Faire un marathon de printemps c’est s’assurer d’une bonne préparation physique pour le reste de la saison mais c’est aussi s’infliger des entrainements dans des conditions hivernales par forcément des plus faciles…
Depuis 2011, je n’avais pas fait de marathon sur route, le dernier c’était à Paris, j’avais réalisé mon meilleur chrono en 2h59’12’’, cela me manquait !
Dossard en poche en octobre 2014, mon entraineur Jean-Luc Duhamel du CA Balma me concoctait un plan d’entrainement sur 12 semaines à base de 6 séances par semaines. Une spécificité des plans de Jean-Luc c’est de mettre beaucoup de volume dans la préparation comme s’en souviennent mes jambes à la 10ème semaine avec une belle séance le samedi : Echauffement 30’ + 2 x 10 000m en 40’30 (Circuit 10km Balma) avec 5’ récup trottée…suivi du dimanche et 2h15 sortie longue avec 30min à la fin à 15km/h.
Faire un marathon c’est bien, mais le préparer à deux c’est mieux, mon pote Fred Pelletier m’accompagnait ainsi sur la plupart des séances, par beau temps, comme par mauvais temps… Chaque sortie longue se terminait par le rituel selfie pour marquer la progression de la préparation. Alternance de fractionnés cours, séances seuil, footing récup, sorties longues…sans oublier la séance de natation et de vélo pour garder un pied dans la discipline triathlon, le programme fut chargé mais les sensations bonnes tout au long de la préparation.
La préparation physique est une chose, la préparation psychologique en est une autre. L’un ne va pas sans l’autre et le maillon faible peut mettre à mal vos chances de réussite ! Le jour J est le 12 avril, Paris a fait le plein record de marathoniens avec 54 000 inscris et seulement 41 000 partants ! Un rapide passage le vendredi sur le village expo pour récupérer le dossard et le bracelet ASICS qui donne vos temps de passage tous les 5km. ASICS, un marketing au top !
Grâce à mon temps de 2h59’ en 2011, me voilà avec un dossard préférentiel en main, je suis donc dans le sas du départ entre le sas des 3h et le sas des élites. Cette année le sas élite c’est 25 femmes dont notre championne d’Europe de Cross-Country, Sophie Duarte du CA Balma – Objectif moins de 2h30 pour espérer une qualification aux JO de Rio en 2016. Le samedi, veille de marathon c’est détente, on évite de trop marcher, on se charge en glucides comme depuis 2 jours et on s’hydrate…en rentrant progressivement dans sa bulle pour ne penser qu’au jour J.
Dimanche… Jour J… the D-Day… rituel de jour de course, petit déjeuner copieux à base de gâteau sport, banane, œuf et thé vert. Direction porte Dauphine pour laisser la voiture et retrouver mon pote Fred. Autant dire qu’avec 41 000 coureurs si vous n’êtes pas précis sur le lieu du RDV, c’est même pas la peine ! Résultat : chacun de son côté ! Entrée dans le sas préférentiel à 8h30 après un court échauffement dans les contres allées de l’avenue des champs Elysées, quelle ambiance, des coureurs venus de tous les pays sans oublier les asiatiques qui, eux, n’ont pas loupé leur rdv d’avant course devant la boutique LOUIS.V ! Emotion garantie dans le sas, les élites sont juste devant moi, la presse est au rdv et le palmarès de chaque Elite est évoqué. Les lièvres des kenyans et Ethiopiens sont aussi dans le sas, ils vont faire le « boulot » jusqu’au 30ème pour laisser filer leur « KING » jusqu’à la ligne d’arrivée…
Derrière moi ce sont 40 000 coureurs qui « poussent » et attendent leur tour pour partir. 8h47 – COUP DE REVOLVER d’Anne IDALGO, la Maire de Paris et voilà les Elites qui s’envolent sur l’avenue des champs Elysée à plus de 20km/h. Le temps est idéal, température de 7°. Les préférentiels partent en suivant et me voilà descendant l’avenue des Champs Elysées , soleil de face, un œil sur la montre pour m’assurer de respecter mon allure qui doit être de 4’07’’ / km. La foule est au rdv tout au long du parcours, alternance de groupes de musiques, trompettes et techno, le marathon de paris c’est un évènement pour tous, c’est la fête !
1er Km en 3’50’’, 2nd Km en 3’50’’, je tire le frein à main et me cale juste en dessous de l’allure cible et laisse filer les marathoniens qui sont entre 2h30 et 2h50, CE N’EST PAS mon objectif. Il faut dire que la rue de Rivoli est magnifique, le sol est un billard, les jambes sont légères. Les km s’enchainent, le premier ravito au 5km arrive vite, saisie d’une bouteille à la volée, surprise pas de bouchon sur la bouteille, compliqué de la garder en courant sans en mettre partout, mais hydratation obligatoire, il va faire chaud dans peu de temps. 10ème km en 40’15’’ j’ai 1min d’avance sur le timing, 15ème km dans le bois de Vincennes en 1h01’02’’, suis toujours dans le tempo mais première alerte, LES JAMBES NE REPONDENT PAS comme prévu, la légèreté du début de course n’est plus la même et surtout la tête montre des signes de faiblesse, POURQUOI ?
