Figure incontournable du trail français depuis une dizaine d’années, Sébastien Chaigneau est passé par toutes les étapes dans sa quête de nature et de rencontres avec le monde.
Très affaibli par une mononucléose qui avait transformé son année 2014 en saison de galères, le savoyard d’adoption poursuit à 43 ans le long chemin d’un retour vers le haut niveau et le plaisir de courir.
Nous avions rencontré « Seb » Chaigneau en mai 2014 à Paris pour un événement avec son partenaire Compressport (voir interview : https://www.u-run.fr/39436-entretien-avec-sebastien-chaigneau). Comme Kilian Jornet, Seb Chaigneau évite de rester trop longtemps dans la capitale. « J’aime trop la nature », souriait alors cet amoureux des montagnes qui a fait des Alpes son jardin quotidien. Toujours bavard, toujours passionné, avec l’humilité et la gentillesse qu’on lui connait. Déjà à l’époque, il nous évoquait ses premières difficultés de la saison, son échec à la Transgrancanaria puis au Mont Fuji, ses problèmes d’hydratation, les étapes de longue fatigue… le début d’une saison blanche à oublier.
Sébastien, peux-tu revenir sur la période difficile qui t’a contraint à arrêter la compétition pendant plusieurs mois ?
Il faut remonter à la Transgrancanaria 2014 pour déceler les prémices de ma méforme. J’étais alors très motivé au départ de cette course, les jambes répondaient, jusqu’à un violent coup d’arrêt à 12 km de l’arrivée. J’étais arrivé dans un stade de déshydratation très avancé. Le corps a dit stop. J’ai pris alors le temps de récupérer, de tirer des enseignements, mais j’avais l’impression d’être en fatigue constante, avec un stade d’entraînement très variable. La sensation de ne plus avoir de jus, comme une coquille vide qui ne parvient pas à se régénérer.
J’ai fait le choix de poursuivre mon programme avec l’Ultra-Trail du Mont Fuji et la Hardrock. Il y avait de bonnes séances et des jours sans, alors j’ai voulu tenter. Les deux courses se sont soldées par des abandons, avec des problèmes d’alimentation, d’hydratation, d’équilibre et de lucidité … Au niveau mental, j’étais rentré dans une spirale négative. Après avoir vu des spécialistes, consulté des médecins du sport, on en a conclu que j’avais la mononucléose, probablement transmise à la crèche de ma fille où des enfants en étaient atteints …
La mononucléose demande souvent une longue période de repos. Comment as-tu vécu ta convalescence et la reprise ?
Avec mes coachs, Christophe Malardé et Pascal Balducci, nous avons décidé de faire 3 mois d’arrêt complet. Il fallait remettre les compteurs à zéro, se reposer. J’ai continué à suivre les courses des copains, j’ai fait des examens pour faire un check complet de mes capacités physiques. Ces derniers temps, j’étais en déplacement 150 jours par an, sans compter les décalages horaires ! C’est une source de fatigue importante qui m’a aussi fragilisé et nous avons choisi de tout mettre de côté. Ça fait du bien aussi de se poser. Début décembre, tous les compteurs étaient ok, le feu vert était donné !
J’ai pu reprendre les bases de l’athlétisme et de la course à pied début 2015, comme un retour à mes premiers amours. J’ai véritablement repris le goût de l’athlétisme pendant cette période et j’y ai pris beaucoup de plaisir. En avril dernier, j’ai repris contact avec la montagne. Malheureusement, pour continuer la série noire, je me suis fracturé les côtes sur une mauvaise chute à l’entraînement et j’ai contracté un pneumothorax : 3 semaines d’arrêt ! Après une nouvelle relance, j’ai programmé les 80 km du Mont-Blanc. L’objectif était de se relancer en douceur, sans brusquer le corps. Malgré une course où j’ai subi, avec des crampes, j’ai fini à la 10e place. Une première étape dans le retour à la compétition.
Il y a ensuite eu l’UTMB. Pour ce 11ème départ, cette course très symbolique pour moi devait concrétiser la retour dans mon jardin : j’ai du faire le parcours une vingtaine de fois déjà ! L’ambition était de faire une course mon rythme et avec mes moyens. Malheureusement, j’ai du mettre le clignotant au 50e km, sans trop d’explications. Peut-être soucieux de trop bien faire … Mais les prochains objectifs vont vite arriver, il faut se remobiliser.
Qu’est ce qui t’a permis de tenir cette force mentale pour te relever à nouveau de ces périodes difficiles ?
J’ai la chance énorme d’avoir des gens formidables qui m’entourent, fidèles au fil des années, qui m’accompagnent dans les bons comme dans les mauvais moments. Ma femme, mon médecin, mon kiné, mon podologue, mon manager … Tous sont présents à mes côtés. C’est la force de ces relations qui me motive. Mes partenaires aussi me font confiance. Durant ma convalescence, j’ai pu davantage m’impliquer dans mon travail avec The North Face et mes partenaires, travailler sur de nouveaux produits, penser de nouveaux concepts … J’ai un job passionnant !
Beaucoup de gens pensaient que j’allais arrêter et mettre un terme à ma carrière sportive. Mais l’appel de la montagne et du voyage prend toujours le dessus. Pour moi, le trail n’est pas une consommation, c’est une manière de vivre au quotidien. Le trail et la montagne font partie de ma vie, et on ne pourra jamais enlever ça. Je veux continuer à courir, j’ai encore plein de choses à découvrir, de lieu à visiter … Aujourd’hui, je me sens plus vivant que jamais.
Photos : © Rémi Blomme / © The North Face
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