Jean Philippe fait partie de ces heureux finishers de la 6000D 2015. Une course qui lui a permis de repousser encore plus ses limites. Il en est fier et il peut !
Merci à lui de nous partager ses émotions du jour à travers son récit.
« Entre la nuit et le jour, départ pour Aime, il est 4h30, une fraicheur matinale et la pluie qui tombe nous réveille doucement. 5H, nous sommes arrivés et prenons place dans le sas, déjà l’ambiance est présente dans les lumières d’Aime. On est à moins d’une heure du départ, des photos, des paroles, des sourires entre chaque trailer avant de se placer sur la ligne.
Ça y est c’est bientôt l’heure du grand départ. Ehh bien non !! l’annonce du speaker au micro laissait un blanc dans le sas, départ décalé de 15′ car la météo au Glacier est trop mauvaise et on ne peux pas pour l’instant acheminer les secours et les ravitaillements. La déception et le doute s’installent, est ce qu’on ira au Glacier ? Ce signe de beauté et de récompense de l’effort. 6h20, retentit le coup de sifflet libératoire même si on ne sait pas si on verra le Glacier de Bellecôte … tant pis c’est parti pour presque 1700 trailers prêts à affronter les montagnes et devenir un « Géant ».
On entend juste des foulées sur l’asphalte avant de prendre les chemins et sentiers qui vont commencer à monter vers les sommets. Après un départ rapide sur la route et chemin, un sentier bien pentu nous emmenait vers Longefoy à 1180m. Un single qui permettait d’être échauffé et en rythme avec les bâtons pour attaquer ensuite les choses sérieuses. Petit à petit chacun prenait son allure, un regard, un mot pour s’encourager et on s’élançait de nouveau vers Montalbert à 1350m. Quelle ambiance pour la traversée du village, tambour, corne de brume, cri et applaudissements relançaient tout le monde en course, tous les trailers en mode course montaient pour sortir du village et traverser les bois de sapin sinueux avec quelques rampes bien raides qui nous emmenaient à presque 1800m au bas de la piste de Bobsleigh.
Un moment magique et une ambiance spéciale où sans se rendre compte on accélérait bâtons à la main pour regagner le haut où nous attendait une foule de spectateurs qui formaient une haie d’honneur en haut, cri, encouragements, c’est en tapant dans les mains des enfants que je sortais, ragaillardit, en 1h50 avant de monter vers AIME 2000. J’étais bien, les jambes tournaient et répondaient, alternant marche et course selon le profil je m’en allais par les sentiers à travers champs et prairies sur des fortes pentes sur Aime 2000.
Le soleil arrivait pour nous réchauffer et quel spectacle et couleur dans la forte montée vers les 2000m de Plagne centre et déjà presque 18km de parcouru sans fatigue. Plagne centre et le premier ravitaillement dans une ambiance de folie, je m’arrête pour manger et recharger les gourdes et c’est parti pour les choses sérieuses. En mode marche à plus de 8km/h j’avalais la pente vers le Leitchoums, le souffle était là, les jambes répondaient sans faillir, quel bonheur et aventure je vivais là.
Déjà 3h d’effort et l’altitude commence à rendre le souffle court, je suis de mieux en mieux dans les montées et j’ai trouvé mon rythme en marche et course pour relancer. Maintenant direction la Roche de Mio à 2700m. Allez courage !!! Quelle beauté de traverser par les single les roches et montagne sous la lumière du soleil. Je vivais un moment inoubliable et une belle aventure humaine et sportive, même si je savais que le dur arrivait, je montais assez vite Mio et arrivais au télésiège Quillis à 2363m en 3h20. Les yeux rivés vers Mio où on entendait les clameurs des spectateurs, ça permettait de relancer et d’y aller en trottinant. Single à travers les roches, herbage avant d’attaquer le gros chemin vers Mio, la foule résonne, dernier virage avant de basculer, l’émotion monte, le frisson me gagne en voyant tout ce monde formant une haie pour nous, on scande mon prénom sans me connaître, on m’encourage, JP, jean phi incroyable tout ce bonheur qui me fait basculer vers le col de la chiaupe à 2492m.
Une descente folle avec des jambes de feu qui me conduisent vers beaucoup d’émotions, mes enfants et ma chérie sont là, le mental remonté, je dévale vers eux. Ça y est j’y suis, bisous, câlins et prendre sa femme et ses enfants dans ses bras me donne de la force pour attaquer le glacier. Une pause et un ravito et hop bâtons à la main l’ascension vers les 3050m sont partis. Pas à pas, petit à petit je gravis le sentier et ensuite les cailloux d’un univers lunaire.
