Frappadingue, Got Balls, Strong Man Run … des noms qui vous sont peut-être familiers. Ces épreuves atypiques d’origine anglo-saxone, au bon goût de boue et de parcours du combattant, fleurissent en France avec succès. C’est maintenant ASO qui s’est approprié le concept avec The Mud Day le 21 et 22 septembre dernier. Je me suis essayé à cette course un peu particulière.
13 Km d’obstacles et un public jeune
L’organisateur du Marathon de Paris et du Tour de France étend un peu plus son éventail d’événements grands publics. Avec 13 000 inscrits pour sa première édition, bien au-delà des espérances des organisateurs, le rendez-vous a très vite affiché complet. Sur un camp militaire perdu au milieu de la campagne yvelinoise, 22 obstacles attendaient les amateurs en manque de service militaire. Mais ici, pas de domination des vétérans. Le public est résolument jeune. Des équipes lancées dans un défi collectif, pas forcément sportifs ni coureurs, en quête de détente et d’anti-stress, pour échapper au quotidien en se roulant dans la boue. Pas de chrono, pas de compétition, ici c’est le plaisir qui domine, un brin de folie en plus.
Un délire entre amis avant tout
Dans la grisaille matinale, un village éphémère s’éveille sur fond de musique électronique. L’échauffement pour la première vague a sonné, mené par un animateur dont la voix est déjà éteinte par de sauvages hurlements. Il veut faire de ses « Mud Guys » des guerriers de boue, des fauves prêts à être lâchés pour un cocktail détonnant de bouillasse et d’effort physique. A l’heure de s’élancer dans un nuage de fumée digne d’un débarquement allié, certains parachèvent leur déguisement insolite. D’autres, affutés comme une lame de combat, manchons de compression et gels à la ceinture, semblent s’être égarés.
D’autres encore portent fièrement les couleurs d’une association. Avec notre fine équipe de « Coureurs du Cœur« , soutiens de l’association Mécénat Chirurgie Cardiaque, nous nous sommes lancés à l’assaut de ces 13 Km de parcours musclé. Malgré 22 obstacles pas si insurmontables disséminés tout au long de l’épreuve, on court souvent. Mon regard d’athlète y voit même un terrain de jeu idéal pour l’organisation d’un cross-country ou d’une course nature typé trail. Un parcours très vallonné dont l’adhérence s’est vite transformée en patinoire boueuse, malmenant nos vieilles runnings.
Excepté les instants où la force des biceps me faisait défaut, les hostilités ont vraiment débuté à l’heure de plonger dans la boue et l’eau glaciale. On pèse alors 20 kilos de plus, nos chaussures sont imbibées et nous sommes couverts de boue de la tête aux pieds. Résignés, sachant de toute évidence que notre maillot ne pourra échapper à un intense lavage, on se prend alors vite au jeu. Le parcours est rythmé par des torrents de boue, ruisseaux à traverser, pentes escarpées, fils barbelés et autres murs à franchir… La dernière étape non prévue est sûrement la plus dure : la douche glaciale à l’arrivée pour se laver des affronts de la matinée.
L’objectif final est atteint : de bons moments passés tous ensemble et surtout, mon immunisation totale pour la saison des cross !
La machine à sous
ASO avait flairé le concept. Un champ de patates, trois troncs d’arbre, une mare et envoyez l’oseille ! La caricature est exagérée, mais la rentabilité de The Mud Day fait figure d’exemple. Pas grand chose à redire sur l’organisation, ni sur le parcours maîtrisé. Mais à plus de 50€ l’inscription pour des frais d’organisation limités (nous ne mettons pas en doute les années de R&D pour concevoir les obstacles), les caisses se remplissent vite. Et ça marche. La démocratisation du sport ouvre une fois encore de belles perspectives à des épreuves sans enjeux sportifs : le succès médiatique du rendez-vous en est un témoin frappant.
Un succès lié à une campagne de communication parfaitement ficelée sur internet et les réseaux sociaux. Des messages ciblés sur un public jeune, axés sur le dépassement de soi et une bonne dose d’humour ont contribué à l’attrait du public. A croire que pour les 13 000 participants, un délirant bain de boue est un luxe qui se paye au prix fort. L’édition 2014 s’annonce sous les meilleures hospices, et il est déjà prévu d’en faire des petits dès l’an prochain.
Pendant ce temps, les âmes nostalgiques auraient rêvé de voir autant de participants dans la boue … l’hiver sur le cross-country. Ironie du sort à quelques dizaines de kilomètres de là, le même jour, c’était du cross sans boue avec le timide retour du Figaro, perdu à la fin de l’été dans le Parc de Saint-Cloud.
Rémi BLOMME
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