Vous la gérez comment vous, la douleur ? Parce que mine de rien, que vous pratiquiez simplement « pour le plaisir » ou pour être plus performant, la souffrance est régulièrement présente. C’est vrai que quand on est compétiteur (même assez « soft ») on l’accepte très bien, ça fait partie du jeu, on sait qu’il en faut un peu car c’est comme ça que l’on progresse, en allant un peu plus loin …
Pour autant malgré tout cela, ne vous êtes vous jamais surpris en course à vous dire: » mais mince, qu’est c’que je fous là !? » Prenons l’exemple d’un 10 km. La distance n’est pas très longue, donc même à forte intensité, ça va le faire. Eh bien non, pas forcément. Vous voici dans le dernier tiers de la course, et l’arrière de la cuisse tire. Pas facile mais ça suffira pour terminer. Puis, votre psoas se met à « chanter » lui aussi ! Bon là ça se complique… La foulée se dégrade, ça commence à taper, vos mollets font très mal… Déjà c’est difficilement supportable, mais en plus vous commencez à vous faire doubler par pas mal de monde. En fait, même les derniers hectomètres sont un calvaire ! Vous arrivez difficilement… ça n’a été que 10 kilomètres, mais que de souffrances ! Cela ne donne pas vraiment envie de recommencer ….
Et pourtant, un jour, vous y retournez… En réalité dans la souffrance, il y a aussi du plaisir. Le coureur à pied serait-il sado-masochiste ? Sans doute, oui. Mais quel plaisir découle des douleurs, de la difficulté ? Sûrement le fait de la surmonter. Techniquement, il faut mettre le corps à l’épreuve. Forcer, se fatiguer, avoir mal aux muscles, pour que le corps s’adapte et se renforce pour parer à ça. C’est un des principes de l’entraînement. Quelques fois, c’est très dur, et les bénéfices ne sont pas instantanés, mais il y a tout de même la satisfaction d’avoir endurer quelque chose de difficile. Quelques temps plus tard, vous voyez bien que vos sensations sont meilleures et que votre rendement l’est aussi, et ça c’est une belle victoire sur la souffrance que vous avez rencontrée pour y parvenir !
Quelques fois, c’est dur à avaler. Car on en voit vraiment de toutes les couleurs. Comme dans une côte interminable en trail. Imaginez… un jour où il fait très chaud. Le fait de grimper et de faire monter encore plus la température est bien pénible. Vos cuisses sont hors d’état. Vous n’avez aucune puissance. La pente est raide, vous avez même mal au bas du dos. La course se termine après un long retour. Évidemment ça ne s’est pas très bien passé mais vous faites un bilan, et il n’est pas question de rester sur cette impression là. La souffrance prend alors la forme d’un défi. Vous avez perdu une bataille ? Ok, mais pas la guerre ! Si bien que vous vous dites qu’un jour, vous arriverez à la dompter cette bosse, à gérer vos efforts toute la course, à ne pas vous laisser malmener par le terrain. Vous y reviendrez pour maîtriser tous ces éléments.
Pour autant, même en étant préparé, la confrontation à la douleur n’est jamais évidente. » Serrer les dents « , ce n’est pas aussi facile que de citer l’expression. Pourtant il y a des maximes ou des paroles qui résonnent plus fort dans votre tête. » No pain, no gain » voit-on écrit dans les citations favorites sur les réseaux. Bien sûr, on n’a pas de résultats sans efforts. Avez-vous entendu : » la douleur est temporaire, l’abandon est définitif « ? Celle-ci mais un peu plus l’accent sur la durée de l’instant. La douleur, c’est quelque chose de pénible, mais ça ne dure pas. Cela incite à faire un effort mental pour tenir, comme en montant une bosse, avant que tout se calme une fois arrivé en haut. L’abandon ici n’est pas l’arrêt de l’épreuve, mais l’abandon dans sa tête. Si vous lâchez prise en cours d’effort, c’est fini.
En fait, la souffrance avant d’être physique, est mentale. C’est bien le cerveau qui capte et émet les signaux de douleurs. Quelqu’un de fort va insister un peu plus. Quelqu’un de plus faible sur l’instant, va s’attarder sur ses difficultés, et ressentira encore plus la souffrance. Bien sûr, avec l’expérience, vous savez aussi écouter votre corps et quelques fois il faut être assez lucide pour ne pas mettre sa santé en danger. Mais tout ceci est complexe à analyser, car dans l’action, tout peut se mêler.
Alors oui, comment vous la gérez vous, la douleur ?
Mathieu BERTOS
photo : Luchon la Crémaillère (2012) Xiberotarrak