Au milieu de la montée je croise mon copain Benoît qui lui descend, un regard, un sourire, un mot pour rire me rebooste. Une file de trailers devant et derrière montent vers l’extase qui nous attend en haut. Encore quelques centaines de mètres et j’y serai. Les cuisses chauffent, les bras tirent encore quelques foulées et le bonheur tant attendu est là, c’est fait une beauté à couper le souffle, une pause et quelques photos pour apprécier ce moment magique, impossible à exprimer ce que je ressens à ce moment précis. Je quitte le glacier en 5h15 de course et me dirige vers le point culminant avant d’entamer la longue descente rapide et escarpée à certain endroit vers le ravito de la chiaupe au 35iè km où je passe en 6h15.
Les jambes sont dures, le corps commence à souffrir et je sens le besoins de souffler plus longtemps m’alimenter et m’hydrater un peu plus. La descente qui aurait du être facile devient de plus en plus dure pour les cuisses et le dos, mais rien y fait mon mental est là et forgé dans la roche. Je vais dépasser mes limites aujourd’hui rien y fera je continue à marcher vite dans les singles et pierre qui jonche le chemin vers le carroley. Je regarde vers le haut et je vois un serpent de trailers qui marche vers le col de l’Arpette du haut de ses 2337m, allez, un dernier effort, un dernier col à gravir et ensuite ça sera la longue descente vers Belle Plagne, Bellecôte. C’est dur, la respiration se fait courte et le cœur monte mais ça y est c’est fait l’Arpette est montée.
Quelques spectateurs m’encouragent, échangent quelques mots, messages, mots de personnes qui me font du bien, et je descends en gérant l’effort pour bien récupérer. Une descente qui se transforme en galère avec douleurs générales, impossible d’arrêter il va falloir trouver un second souffle, je marche longtemps et décide de recourir sur un plat. Ça a l’air d’aller mieux dans Belle Plagne, je dévale vers le ravito de Bellecôte et m’y attarde pas, 44iè km en 7h44 oufff il en reste 20. Là quelle surprise quand je vois mes enfants et ma femme, ça y est un frisson m’envahit et je repars comme s’y c’était un nouveau départ. Sur des chemins faciles, mon allure est rapide et j’alterne marche et course dans les sapins.
Ça dévale dans les singles et rien ne peu plus m’arrêter, un mental d’acier et la forme revenue les kilomètres défilent dans un paysage et passages dans les villages magnifiques, des gens chaleureux m’encouragent. Montchavin je passe sous la barre des moins de 10 Km après 8h50 d’effort. Il fait chaud, très chaud depuis la descente, c’est dur mais l’envie de franchir l’arche d’arrivée est forte, envie de prendre mes enfants dans mes bras, d’enlacer ma femme, qui est présente dans ma tête. J’attaque un long sentier dans la sapinière, les jambes sont lourdes, très lourdes et même une chute n’y fera rien, j’arrive sur la piste cyclable c’est interminable, l’impression de jamais arriver, enfin la ville arrive, l’émotion est à son maximum, ça y est je vais être FINISHER de la 6000d 2015, après 64km de bonheur et paysages magiques, je suis à quelques virages de la ligne finale.
Et là déboule de nulle part mon titi, quel bonheur de courir avec lui cette fin de trail « papa il me dit on sprint »:D quel farceur !!! le bonheur m’envahit, quand quelques centaines de mètres plus loin, c’est ma fille qui se joint à nous, main dans la main, on court ensemble pour passer cette ligne magique, quel instant de joie, un moment inoubliable je suis FINISHER en 10h00’23’‘ !! Les enfants et ma femme m’enlacent, le temps s’arrête, l’émotion est si forte je ne sais plus ce qu’il se passe, ma fille me donne le maillot signe d’être FINISHER, je me pose et savoure ce moment avec eux.
Un trail de montagne que je n’oublierai jamais avec l’envie d’en découvrir d’autres dans des endroits surement différents et aussi beau. Merci à tous, à mes enfants, ma femme, ma famille et mes amis de m’avoir suivi le long de cette aventure hors norme et à taille humaine. Maintenant sûrement direction les France de TRAIL au Mont DORE. Ne limite pas tes limites mais défis tes limites : c’est fait aujourd’hui, merci à tous. »