Johan YVALUN et Christophe NOCLAIN, team i-Run, ont fait connaissance avec une discipline qui émerge doucement, mais sûrement, le SWIMRUN. Ce samedi 11 juillet, ils étaient au départ de l’ENGADIN SWIMRUN ! Une expérience incroyable, que Christophe nous raconte ici et qu’il ne risque pas d’oublier si vite !
« Au menu du jour de ce samedi 11 juillet 2015 : 2000m de D+ pour 46km de course à pied saupoudré épisodiquement de 6km de natation dans de l’eau à ± 14°C. C’est ça le swimrun, l’ENGADIN SWIMRUN !!!
Épreuve obligatoirement effectuée en binôme le TEAM IRUN.FR (bib #82) composé de Johan YVALUN et Christophe NOCLAIN a de grosses ambitions légitimes sur cette course. Avec 2 gars sous les 2h40 au marathon, des gars aguerris aux longues distances de triathlon et de course à pied, il n’y a aucune gêne à annoncer vouloir aller chercher le podium. Sur les coups de 8h du mat’ c’est donc 136 équipes (180 inscrites) qui s’élancent depuis les hauteurs de Maloja. Très rapidement notre duo prend les commandes. En effet après quelques hectomètres de course c’est une montée raide et étroite qui nous attend, il faut donc être bien placé.
Et c’est chose faite, à une allure soutenue mais loin d’être « débile », dès les premiers sentiers techniques nous sommes en position idéale grâce à ce bon start. Talonné par le duo suédois comprenant le champion du monde de la discipline Bjorn Englund j’imprime un rythme de marche qui me semble confortable et en adéquation avec l’effort à fournir pendant 6 à 7h. Dès que la pente est moins prononcée nous courons en restant vigilant à la pose du pied. Par deux fois, déjà, en moins de 20’, ma cheville est « partie » sur une pierre. VIGILANCE !
J’ouvre donc la route avec une dizaine de mètres d’avance sur mon acolyte Johan. Je fais de mini-pauses régulières pour rester dans les clous du règlement (moins de 10 mètres entre les partenaires) et récupérer aussi un peu par la même occasion et souffler. Car oui, toute matinale qu’elle est, cette heure est déjà bien chaude. Partis de 1850m d’altitude nous sommes montés à 2200m très vite, et avec une combinaison néoprène sur le dos et bien je vous dis que nous sommes tremp’ de chez tremp’ !
Sincèrement je me sens super bien et prends le temps de savourer ces instants euphorisants lorsque, surplombant le 1er lac qu’il faudra traverser, nous entendons le bruit nasillard d’un drone épiant ces drôles d’énergumènes (voir video Highlights @ 1’33). Johan qui a trop chaud m’a prévenu qu’il a ouvert sa combi à l’arrière –il va donc falloir que je lui referme à la 1ère mise à l’eau- pour que l’on optimise au mieux ces transitions qui sont une des clés de la performance en swimrun.
Arrivés en tête au lac de Cavloc et en mettant une vingtaine de secondes à se préparer (fermeture combi ; mise en place bonnet ; lunettes, plaquettes et pull buoy) nous sommes les 3ème à se mettre à l’eau. Pour le duo suédois et allemand nous accompagnant c’est sans un arrêt ou presque qu’ils se jettent à l’eau. Impressionnant !
Voulant absolument garder le contact avec les 2 teams je pars assez fort, confiant et rassuré dans les capacités dans l’eau de Johan après un ultime test la veille tous les 2. Mais Johan ne suit pas ce rythme. C’est là que je percute pour la toute première fois que Johan a peut-être un souci physique. Il m’a prévenu qu’il avait très chaud, qu’il se sentait engoncé dans sa combinaison mais connaissant l’athlète (2h39 à NY cette année dans des conditions difficiles, un 80km de l’eco-trail bouclé en 6h53 / 32ème, un 1er Ironman à Nice en 2014 –pour le fun- en 9h43) et ses capacités je sais qu’il est très fort et qu’il va passer au-delà de ces désagréments.
En sortant de l’eau pour démarrer le second segment course à pied, en descente tout d’abord puis légèrement vallonné ensuite, nous sommes aux trousses de nos amis suédois. Au 1er temps intermédiaire nous sommes pointés à 15 secondes, une paille quoi .. !
