« Après avoir été déposée par Franck et les enfants devant le sas d’entrée, je me retrouve seule pendant 45 minutes avant le départ. Pas d’échauffement structuré avec lignes droites d’accélération. Aujourd’hui, je vais devoir m’adapter même si ce rituel d’avant mise en grille me rassure. Là c’est différent, contrôle du sac et attente dans la raquette.
Je m’assois, quelques mots pour les médias. Je trottine entre les participants et je m’avance vers la ligne de départ. Il y a énormément de monde. Comme à la Transvulcania, Emelie et Kilian arrivent au dernier moment, ils viennent se positionner à côté de moi. Le nombre de journalistes est multiplié par 3. C’est le coup de pistolet !
Je suis lancée sur cette route de front de mer, c’est du bitume pendant 3 km, et la foule est ÉNORME, elle nous porte, nous crie dessus et nous touche à notre passage. On quitte la route de la plage et direction le Textor, altitude 2165 m. Je suis lancée pour ma course. Ça court bien. On traverse les champs de canne à sucre, la terre lourde colle aux chaussures. Petite mauvaise nouvelle : il fait très humide, un brouillard nous humidifie le corps. J’avais noté les temps forts du parcours sur mon bras, mais l’encre a été lavée…, il va falloir que je fasse travailler ma mémoire (c’est pas gagné).
J’ai l’impression d’être connue par tous les concurrents. Une voix derrière moi me lance « Salut Nat’ » , c’est une voie familière : Quentin Stéphan du Team Trail Lafuma. On est parti pour un bout de chemin ensemble sur ce terrain qui monte bien mais où on peut aller à bonne allure. Je cours de nouveau seule. Au détour d’un virage en arrivant sur la route, je tourne à droite et là j’entends « Nathalie » ce sont des poursuivants qui me rappellent car je suis en train de me tromper de chemin. Je vais courir avec ce petit groupe jusqu’à Mare à boue. Là, je suis avec mes partenaires du Team Trail : Antoine Guillon, Renaud Rouanet. Je fais aussi la connaissance de Mico Klain. Cette partie de course faite en groupe m’apaise. Je m’inspire de leur gestion de course, s’économiser pour durer longtemps… La montée vers le Textor est superbe, nous progressons sous un claire de lune qui illumine toute l’île, je vois le Piton des neiges au dessus d’une mer de nuage, c’est splendide.
La montée vers Kévegen est très technique, les sentiers sarthois sont loin, il faut anticiper chaque pas. Le soleil se lève sur les pitons, ils s’éclairent de magnifiques couleurs. Quelques coureurs plus expérimentés me dépassent, voire même me déposent. La descente qui suit est plus que très technique les difficultés qui s’enchaînent sont compliquées. Heureusement des mains courantes sont là pour nous stabiliser et nous éviter de basculer dans le vide. Je suis seule dans la forêt.
Arrivée à Cilaos, mon comité d’accueil m’attend, ravitaillement super bien préparé : changement de tee shirt (il ne faut pas être pudique), de chaussettes, de chaussures, je mange du riz, Franck me met de la crème solaire, les enfants me donnent mes barres, le tout en répondant aux journalistes, heureusement qu’on m’avait prévenu que c’était chaud . Je repars avec la casquette saharienne et les lunettes de soleil : je passe de 0°, il y a quelques heures à bientôt + 30°, ça va cogner !! Je cours sur une partie que j’ai reconnu la semaine dernière, c’est rassurant. Je visualise ce qui m’attend jusqu’au sommet du Taïbit, après c’est l’inconnu pour Mafate. Je profite des rivières pour mouiller mon tour de cou et ma casquette ça me fait baisser la température. Me voilà au sommet, 11 heures de course effectuées. Mafate m’ouvre les bras, à moi l’Aventure …
Je sais qu’Emelie est sur mes talons mais ça ne me préoccupe pas plus que ça. La course ne fait que commencer, je suis déjà contente d’avoir animé la première partie de course. Il fait chaud, la descente vers Marla est torride… Dans la montée de la plaine des Tamarins le soleil se cache, ça fait du bien, il fait meilleur pour courir. Une douleur au niveau du releveur du pied droit commence à pointer. Je ne m’inquiète pas trop, je sais que je suis attendue par Thibaut et Urko (kinés), des amis de Pascal Blanc, à mon prochain ravitaillement au Col des Boeuf. Je m’y arrête 10 minutes pour un massage très efficace sur une contracture qui commence à s’installer. Mais voilà, Emelie arrive. Nous repartons ensemble et elle me distance dans la descente suivante. Puis, je reviens sur elle dans une montée. Nous faisons un bout de parcours ensemble. Nous discutons un peu dans un anglais très approximatif for me. On se remémore la Transvulcania où nous avions couru ensemble.
