Le festival des Templiers fêtaient ses 20 bougies ces 24, 25 et 26 octobre derniers. Un RDV que de nombreux coureurs cochent dans leur agenda d’une année sur l’autre et ne ratent pour rien au monde. Il est vrai qu’avec ses 12 courses au programme, l’évènement attire des profils de plus en plus larges de coureurs, allant du routard souhaitant s’initier au trail, aux gourmands des longues distances, en passant par l’élite de la discipline. La variété des distances proposées permet à chacun de s’exprimer dans sa spécialité.
Pour ma part, j’avais déjà eu l’occasion de m’essayer sur la VO2 (21km) et le marathon des Causses (37km). L’envie de m’aligner sur la Grande Course des Templiers me chatouillait bien l’esprit, mais était ce bien raisonnable de tenter l’enchaînement risqué (101km à la CCC-62 km au championnat de France- 72km aux Templiers- 75km à la Saintélyon) ? Je redoute toujours la course de trop …. Mais en même temps, venir sur le Festival des Templiers, ne pas être blessé, et ne pas courir, c’est très frustrant aussi ! Après avoir réfléchi à toutes les configurations possible, pris des conseils auprès du team Asics et de mon entourage, j’opte finalement pour une formule plus axée vers le plaisir que la performance, avec l’Intégrale des Causses. Un parcours très sauvage, plus intimiste aussi avec un nombre limité de dossards attribués (450 inscrits), mais qui fait quand même 62km et 2900mD+. La course étant le vendredi, cela me permettra en plus d’être disponible pour supporter mon homme dimanche et profiter de l’évènement et de la famille samedi, parfait !
Le départ de l’Intégrale des Causses est donné vendredi matin à 7h, 3h après celui de l’Endurance Trail qui est donné à 4h le même jour. Nous sommes 5 coureurs du team ASICS à s’être retrouvés à l’hébergement le jeudi soir : Thomas Lorblanchet, Thomas Saint Girons et Benoît Girondel qui s’alignent sur l’Endurance Trail (100km), Franck Bussière et moi même sur l’Intégrale des Causses. Dès 2h du matin, c’est donc l’agitation à la base de vie ! 🙂 Pour ma part, je sors du lit à 4h, pas vraiment reposée mais super pressée à l’idée de m’élancer sur les Causses ! Manu sera sur le côté pour me faire l’assistance sur quelques ravitaillements autorisés, le grand luxe ! Il fait nuit noire lorsque nous arrivons sur le lieu de départ à Mostuéjouls, la frontale m’accompagnera donc jusqu’au premier ravitaillement, Saint André de Vézines. Malgré les températures plutôt fraîches, je décide de partir légère (le soleil devrait vite nous réchauffer !). Tee shirt, manchettes (que je pourrais facilement retirer plus tard), jupe-short, manchons Sigvaris sur les mollets (perso, j’en trouve vraiment l’utilité et puis ça tient chaud aussi dans ces moments là ! ;-)).
Je retrouve les filles, Florence, Cécile, Harry le speaker, en forme de bon matin, et nous voilà en ligne sur le départ. La célèbre musique annonçant le compte à rebours démarre et 10 secondes après, nous voilà élancés dans la nuit ! Les premières foulées sont légères, c’est bon signe. Je suis le groupe de gars devant, je ne vois pas de féminines pour le moment, mais j’imagine que Florence ou Cécile me talonnent. Quelques minutes passent, et j’aperçois les gars s’arrêter net et faire demi-tour : »on s’est trompés, y’a plus de balisage ! » Allez, ça commence bien ! Bon je relativise, il faut mieux que ça nous arrive maintenant qu’au 40ème km. On reprend chemin inverse, tout en scrutant le sentier pour trouver la rubalise. Elle était en fait juste après le départ, il fallait tourner direct à gauche vers un petit sentier en single qui emmène vers une première petite ascension.