Voyant que Johan va mieux et que nous revenons sur les suédois je l’encourage à faire l’effort sur une partie a priori qui nous est favorable : pas trop technique, quelques coup-de-culs pas méchants. C’est aussi une façon de nous motiver, c’est ça qui est génial dans une course en duo : tu n’es pas seul et tu travailles aussi pour l’autre. Là pour le moment Johan n’est pas au mieux mais je sais que plus tard il sera là pour moi à m’aider, à me motiver pour avancer à pied. En plaisantant, vu qu’il est bien meilleur coureur que moi, je l’avais d’ailleurs prévenu qu’il aurait sans doute à me porter sur son dos sur la fin du périple ;))
Un peu plus loin, plus de doute, Yo ne va pas bien du tout ! Malgré le rafraichissement après la traversée du 1er lac il sue beaucoup, je trouve qu’il a les yeux exorbités, il semble ‘ailleurs’ même. Et puis je vois bien que nous n’avançons pas. Clairement je suis en dedans alors que je devrais me faire imposer le rythme de Johan et lui gueuler dessus quand ça va trop vite. Quelques poussées dans le bas du dos pour aider et attendre que cette douleur à la cage thoracique disparaisse. Malgré ça nous ne perdons que 2 ou 3 places au moment de rejoindre la 2ème portion de natation (550m).
L’eau est froide et n’arrange sûrement pas nos affaires : que ce soit au niveau respiratoire pour Johan ou au niveau de la T° corporelle pour moi. Après une 3ème partie pédestre à nouveau technique par endroit, où nous limitons la casse, TOUT BASCULE ! Nous sommes au 3ème temps intermédiaire au moment de partir sur 830m de nage. Johan s’écroule dans 20cm d’eau, criant violemment en se tenant le mollet. Il crampe !
J’avoue avoir été incrédule sur le coup. Ok je l’ai aidé machinalement en lui poussant la pointe de pied mais JE NE COMPRENDS PAS … c’est cela qui occupe mon esprit ! Nous avons couru, quoi ??? 15 km ??? Comment mon Yo qui n’est pas le premier venu peut déjà musculairement être aussi atteint. Oui je suis incrédule, y’a pas d’autre mot ! Les 800m de natation ont été un calvaire pour mon pote : il crampe dans l’eau, ses lunettes prennent la flotte, il perd le pull buoy. Un calvaire j’vous dis ! Mais il a été au bout et en grand champion ne lâche pas l’affaire aussi facilement.
De retour sur terre nous trottinons. Johan se bat, hurle par moment de douleur venant troubler la quiétude de cette vallée magnifique. Il a le masque, c’est clair ! Puis à nouveau TOUT BASCULE -et là définitivement- quand, ne pouvant avoir une foulée normale, Johan bute sur une racine et manque de finir dans le ravin en s’étalant de tout son long sur le sentier étroit ! Là je dis STOP ! La santé de mon ami est bien plus importante qu’une course tout aussi importante soit elle. Car oui Johan c’est un compétiteur, c’est un winner, il sait que nous avons beaucoup sacrifié pour venir jusque-là et que du coup, et encore davantage que s’il était seul dans l’aventure, il ne veut pas abandonner. Je sais pertinemment qu’il est déçu, qu’il s’en veut, qu’il veut continuer pour moi, pour nous … mais quand ce n’est plus possible il faut dire STOP !
Après 5’ de pause, aidés par quelques spectateurs, encouragés par les autres concurrents nous décidons de repartir en marchant jusqu’au prochain ravitaillement (± 2km). Là nous faisons le point. Il ne nous faut pas beaucoup de temps pour écarter l’idée de l’abandon. A priori nous pouvons marcher donc autant continuer ainsi, et puis si par bonheur nous passons le 1er cut-off et bien pourquoi ne pas envisager d’aller au bout. Le mode FINISHER est enclenché ! A ce moment-là je pense aussi beaucoup à ma femme Christine. Suis certain qu’elle s’est inquiétée de ne pas voir arriver ce TIME4 sur le tracker. Et puis maintenant qu’il était là elle s’interrogeait sûrement sur le pourquoi du comment ?? Pourquoi passer de la 2 ;3 ou 5ème place à la 27ème ??? Bien impuissant dans tous les cas j’ose espérer que notre duo désormais aura un rythme régulier, en toute sécurité et qu’elle sera alors partiellement rassurée.