La montée pour Roche Plate est terrible. Le ravitaillement n’arrive pas. Nous progressons lentement. Au milieu de l’ascension, ça fait quand même plus de 17 heures qu’on est parties et elle me confie avoir sommeil, nous blaguons un peu. Après le ravito fait par Anne Marie du magasin Running conseil de Saint Pierre, je retrouve un rythme plus régulier. J’entends toujours marcher derrière moi, je pense que c’est Emelie. J’entends parler c’est une voie masculine ??!!!, c’est Renaud Rouanet qui est revenu et Emelie disparue… nous progressons ensemble sur le même rythme. Je sais qu’au Maïdo 2/3 de la course sera fait et qu’une nouvelle étape s’engagera. Dans ces moments un peu durs et de solitude, je pense à tous les messages de soutien que j’ai lus avant de partir, je pense à toutes ces personnes de la métropole (et surtout les sarthois) qui doivent surveiller ma progression sur le suivi de course internet.
Arrivée au Ravito du Maïdo -Tête dure, j’enfile ma Goretex SpeedTrail Lafuma et je positionne ma frontale, je vais bientôt en avoir besoin le soleil va bientôt se coucher. La descente sur Sans Souci se fait bien. Je sais que mon mari et mes loupiots seront là. Changement de chaussettes, de chaussures, de brassière, de tee shirt (attention les yeux). Le tout devant les journalistes. Je mange un peu de pâtes. Tout est ok pour la suite de l’aventure. Tous les villages traversés jusqu’à 20 km de l’arrivée seront des moments forts avec une foule très dense et des personnes qui nous escortent jusqu’au ravitaillements et qui nous accompagnent en repartant. On me sollicite pour des autographes à la volée. Je n’ai jamais connu ces choses là ailleurs. A partir de Ratineau, Renaud et moi ralentissons. J’ai trop peur de la blessure et de m’égarer car la vigilance est en baisse. Nous discutons de choses et d’autres et le temps passe assez vite malgré tout. Nous sommes accompagnés par une grosse frontale qui illumine notre progression, le claire de lune est toujours là.
Au pied du Colorado nous visualisons la station météo (notre dernière ascension). On continue jusqu’au point de ravitaillement, quelques gâteaux salés, de la banane. Maintenant, c’est l’arrivée qui nous tend les bras, après environ 1 heure de descente cette belle aventure arrivera à son terme. Renaud me stimule « allez on se bouge un peu dans la descente, ça serait quand même bien si on faisait moins de 29 heures !! ». Aller GO, c’est reparti, le style est un peu « lourdeau »mais le jambes arrivent encore à faire le boulot. Arrivée sur la route, et le stade nous attend à quelques centaines de mètres. Nous passons la ligne d’arrivée main dans la main, un petit comité est là pour nous accueillir.
Interview et bla bla…bla bla bla… car lorsque j’arrive d’une course je suis intarissable !! Faire la Diagonale des Fous, comme pour tout traileur était un rêve… mais passer la ligne d’arrivée en tête est de l’ordre de l’imaginaire… Alors j’peux vous dire que c’est SUPER de vivre un rêve toute éveillée !!… Pour cette nouvelle aventure je remercie mes partenaires : Lafuma, pour m’avoir permis de courir avec la nouvelle gamme 2014 beaucoup mieux adaptée à la diversité du terrain qu’offre la Réunion et à mon gabarit (fiabilité et légèreté), et m’avoir adapté dans les derniers détails mon sac spead trail 5. Overstim’s, pour tous les produits énergétiques que j’utilise sur chaque course, Garmin, Thuasne et Petzl pour leur matériel. »
Nathalie Mauclair
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