Du coup, on se retrouve tout derrière et dans le bouchon … Ça a le don de m’énerver (enfin je ne suis pas le seule agacée a priori), et je me faufile comme je peux pour doubler dans cette montée. « Pardon, pardon« , je cours alors que ça grimpe bien (j’en profite pour remercier quelques coureurs qui se sont décalés pour laisser passer), je sens que le cardio s’emballe dès le départ, je crains de le payer par la suite, mais bon, on a pris pas mal de retard avec ces bêtises …Une fois au sommet, une petite descente nous permet de dérouler et j’allonge la foulée afin de poursuivre cette remontée. 3’55 au kilo, il faut que je me calme sinon je n’irais pas jusqu’au 62ème à ce train là ! Ça rigole et ça taquine dans le peloton qui se rend rapidement compte du malentendu et j’entends une féminine que je double à ce moment là : « ah, les élites semblent essayer de retrouver leur place ! » Bref, en arrivant au premier ravitaillement au Rozier, nous sommes complètement perdus sur le classement. Je demande aux bénévoles « y’a du monde devant ? » Ils me répondent : »non pas beaucoup et aucune fille« . Bon, au moins, je sais que je suis repassée en tête, mais maintenant, il faut être vigilant sur le balisage, plus jamais ça !
Après avoir fait le plein d’eau au Rozier (km 6, donc un tout petit plein !), nous repartons pour une nouvelle ascension, environ 400m de dénivelé positif en 4km environ. Ça grimpe oui, mais ça se court partout. J’avance à petites foulées, les sensations sont bonnes et je suis rassurée de constater que je ne paye pas trop mon coup de speed du départ. Nous quittons les sentiers propres au sol pour retrouver des terrains plus instables. Cailloux, racines, il faut lever les pieds pour éviter les chutes (trop vite arrivées !). La vigilance devient alors ici mon souci principal ! D’ailleurs, une fois au sommet, nous plongeons vers une belle descente un peu technique et tout en corniche (c’est beau !!), et je me fais recoller par 5 ou 6 gars, à la file indienne derrière moi. Je laisse passer ceux qui le souhaitent en précisant que je ne suis pas très guerrière dans ce genre de situation. Bon je réussis à prendre un gadin, mais sans gravité. km15 en bas, 1h45 de course, le jour s’est levé !
Nous devons rejoindre le parcours de l’Endurance Trail à hauteur de Saint Jean de Balmes. Je pense aux gars, Tomtom, Taz et Bengi qui sont en course et je me demande à quel endroit ils vont me doubler (en fait, ils ne me doubleront jamais, contrairement à ce qu’ils pensaient ! :-)). Après un petit kilomètre en fond de vallée au bord de la Dourbie, nous entamons la prochaine difficulté : une bosse de 4km et 500m de dénivelé positif. Allez, on la court aussi celle ci ! Le sentier zigzag, j’entends quelqu’un revenir sur moi avec des bâtons. Pas discret ces trucs là ! Je fais ensuite un bout de route avec un groupe de 2 ou 3 coureurs dont Maxime, qui m’explique qu’il court pour une association. Changement de décor ici avec des belles pistes forestières sur lesquelles il est vraiment agréable de courir ! Je me régale et je ne vois pas le temps passer jusqu’au second ravitaillement, à Saint André de Vézines au km 24. Manu est bien là, il prend des nouvelles, me tend un bidon, une barre, un gel. Personne ne sait me donner les écarts, tant pis, je vais tenter de ne pas relâcher, ça peut remonter derrière. « Je te retrouve dans 10km à la Roques ! »
Tout va bien pour le moment, je tiens un bon rythme et ne ressens aucun signe de fatigue. Je décide de sortir mon MP3 pour la suite de la course, je connais la suite du parcours, nous l’avions fait en reconnaissance. Et puis, comme les écarts se creusent entre les coureurs, on est souvent contraint à courir seul. La musique me tiendra compagnie ! 😉 La suite est rythmée par un enchaînement de montées /descentes bien nerveuses et des traversées de paysages incroyables comme Roquesaltes, ou encore les falaises de Rajol. Bon j’évite de trop lever la tête, ça serait dommage de devoir stopper la course ici. Certains passages nécessitent triple vigilance ! Nous rejoignons Le village de la Roque Saint Marguerite et ses belles ruelles, c’est le 3ème ravitaillement. 4h20 de course environ, presque 37km à ma Suunto. Francky est avec Manu, je comprends donc qu’il a abandonné. Mince ! Arrêt express pour recharger.