En marchant dans les montées, en trottinant parfois de manière assez intéressante, doucement mais sûrement nous remontons quelques équipes. Finalement le 1er cut-off est passé avec une heure d’avance donc ‘Vita é Bella’ … nous continuons notre balade suisse et ce n’est pas pour nous déplaire 😉 Même si les cuisses deviennent de plus en plus dures nous prenons un sacré panard dans ce cadre absolument somptueux. Rarement j’ai eu l’occasion d’évoluer sportivement dans un cadre aussi beau. Et puis nous relativisons : a priori nous serons finishers alors que Johan, perclus de crampes au bout de 15km, avait très peu de chance de pouvoir nous offrir ce lot de consolation.
Dans la 2ème partie nous devons affronter les 2 plus longues portions de natation : 1400m dans le lac de Silvaplana et, 4km à pied plus loin, les 1250m du lac de Saint Moritz annoncé comme le plus froid. Afin de ne pas trop me refroidir je décide de pousser Johan dans l’eau. Alors que la veille (et le lendemain aussi d’ailleurs) nous nagions allure course au même rythme, là le différentiel est trop important. Et aussi bien pour lui que pour moi il est important de rester le moins longtemps possible dans la flotte. Une poussette tous les 10/15 cdb et nous voilà sortis en 30’ pour 1400m. Avec tout notre attirail c’est pas mal ! Par contre gros coup de moins bien, pour tous les 2, à la sortie de l’eau ! Les quadris sont complétement tétanisés. La soupe est salvatrice pour nous réchauffer.
C’est cela le swimrun, c’est complétement spécifique et la gestion du chaud, du froid, de la course à pied et de la nata mélangée rend la discipline hyper perfectible. Les 1250m à Saint Moritz ne seront effectivement pas un cadeau. Même si après les 4km de course à pied nous avons pu nous réchauffer et récupérer une peu de « jambes » l’eau est un peu plus froide ici et notamment à la fin où la T° ne doit pas excéder 10°C (et dire que lors de l’édition précédente tous les lacs étaient ± à cette T° >> je comprends les + de 50% d’abandon !).
Après une dernière portion course à pied costaud de + de 8km et une petite natation rafraichissante de 400m nous voici sur le dernier tronçon de 3km en direction de Silvaplana. A un petit 11km/h sur du plat nous sommes bien défoncés musculairement tout de même. Mais c’est avant tout à la tête que nous avons mal avec tous ces « Et si …. » immuable dans de telles circonstances. 19ème au scratch en 7h25, à 56’ des vainqueurs suédois (vous savez nos amis du début ??? ;)) qui n’ont pas eu la vie facile avec un duo de triathlète suisse puissant). Résultat qui ne fait pas forcément relativiser, hein ! Qu’est-ce que je n’aurais pas donné pour savoir ce que nous étions capable de faire ce jour là sans pépins physique ?!!?? Nous aurions sans aucun doute beaucoup souffert et, sans aucun autre doute, aimé encore plus ce sentiment de dépassement 😉
Mais voilà c’est ainsi et les motifs de satisfaction finalement assez nombreux. Gestion alimentaire/ hydrique au top. Matériel (mis à part combi trop serrée -à confirmer- pour Johan) vraiment bien adapté avec notamment la paire H2Odrain de Reebok parfaitement adaptée. Niveau à pied (voire même général) performant malgré les soucis musculaire. Le seul hic c’est que maintenant nous sommes mordus et que nous avons une revanche à prendre. C’est trop pour rester sur un tel échec et ne pas retenter l’aventure swimrun ici ou là-bas. A suivre ….
Vous l’aurez compris c’est avant tout de la frustration qui ressort de notre expérience de l’Engadin Swimrun. Beaucoup de motifs de satisfaction mais avant tout, n’oublions pas, que l’objectif podium n’est pas au rendez-vous et nous ne pouvons l’occulter. Merci Johan de t’être battu, comme un grand athlète que tu es, pour nous offrir cette finish-line bien méritée !
>> Retrouvez ici les résultats de l’ENGADIN SWIMRUN.
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