Millau et ses célèbres 100km. Ils étaient plus de 1600 à se lancer dans cette course de l’extrême samedi 28 septembre dernier. Des coureurs qui préparent ce défi depuis des mois et qui savent pertinemment qu’ils ne passeront pas la ligne sans souffrir ! Mais peu importe, la souffrance est temporaire, le but, c’est d’être finisher !
À leurs côtés, des accompagnateurs en vélo qui vivront eux aussi une belle aventure. Les soutenir moralement, mais également assurer la logistique : ravitaillement, équipement … Une belle histoire à deux. Nous allons revivre ici l’histoire de Véro et Jean Paul, à travers le récit de Véronique, qui a suivi JP du 1er au 100ème kilomètre, avec son petit vélo, son sac à dos et ses ravitos ! Une mission qu’elle a eu à cœur de bien remplir …
« Je crois que je n’avais pas vraiment conscience de ce qui m’attendait. Accompagner un athlète sur les 100 km de Millau n’est pas vraiment une ballade du dimanche. Certes je cours, donc j’ai un minimum de condition physique, mais au début de la prépa du coureur je n’étais pas du tout cycliste. Et puis, au fur et à mesure, à force de faire nos sorties ensemble, l’accompagner en vélo pour ses sorties longues (lui m’accompagnait sur mes sorties de reprise), nous avons pris l’habitude l’un avec l’autre, quasiment des automatismes. Je devenais ainsi tout naturellement le suiveur qui accompagnerait Jean-Paul, sur cette épreuve mythique que sont « Les 100 km de Millau », le 28 septembre 2013.
Spontanément, nous avons continué nos sorties longues, de plus en plus longues et matinales au cours de l’été, pris le rythme pour que le coureur s’alimente, s’hydrate, se décontracte. Un nouveau vélo m’a fait connaitre le confort, ainsi que l’habillement nécessaire au cycliste. Je commençais à prendre goût à cette nouvelle discipline et décidais d’en faire un complément de la course à pied pour mes propres entrainements.
Au cours de la préparation physique concoctée par les Alain(s), différentes personnes se sont jointes à nous lors des sorties endurance, certaines de mes copines ainsi que des personnes du club. Vraiment le côté génial de la prépa. Les gens se sont côtoyés, se sont découverts pour certains, retrouvés pour d’autres, appris à se connaitre… Finalement la mayonnaise a bien pris entre tous ces coureurs… D’un programme sportif pour épreuve longue, ça devenait une histoire commune, des relations humaines que nous n’aurions sans doute pas vécues sans cette course et surtout sans ce fou de JiPi qui avait signé pour en baver… Mais c’est bien pour lui et lui seul que ces personnes se sont mobilisées et ont sympathisé, grâce à lui, ce n’était plus qu’une histoire de sport, mais une aventure entre passionnés …
Ne sachant pas du tout ce qui m’attendait le jour J, j’étais zen et restais plutôt décontractée. J’ai commencé à stresser sur les derniers jours, j’essayais de ne pas trop le montrer…. Pas du tout pour le coureur, car j’avais complètement confiance en lui, il avait fait une super prépa, tout en bossant beaucoup, son sérieux et sa combativité ne faisait aucun doute pour le jour de la course. Quelque soit son temps, j’étais sûre qu’il irait au bout, qu’il réussirait son pari…
Me concernant, là j’étais nettement moins confiante, je n’avais jamais fait autant de vélo de ma vie que ce que je ferai ce jour là. Le suiveur se doit d’accompagner son coureur afin de lui apporter un confort lors de la course, prendre soin de lui, porter ses affaires, l’assister pour les côtés logistiques tels que nourriture et hydratation… etc… L’encourager sans lui mettre de pression, être là, mais en arrière plan, se faire discret pour ne pas le gêner mais toujours à l’affut du moindre besoin du coureur, lui éviter de décrocher en cas de douleurs, quand le cerveau a envie d’abandonner mais qu’au fond il faut puiser encore et encore de l’énergie pour continuer… Je m’attendais aux souffrances physiques, au ras le bol, sans trop savoir comment gérer. Même si nous avions passé 3 mois d’été à s’entrainer et commencions à connaitre les réactions et habitudes de chacun, une course n’a vraiment rien à voir avec l’entrainement. Il faut improviser !
