donc le 2nd individuel avec le 3ème sur ces talons ». Hein!. Quoi ? On parle bien de Cyril et moi ? En fait je suis le 3ème solo ? Trop bien ! La foule est ici impressionnante. Une arrivée avec une ambiance de folie. De quoi oublier ses doutes et ses douleurs ! Cerise sur le gâteau je franchis la ligne d’arrivée sous la barre des 2h41, ce qui me semble correct au vu du scénario.
Je finis à 20s de Cyril, mais à 8 minutes du 1er,donc malgré mes péripéties, cela n’a eu aucun effet sur le résultat final, juste sur le chrono puisque ma montre m’indique 43km400 tout de même. Bien entendu mon GPS ne détient pas la « vérité » non plus, donc je relativise, histoire de me dire que « Quand on aime, on ne compte pas ! » Interviews, journalistes et podium dans la foulée. De quoi presque se prendre pour une star. Presque, uniquement ! Cyril et moi sommes conscients de notre niveau, certes correct mais loin d’être stratosphérique mais on profite de ce petit moment de gloire, tout simplement ! On est avant tout heureux et fiers d’être venu à bout de ce marathon et de nos quelques péripéties.
L’ambiance nocturne et la foule ont dynamité l’ambiance, la ville était superbe et l’organisation, globalement parlant, était vraiment bonne. Quelques détails à améliorer certes, mais bon ! Et malgré des sensations pas tout le temps au top, j’ai vraiment apprécié et profité de cette visite insolite de Bordeaux. Je recommande ! Pas forcément pour taper un chrono mais pour vivre un beau moment.
Nicolas Miquel (Crédit photos Bordeaux = RunningMag)
>> Les résultats du marathon de Bordeaux
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