Nicolas MIQUEL, athlète ambassadeur i-Run, est allé découvrir la belle île de Madagascar en participant à l’une des épreuves trail organisée sur ses terres : l’Ultra Trail des O Plateaux. Il nous raconte son périple en détails ici.
« L’Ultra Trail des O Plateaux se déroule sur l’ïle de Madagascar (situé dans l’Océan Indien), principalement entre la Capitale (Antananarivo) et Mantasoa. 3 distances sont proposées : le T-Rail de 33km, le Semi de 65km et donc l’UTOP de 130km. Pour résumer rapidement, l’UTOP est un aller-retour entre le Lycée français d’Antanarivo et le Lac de Mantasao, le Semi correspond au trajet retour depuis Mantasoa de l’UTOP¨et le T-Rail est la moitié de ce retour. Simple, non ?
Immersion dans la capitale
J’arrive dans Antananarivo (aussi appelé Tana) le jeudi soir vers 23h. La nuit, elle, est tombée depuis 18h. L’aéroport est assez petit. Je récupère un VISA (gratuit si l’on reste moins de 30 jours). L’ambiance semble tranquille mais je surveille d’un coin de l’œil tous les moustiques (même si Tana n’est pas dans une région qui craint de ce coté). Direction la capitale (20min de trajet … de nuit … sinon il faut compter bien plus) pour une petite nuit à l’hôtel (Le SakaManga, que je conseille fortement). Je suis resté éveillé dans l’avion puisqu’il y a seulement 1h de décalage horaire avec la France. Bref je ne me fais pas prié pour rejoindre Morphée une fois les bagages rangés.
Tana serait l’endroit idéal pour organiser un trail urbain … resterait le problème de la circulation !!!
Le lendemain, réveil en même temps que le soleil … 6h ! Je file découvrir Tana une heure plus tard pour profiter du calme apparent. C’est un peu raté. Tana une capitale tumultueuse (beaucoup de vie et d’activité), sinueuse (des ruelles et des escaliers disséminés partout dans la capitale) et vallonnée (c’est la ville aux 18 collines, bref ça monte et ça descend souvent). Je me fais un petit tour d’une heure pour découvrir les nombreux marchés. Ce n’est pas ce qu’il manque. Quelle vie ! Retour au calme à l’hôtel, petit déj’ou je me fais un copain. Un perroquet taquin !
Il est temps désormais de se ménager (même si c’est trop tard depuis un moment) car je dois courir 65km demain avec en plus un réveil à 2h45 pour rallier le point de départ à 2h de trajet de l’hôtel. Ce sera mon décalage horaire à moi finalement. Le réveil est difficile et le trajet épique. Impossible de dormir avec l’état des routes mais on arrive à Mantasoa (très connu pour son lac que je ne verrai malheureusement pas) sans encombre et on rejoint le reste des concurrents au pied de l’hôtel. Il y a une majorité de malgaches surmotivés, quelques européens mais aussi des mauriciens et des réunionnais.
Bienvenue dans une autre dimension.
Trois, deux, un, Partez. C’est au pied d’une borne kilométrique des plus atypiques, aux abords de l’hôtel « L’Ermitage » de Mantasoa, que le coup d’envoi est donné. Le départ est rapide. C’est peu de le dire. J’ai dû mal à croire que je m’élance sur une course de 65 bornes. Je me dis que quelque chose m’échappe. Sur les 300 participants qui ont pris le départ de ce Semi (65km et donc 2700m de D+), j’ai l’impression d’être en milieu du peloton. Je veux bien manquer de fraicheur mais quand même.
Mais ce n’est pas la seule chose qui me laisse pantois. L’équipement des concurrents qui m’entourent est, comment dire, souvent fait avec les moyens du bord. Bref ce premier kilomètre m’interpelle. Initialement j’avais prévu de courir à l’économie, mais difficile pour moi de ne pas me laisser un peu emporter par ce flot. Une partie de moi a aussi envie de déceler la supercherie. Je veux savoir ce qui se passe devant. Je veux voir les concurrents un à un s’époumoner par leur départ rapide. Je suis persuadé qu’on bout de 5km tout ce beau monde va mettre le clignotant ou s’évaporer dans la nature. Au bout de 5km, j’ai dû remonter à la 50ème place. Tout juste.
