La France s’apprête à connaître un abaissement des températures : on va enfin rentrer dans le vrai hiver. Mais quelles sont les incidences de la course à pied par temps froid ?
Et bien le froid conditionne fortement le rendement du coureur à pied. Tout d’abord, lorsqu’il fait froid, nos muscles perdent de leur souplesse (ne dit-on pas d’ailleurs que nous ne sommes pas encore « chauds » lorsque notre organisme et nos muscles ne sont pas encore prêts à réaliser un effort) et de leur force : de nombreuses études ont montré à ce propos que la vitesse et l’intensité de contraction musculaire diminuaient par temps froid. Quant aux articulations, ligaments et tendons, ils viennent à manquer respectivement de mobilité et d’élasticité.
Au niveau cardio-vasculaire, la chute des températures porte à une hausse des performances. En effet, le cœur préfère travailler lorsque la température extérieure est sous les 10°. La fréquence cardiaque a tendance à baisser en moyenne de 5 battements par minute tandis que le débit cardiaque (volume de sang éjecté à chaque battement) a lui tendance à augmenter. Les études montrent d’ailleurs que la température idéale pour performer sur une course d’endurance comme le marathon est de 5°C. Cependant, lorsque le froid devient plus intense et les températures négatives, le débit cardiaque chute lui aussi entraînant une diminution de la VO2 Max (consommation maximale d’oxygène) et donc des performances. Selon l’étude de Carlsen KH., Berntsen S. et Stensrud T. (Exercise capacity and exercise-induced bronchoconstriction (EIB) in a cold environment. Respir Med. 2007 Jul;101(7):1529-36.), la capacité maximale à utiliser l’oxygène est réduite de 6% par -18°C.
La respiration et la ventilation peuvent être aussi amenées à subir quelques adaptations. La fréquence respiratoire (nombre d’inspiration et d’expiration) a tendance à légèrement baisser diminuant ainsi la quantité d’oxygène disponible pour les muscles, oxygène qui est déjà rarifié par la montée en altitude. Mais cette tendance n’est pas significative au point d’altérer grandement la performance.
En revanche, lors d’une étude américaine (The acute effect of cold air exercise in determination of exercise-induced bronchospasm in apparently healthy athletes. Carey DG, Aase KA, Pliego GJ. J Strength Cond Res. 2010;24(8):2172-8.), comme lors de l’étude norvégienne citée plus haut, 50% des coureurs présentent une respiration sifflante (bronchospasme) à l’effort par des températures négatives. D’où la précaution pour les asthmatiques et cardiaques d’éviter la course à pied ou toute autre activité intense lorsque la température chute sous -5°C. Le bronchospasme par temps froid provient de deux facteurs. Le premier facteur réside dans le fait que l’air inspiré est tellement froid qu’il n’a pas le temps de se réchauffer complétement lorsqu’il est inhalé. Il gardera toujours une température inférieure de 2 à 3% à la température corporelle. Le deuxième facteur qui peut expliquer des irritations au niveau de la gorge, une sensation de brûlure au niveau de la trachée et des poumons jusqu’à très souvent avoir le goût du sang dans la bouche est l’évaporation d’eau que nous rejetons à l’expiration et qui se dépose sur les muqueuses. Pour limiter ce phénomène, il est alors conseillé d’inspirer par le nez (l’air aura plus de chance de se réchauffer) et d’expirer par la bouche.
Le froid a aussi pour conséquence d’obliger l’organisme à une adaptation thermique par le biais de la thermorégulation. Afin que la température corporelle ne subisse pas de changements trop importants, notre corps va réduire le diamètre de ses veines et ses artères périphériques. Cette vasoconstriction va diminuer l’apport de sang et de chaleur vers les muscles superficiels et la surface cutanée pour les maintenir à l’intérieur du corps. Par temps froid, il faut alors apporter une attention particulière à l’échauffement. Plus la température extérieure sera froide, plus celui-ci devra être progressif et long, surtout si vous devez réaliser une séance intense. Vous diminuerez ainsi les risques de troubles respiratoires et de traumatismes musculaire ou articulaire. Idéalement, votre temps d’échauffement sera augmenté de 25 à 30%. Pensez à pratiquer quelques éducatifs de type montées de genoux, talons-fesses, pas chassés pour finaliser celui-ci. Concernant le contenu des séances, il est préférable de réduire les allures et intensités et d’éviter les fractionnés courts de type 30/30 ou VMA (par exemple 10 x 300 m à 95-100% de FCM). Il faut privilégier les séries longues (2000 et 3000 m) et/ou les allures intermédiaires proches du seuil (semi et marathon).
En conclusion
Pour résumer, si le froid peut être l’allié du coureur, le grand froid a lui une influence négative sur nos performances. Mais la course à pied n’est pas pour autant à proscrire sauf si vous souffrez d’asthme, de pathologies cardio-vasculaires, ou si vous sortez d’une longue période d’activité. Des études menées aux Etats-Unis ont même démontré (Université de Duke) que la pratique d’un sport d’endurance à raison de 4 séances par semaine aide à combattre la dépression hivernale par le biais de la synthèse de sérotonine. Pensez juste à prolonger l’échauffement, à gérer vos intensités et à bien vous équiper ! En effet, si notre vitesse de course baisse (comptez 10 secondes au kilomètre pour une allure d’endurance), c’est aussi un peu à cause de notre équipement et notamment de nos chaussures. Le froid agit particulièrement sur la semelle intermédiaire, la rendant plus rigide et donc moins amortissante et moins élastique. Ainsi, si le chronomètre tourne au ralenti, c’est aussi une question de matériel. Ce sera d’ailleurs la thématique de notre prochain article sur la course à pied par temps froid !