Après 4 mois passés à Paris, le petit provincial que je suis n’a guère été emballé pour gambader régulièrement dans la vaste jungle urbaine. Rarement l’arrivée des vacances ne s’est faite aussi pressante, promise à la montagne, dans mon jardin annécien où une partie de ma famille a élue domicile.
Annecy, mon QG montagnard, pour trois semaines de stage de remise en forme avant de démarrer la saison 2013-2014 par de la route et du cross.
Lac, Veyrier, Tournette, Semnoz … 100% Annecy !
Un petit point touristique s’impose. La région, dynamique, à la qualité de vie imparable, propose de nombreuses activités sportives et culturelles ; en témoigne sa forte attractivité (et le prix de l’immobilier). Entre deux tartiflettes, repas principal du touriste de base en plein mois d’août, le footing au bord du lac et la baignade pour se rafraichir ont de quoi en faire rager plus d’un. Excepté les plages bondés et une piste cyclable transformée en autoroute l’été, il y a de quoi profiter abondamment de cette zone de moyenne montagne, à l’image de ces quelques exemples où j’ai pu me balader. Un paragraphe sponsorisé par l’office du tourisme d’Annecy.
Le Semnoz (1699m), monté par les coureur du Tour de France en juillet dernier, regorge de sentiers forestiers et de parcours de tous profils pour trail et VTT. Au départ d’Annecy, on notera aussi le Mont Veyrier (1291m), pour faire un peu de dénivelé (et de l’escalade) en surplombant le lac. Enfin, la Tournette (2351m), le point culminant du coin, offre non seulement une belle randonnée au départ du chalet de l’Aulp mais aussi une vue magique à 360° sur le lac, les Alpes et le massif du Mont Blanc. Avec en prime un nombre impressionnant de bouquetins sur les bords des chemins. Une occasion en or de se familiariser avec la course en montagne. J’ai descendu les 1200m de dénivelé en courant, manquant de peu de belles glissades. Si un jour l’idée folle me venait de faire le tout en une journée, rien de plus simple (ou presque) ! Il faudrait alors prendre un dossard sur la Tecnica Maxi Race : un trail de 86 Km autour du lac d’Annecy annulé cette année pour cause de mauvais temps (voir article : annulation Maxi Race). Vous l’aurez compris, Annecy, c’est mon petit paradis.
Trail de l’Aigle à Manigod : rien ne vaut le vécu
L’omniprésence médiatique du trail dans le monde du running fatigue, agace parfois. Simple jalousie du citadin frustré ou déroute sportive qui fera tragiquement plonger la course à pied dans un océan de fromage fermier et de consommateurs quinquagénaires fous ?
Balivernes ! Tout s’efface lorsque les massifs s’étendent devant nous. J’éviterais les tirades niaises sur le bonheur d’évoluer au cœur de cet environnement, on s’en occupe déjà bien assez : c’est l’esprit trail vous-dis-je ! Mais le constat est là, on s’y sent bien et notre petit âme citadine ne résiste guère longtemps à l’appel de la montagne. Une fois de plus, je m’incline : elle a gagné. On saisit alors l’effervescence de la discipline, la fierté du finisher et du coureur qui exhibe son dénivelé du jour, la multiplication des courses et l’engouement pour Jornet qui s’amuse sur les sommets. Face à la chaîne des Aravis et au royal Mont Blanc, les images du film A fine Line , reviennent à l’esprit. On se met alors à batifoler joyeusement sur les sentiers dans cette nature chatoyante, aux côtés des bouquetins, des chamois et des petits papillons sur un air de Peer Gynt, Au matin.
Sous la pression familiale, bien décidée à pique-niquer dans un cadre champêtre, me voilà au départ d’une petite course locale (non pas une course à la saucisse, mais une course au reblochon !). Un 11 Km et 520m D+ à l’occasion du Trail de l’Aigle à Manigod (74), rendez-vous qui propose également un 26 Km et un trail blanc en période hivernale. Trop court pour un trail me direz-vous ? Moi qui n’avait encore jamais couru en montagne, c’était bien suffisant pour appréhender les particularités de la discipline. Et à force de se nourrir des vidéos alléchantes qui fleurissent quotidiennement sur le net, on se dit que finalement, courir en montagne, ça ne doit pas être bien compliqué.