On a avalé ces premières portions roulantes mais cabossées sur un rythme qui me semble un peu élevé. J’ai les jambes grippées mais je pensais que ce serait pire. Certains concurrents commencent à se mettre à marcher dans les premières parties les plus raides. Mélange de passage en bordure de rizières, de pistes forestières bien souvent défoncées et de montagnes russes … ou malgaches. Le terrain est sec et le balisage très bien fait avec un marquage au sol presque tous les 3 mètres ! Royal.
Je poursuis un peu ma remontée mais bien souvent quand je rattrape un concurrent local et que je le double, cela donne lieu à une petite confrontation. Il faut dire que je suis le 1er wasa (prononcé vasa et qui littéralement signifie étranger). C’est un peu déstabilisant, surtout que mon but premier est de trouver mon rythme de croisière. Du coup lorsque cela se passe avec un « gamin » au sac à dos Mickey à moitié éventré, cela vous force le respect. En plus bien souvent ils me tiennent la dragée haute un moment, une dragée pour le coup un peu difficile à avaler. Et je ne parle même de leur pneumatique puisque parfois c’est en pneus slicks ou baskets recyclés qu’ils sont chaussés. Bon les tout premiers sont plutôt bien équipés tout de même.
Après avoir sauté le 1er ravito (au km9) j’arrive au 2ème ravito du km21, en 20ème position. Une remontée qui me semble toute relative. La fougue des premiers kilomètres est un peu retombée et le rythme des concurrents semble moins régulier. Mais il n’est pas étonnant de voir certains coureurs marcher puis quelques minutes plus tard se remettre à courir de plus belle. C’est le plus souvent en montée, qu’ils ont tendance à envoyer la purée comme on dit. Une sorte de fartlek improvisé que j’ai du mal à interpréter, à analyser. Désormais la partie la plus accidentée commence et je continue mon bonhomme de chemin. Il a des montées sacrément raides et des descentes à faire avec le frein à main. La végétation est dense. On se retrouve dans une sorte de bambouseraie. La chaleur est de plus en plus palpable. Il doit bien faire 25 degré alors qu’il est tout juste 8h du matin. Je remonte jusqu’à la 8ème place au moment du point culminant de la journée à 1750m.
Et c’est donc parti pour une belle descente pour rejoindre le prochain ravito. Pour info, il y a à peu près un ravito tous les 10 ou 12km, cela peut paraître beaucoup mais en fait c’est pile poil ce qu’il faut. Et pour ne rien gâcher ils sont très bien fournis et avec aucun problème sanitaire (bouteilles de boisson énergétiques ou de coca, eau plate ou pétillantes, barres de céréales, fruits secs, bananes séchées) … Bref une organisation au top et qui n’a pas fait les choses à moitié. A partir de la mi-parcours le sentier devient plus roulant et on traverse de plus en plus de villages. Cela donne lieu à chaque fois à un grand rassemblement ou une petite fête locale improvisée.
Chaleur, altitude pour un peu plus de difficulté !
On plonge vers les cultures pour les traverser … Mais surtout les parties ombragées se font désormais très rare. J’ai oublié ma casquette et la fatigue générale commence à peser. Le soleil tape et les températures doivent flirter avec les 30 degrés. Et puis il y a l’altitude aussi. On est toujours entre 1300 et 1750m d’altitude. C’est un facteur à ne pas oublier. J’ai souvent les oreilles bouchées d’ailleurs. Bref je pense que je suis entrain de prendre un sacré coup de chaud, voir une insolation. Vers donc le km43, j’opte pour une fin de parcours beaucoup plus calme, en mode reportage photos (bien content d’avoir pris mon compact dans le camel). C’est ça ou je finis sur le bas côté. L’abandon ne m’effleure l’esprit que 3 secondes … surtout que je ne suis finalement pas si pressé que ça de retourner à Tana. Je finis vraiment avec un rythme de rando mais me fait un honneur à rallier l’arrivée et essayer de trotter quand je le peux (malheureusement pas aussi souvent que ce que je voudrais).