Le semi est passé en 1h27 comme dans le timing mais malgré une attention particulière à bien gérer l’alimentation tous les 5km (gels + eau + banane), LA TETE BROIE DU NOIR, ne veut pas faire le job et les appels aux images positives ne réussissent pas à inverser la tendance. Même les groupes de musique au fort volume sonore résonnent négativement dans ma tête, vivement qu’ils se taisent, je n’arrive pas à me concentrer et c’est maintenant les jambes qui donnent des signes de ras le bol avec des douleurs aux cuisses. Tous les encouragements des bénévoles et des amis qui me suivent à distance m’aident à renoncer à l’ABANDON.
Tunnel du Louvre, long tunnel interminable ou la pollution des jours précédent s’est accumulée, vacarme insupportable d’une sono et d’un écran géant aux lasers verts qui tournent dans tous les sens…ma tête perd le contrôle de l’objectif…le bout du tunnel est encore loin, il reste 13km, ça va être un enfer mais je dois continuer, j’ai un ami, Christophe, qui m‘attend au 34ème km pour finir avec moi. Encouragements d’Emmanuel de la TEYSSONIERE d’ISOSTAR au 30km (Maison de la Radio), je relance sur quelques centaines de mètres puis reprend LA LONGUE AGONIE des km dont l’allure des 4’07 se transforme en 4’15’’…4’20’’…
Mais l’agonie ne s’acharne pas que sur moi, la tête basse, la foulée désarticulée, le marathon fait son lent et terrible travail destructeur qui en fait, à mon sens, L’EPREUVE LA PLUS DIFFICILE car la plus exigeante. Même un ULTRATRAIL de 100km ou un triathlon est plus abordable parce qu’ils laissent la possibilité de reposer la machine ne serait-ce que quelques instants, soit sur le vélo, soit en marchant dans une montée en TRAIL. Dans un marathon, si tu veux atteindre un objectif ambitieux, il faut être constant dans tes allures et ne pas faiblir ! Rolland Garros, lui volait, moi je courais comme UN CANARD BOITEUX. C’est au ravito de Rolland Garros, 34ème km, que Christophe m’attendais avec son Père pour m’emmener jusqu’à la ligne d’arrivée.
L’objectif de terminer en 2h54 envolé, le dernier espoir était de finir en moins de 3h. Pour cela, il fallait tout donner sur les 8 derniers km, et tout donner quand on n’a plus rien dans la tête ni dans les jambes c’est MISSION IMPOSSIBLE ou presque ! Christophe est pourtant là, il me fait mes ravitos en banane et eau, me lance des messages positifs, m’encourage quand mon allure repars et me stimule pour aller accrocher le coureurs qui est 5m devant moi ! Je lève la tête, visualise l’individu, il est aussi épuisé que moi, mais mon mental me donne son dernier souffle, je ne pense qu’à la ligne d’arrivée comme ULTIME LIBERATION, nous sommes dans le bois de Boulogne, longue ligne droite ou les km sont interminables, 38ème, 39ème, 40ème, … , le chrono défile, la barre des 3h se rapproche comme un couperet, me voilà au rond-point en bas de l’Avenue Foch, la foule est massive, ça hurle dans tous les sens, les pavés raisonnent sous mes chaussures, je vois l’arche d’arrivée mais je sais depuis quelques instants que je ne serais pas sous les 3h… !!!
Tant pis, dernière grimace au moment de franchir l’arrivée, je vois les bras des marathoniens qui se lèvent en guise de satisfaction, eux ont réussis leur course, moi c’est la fin d’une longue descente aux enfers et la libération !!! 3h01’12’’… classement 1223 sur 40 175. Je remonte en titubant la longue avenue Foch pour retrouver ma femme qui est venue m’encourager, je ne la trouve pas, fais chemin en sens inverse, hagard au milieu des coureurs et des familles.
Ce marathon s’achève sur le stand ISOSTAR, au milieu de mes amis et entre les mains expertes d’ostéopathes en guise de réconfort et pour le plus grand plaisir de mes jambes douloureuses… C’est maintenant l’heure de la récupération et l’heure de l’analyse sur les raisons du POURQUOI. Surentrainement, fatigue psychologique ou les deux, j’ai mon idée sur la question mais ce qui est certain c’est que ce relatif échec personnel n’a pas entamé ma motivation à repartir et à me projeter dans le prochain objectif. C’EST CA LA MAGIE DU SPORT !
Merci à Fred pour les entrainements partagés, à Jean-Luc pour son plan d’entrainement sur mesure, à Christophe pour m’avoir accompagné pendant mon long chemin de croix et … tous mes amis et famille qui me font vibrer avant, pendant et après la course même quand ça ne se passe pas comme prévu ! Et bravo à Laurent pour son meilleur chrono en 3h10 !
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