On traverse le pont et nous voilà repartis dans un monotrace bien pentu. J’appuie, mains sur les cuisses ! Elle est assez costaud celle ci : 2km mais 400mD+. On attaque ici la remontée sur le Larzac en passant par Pierrefiche. Monotraces en dévers et en surplomb, passages aériens au dessus des corniches, c’est chouette mais j’évolue seule et je commence à trouver le temps long … J’essaye de ne pas flancher, je suis toujours en tête, mais je ne connais toujours pas les écarts derrière. Je vide assez rapidement mon bidon et concentrée sur ma course et mes appuis, j’oublie de manger ma barre. Un bon coup de mou me prend juste avant d’arriver au hameau de Massebiau où m’encouragent Ben, Manu, Francky et Jack Peyrard avec sa caméra (merci les gars !). 53ème km, 6h15 de course.
Il commence à faire chaud, il est plus de 13h. Je profite de la fontaine pour remplir mon bidon vide, je vais en avoir besoin pour affronter la prochaine difficulté ! 500m de dénivelé positif en 4km. Et la forme que j’ai eu la chance de connaître depuis le début de la journée commence à s’essouffler … La fatigue me tombe dessus, j’aurais du prévoir un gel supplémentaire, j’ai l’impression que je suis en train de partir en hypo ! Je grignote la barre qu’il me reste, mais je suis clairement dans le dur. Allez, courage, c’est la dernière grosse difficulté. Il faut serrer les dents ! J’avance doucement (trop !), pas à pas, les spectateurs dans la montée sont au top, merci ! Ils m’annoncent 11ème au scratch. « Allez, le 10ème est juste devant ! » Oui mais le 12ème est juste derrière aussi et je l’entends revenir dans la montée avec ses bâtons. Bon, il finit par me doubler, il est facile en plus l’insolent ! 🙂 Qu’elle me semble interminable cette ascension !! Horrible ! J’ai l’impression de ne pas avancer … mais avec un peu de persévérance, j’en termine enfin avec cette côte et rejoins le prochain ravitaillement suivant, le 4ème et le dernier, à la ferme du Cade.
Pour le coup, je fais (à fond) le plein de carburant ici : 2 verres de coca cul sec, un gel, une barre, Il ne reste que 6km en profil descendant, mais j’ai besoin de retrouver un peu d’énergie après cet épisode douloureux. Manu et Ben sont au top pour me motiver ! « Allez, tu déroules, c’est presque fini, ça descend, tu gères, la seconde est à plus de 20 minutes derrière ! » Ok, je vais le prendre cool alors, c’est pas le moment de prendre des risques. Je repars à petites foulées et la machine était relancée ! Un faux plat montant nous emmène sur le plateau de la Pouncho d’Agast, puis on plonge vers la descente du Hibou. « Arrivée à Millau dans 3km ! » Prudence et gestion ici, avec une petite remontée surprise (je l’avais oublié celle ci !) vers la grotte du Hibou (on la traverse à l’aveugle, il fait noir complet là dedans !). Je croise Maud Gobert qui fait une balade avec sa fille. Elle me lance en me tendant sa joue pour me faire la bise : »t’es là toi ? » Et oui, j’ai un dossard ! Allez un bisou vite fait et je ne m’attarde pas.
Je recolle alors un gars qui m’avoue avoir pris un bon gros coup de massue dans la montée de Massebiau. Il est vraiment pâle, heureusement que ça se termine pour lui. On poursuit la descente ensemble en se prenant quelques « bébés-chutes » marrantes. On râle en synchro sur les « bébés-remontées », quand je glisse, il glisse, bref, un bon moment de galère partagé ! 🙂 Et puis enfin, l’horizon se dégage, et je reconnais les derniers sentiers qui mènent à l’arrivée. Monsieur se prend une belle gamelle derrière moi, je m’assure que tout va bien et je passe la seconde : « j’essaye d’allonger un peu sur la fin, a tout ! »
J’entends Chauchau et Harry annoncer mon arrivée imminente au micro, quelques spectateurs nous encouragent, et j’entre dans le dernier virage à effectuer. « Voilà la première féminine ! » La célèbre musique ERA retentit pour m’accueillir, les 5/6 marches me hissent vers la dernière ligne droite, le belle arche d’arrivée s’offre à moi, nous y voilà ! Le sourire m’accompagne pour la franchir, je lève les bras sur ordre de Dominique qui me lance : »Allez Sissi, lève les bras ! » 7h40 au chrono, 62km et 2900m de dénivelé positif, première féminine et 11ème au scratch : je suis comblée ! 🙂
Sylvaine CUSSOT
Les résultats de l’intégrale des causses 2014 : résultats Intégrale des Causses 2014