Que nenni malheureux ! Qui aurait pu prédire tant de naïveté ? Me voilà asphyxié au bout de 15 minutes de montée. Titubant, peinant à trouver ma respiration comme après une apnée mal engagée, j’avais cette douloureuse impression de faire du sur-place, laissant chuter une vitesse moyenne que je ne saurais voir. Mais contrairement à notre impératrice du trail, je n’ai eu nulle appréhension à marcher dès que la pente était raide, mains sur les genoux. La montée, les doigts dans le nez ! Et là c’est le drame … Une longue descente technique. Apeuré, je trottine prudemment, marchant parfois, laissant impuissant le groupe de tête dévaler à toute berzingue dans la caillasse. Il ne me restait plus qu’à me cacher au fond des bois, terrassé par la honte, moi qui n’avait pas eu le courage d’affronter ce sentier escarpé. La descente, c’est une technique mais aussi une question de confiance en soi. La différence entre le bon et le mauvais traileur auraient dit les Inconnus. Je finis par prendre mon pied en fin de course avec un relief plus roulant et une allure plus rapide en sous-bois. La machine s’était enfin mise en route, mais c’était déjà l’arrivée ! Un vrai diesel… Le scandale a connu son apogée lorsque ma famille a pris connaissance, désemparée, de l’absence de classement Espoir sur la course. Une nouvelle douloureuse qui me fermait définitivement les portes de la gloire et du précieux paquet garni honorant les vainqueurs.
Ces sorties estivales ont en tout cas validé toutes les réflexions que j’avais pu lire ici et là : le rôle primordial d’une chaussure qui assure un bon maintien du pied, les traumatismes que subit le corps, les nouvelles postures et techniques avec lesquelles il faut se familiariser en montagne, le rôle des bâtons, la gestion inédite de l’effort … un autre monde. Des sorties qui rendent aussi très modeste devant les efforts impressionnants de ces traileurs en herbe qui crapahutent tous les week-end. Il faut le voir pour le croire. Un peu de lecture sur u-run.fr ne devrait pas faire de mal si vous avez besoin de quelques conseils en la matière !
Transmission et prévention
En 2009, ma tante qui réside à Annecy m’a malencontreusement contaminé avec le virus de la course à pied. 4 ans après, ironie du sort, elle apprend qu’elle ne pourra plus jamais courir suite à une opération du genou et la mise en place d’un prothèse. Une transmission symbolique s’est acquise sans prévision, de tante à neveu, après 20 ans de pratique. Une triste conclusion qui résonne aussi comme un message de prévention. On dit parfois que la course à pied conserve … à condition d’éviter les excès. Certains coureurs disparaissent du circuit après une pratique obsessionnelle, de longues blessures, des opérations à répétition … Le corps a parfois du mal à encaisser au quotidien, mais vous le savez déjà. Il suffit d’une descente escarpée pour prendre conscience des chocs que subissent notamment chevilles et genoux. Il devient alors primordial de modérer sa pratique, d’assurer la prévention, les périodes de repos et de récupération, d’alterner ses entraînements avec du vélo, de la natation, pour se ménager et éviter de trop martyriser son corps. Oh bien sûr, il faut profiter de la vie camarades et nous n’irons pas pleurer dans les chaumières, mais j’aimerais éviter de marcher à 4 pattes à 50 ans.
En attendant que je retrouve un jour les sentiers montagnards, à l’heure où la grande fête de l’UTMB bat son plein, j’opterais plus raisonnablement pour l’USMB, l’Ultra-Sieste du Mont Blanc. L’ultra-Sieste, un amusant collectif anti-capitaliste qui voit en la compétition un « vecteur idéologique du capitalisme ». Tremblez amis traileurs !
Rémi Blomme
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