Je m’attendais à me faire envoyer balader, lorsque le cerveau ne contrôle plus, que les douleurs sont trop importantes, que l’envie de tout plaquer est proche. Je m’étais préparée à ce genre de comportement. Il n’en fut rien du tout, un coureur exemplaire dans la souffrance comme dans la facilité, il est resté d’une grande lucidité, toujours calme, courtois, digne, et surtout très courageux. Ses douleurs sont apparues un peu avant le 50ème km, crampes d’estomac, ensuite crampes dans les jambes, dessous de pieds qui ont chauffé, quasiment jusqu’à la fin, sa souffrance était palpable… Il ne l’exprime que vraiment très peu. Les 20 derniers kilomètres se sont faits en alternance de marche rapide et de course, un regain de peps lui a été profitable puisqu’il est arrivé en moins de 13h ! Epuisé, au bout du rouleau, mais « Finisher » et digne avec le sourire.
Côté accompagnement, avec le recul je me dis que j’aurai pu et du mieux faire. Je reconnais qu’il m’a été difficile de faire deux choses en même temps en vélo, le panier devant ne tenait pas, je devais le tenir de la main droite pour éviter le frottement sur la roue et de l’autre main, j’étais souvent sur le frein, car oui il y aussi du mouvement sur ce parcours, et rester au niveau du coureur en étant à vélo, en descente n’était pas si simple pour moi, j’ai senti mes bras se contracter avec les kms, tellement durs qu’ils se paralysaient. Je portais aussi un sac à dos avec des affaires de change et une autre paire de baskets pour le coureur, qui bien sûr au fur et à mesure de la course pesait beaucoup sur les épaules, frottait au milieu du dos… J’essayai de ne pas monter ce que je ressentais, le coureur était prioritaire et en aucun cas il ne devait percevoir mes douleurs, il avait bien assez des siennes.
Sur la fin, lorsqu’il avait retrouvé du peps pour courir, sentir la fin du parcours, le 2ème passage sous le Viaduc, cette fois illuminé, lire les derniers kms sur les pancartes, voir à nouveau de la vie, de la lumière, la ville qui apparait, le courage revient pour les deux, le coureur et le cycliste oublient leurs douleurs et ont hâte de voir la ligne d’arrivée sur l’estrade de la salle des fêtes de Millau. J’étais tellement contente pour lui, que cette épreuve touche à sa fin, quelques kms avant l’arrivée, je lui ai donné le dernier tee-shirt avec le dossard et j’ai filé pour avoir le temps de poser le vélo, les affaires, attraper rapidement le téléphone et attendre le coureur pour la photo finish ! Nous avons terminé les derniers mètres ensemble, pour une arrivée commune sur la ligne. J’étais terriblement fière de ce que venait d’accomplir JiPi. Ma mission était terminée.
Après une année difficile personnellement, beaucoup de travail, un programme d’entrainement assez lourd, il a tout assumé, courageux, drôle, plutôt zen… Il a réussi, grâce à lui, à cette force intérieure et un sacré mental. Le point final sera de se retrouver autour d’une bonne table avec les personnes qui ont participé à ses entrainements et ainsi clôturer cet épisode.
Beaucoup de merci à présent pour achever mes impressions de « suiveur »: Merci à Karin, Agathe, les Twixx (Carole et Katia), Malika, Laurence, Philippe pour leurs présences, Eric et Véro pour leurs encouragements, Sylvie et Patrick pour leurs conseils et tenues vestimentaires de cyclistes, le kiné, la podologue pour leurs soins. Énorme Merci à la maman de Jipi qui prend soin de lui au quotidien, à Gaëlle et Coralie, ses filles qui, sans le savoir, lui donnent la force et le courage de faire ce genre d’épreuves… Les Alain(s), nos chers entraineurs du club, qui ont concocté un programme Cyrano aux ptits oignons, prodigué des encouragements et des conseils du début à la fin… Une pensée pour Esther et Michel pour qui JP a particulièrement de la sympathie.
Pour terminer, MERCI, Jean-Paul de m’avoir permis de vivre une telle expérience riche autant sportivement qu’humainement. »