Le point positif est que je finis ma distance avec les concurrents du 33km parti un peu plus tard. Je traine un peu plus au ravito. Il y a même des tables pour se faire masser. Je n’en profite pas car je ne suis pas sûr de pouvoir répartir après. Mais tout cela permet quelques échanges ou de récolter quelques encouragements. La population locale est vraiment accueillante. Au pire on me demande des bonbons ou les bouteilles d’eau en plastiques vides. Cela vaut presque de l’or pour eux ! Mais n’on est vraiment jamais harcelés.
Au niveau du parcours il y a toujours de bons raidillons ici ou là pour muscler les cuisses et profiter de superbes panoramas sur ces hauts plateaux et de mieux visualiser tous ces villages éparpillés. Dépaysement garanti. On aperçoit au loin les premiers quartiers excentrés de la capitale.
Enfin l’arrivée !!!
Et je dois avouer que finalement, je suis bien content et soulager de rallier le Lycée français de Tana, lieu d’arrivée de toutes les distances. Il est un peu excentré par rapport à la capitale. Ce qui permet un retour à la « civilisation » progressivement.
Finalement je finis à la 21ème place. J’ai été doublé sur ces 20 longs derniers kilomètres mais pas tant que ça. Mais le classement était depuis un moment loin de mes préoccupations. L’ambiance est bon-enfant. Médailles, ravito, repas, table de massage. De quoi vous requinquer ou trouver du réconfort après ce périple musclé. La première féminine, arrive environ 20 minutes après moi, pieds nus. Un sacré phénomène au gabarit surprenant. Elle a tout juste 19ans, est une championne de lutte dans le pays et a déjà gagné le 130km avec les mêmes pneumatiques. On m’en avait parlé mais cela fait toujours drôle de voir le phénomène en vrai. Autant sur le 130km, seulement 50% des partants sont arrivés à bon port, autant sur les 2 autres distances (65 et 33), le taux d’abandons est très faible.
La course à pied c’est un peu l’école de la survie par ici. La remise des prix se fait le lendemain avec des courses plus courtes ou pour les enfants avec la Fun Run et la Zaza Fun Trail, histoire de finir le weekend sur une véritable note enjouée. Et finalement Tana va me présenter un visage bien plus apaisé en cette journée de dimanche. Journée de messe oblige. Juste quelques embouteillages à la proximité des quelques églises mais une ville calme où il fait bon déambuler. Encore une journée qui se passe dans la bonne humeur et sans encombre. Chapeau l’UTOP, l’organisation et l’ensemble de ses bénévoles.
En conclusion …
L’UTOP et le voyage était vraiment un sacrée expédition ponctuée de belles rencontres et riches d’enseignements. Le dépaysement est garanti. L’ambiance de la course est top et celle des villages traversés agréable. Vraiment. J’ai été surpris (positivement) par la qualité de l’organisation qui n’a rien à envier à certaines courses par chez nous. Toujours en sécurité, toujours bien encadrée, dans une atmosphère générale vraiment conviviale. Une très belle découverte. Le 65km m’a semblé être le bon choix pour découvrir de la meilleure façon la région. Niveau sportif, je pense sans trop me tromper que j’ai eu un manque évident de fraicheur (le voyage, les visites et l’Albératrail juste 6 jours avant), mais j’ai atteint mon objectif principal ici : finir dans le but de faire une belle sortie longue de plus de 50km. Opération réussie ! »
>> Le site de la course : Ultra Trail des Ô Plateaux
Photos : Nicolas Miquel