Ces 3 dernières semaines étaient sportivement très mitigées à cause de cette entorse survenue suite à une chute à la fin d’un entraînement à Val Thorens. Donc ma participation au Trail Ubaye Salomon restait encore incertaine jusqu’à la veille de la course … Partagée entre l’envie de crapahuter dans ce superbe terrain de jeu de l’Ubaye et la crainte de manquer de sagesse et de le payer en repartant pour plusieurs semaines de repos forcé. Sachant que lors de ma dernière séance de kiné le vendredi avant la course, on m’avait bien mis en garde sur les risques encourus …
C’est quand même trop tentant !! On est sur place, la météo est idéale, les organisateurs nous ont vraiment bien reçu, le parcours est extraordinaire, et j’ai mon dossard dans la main … Je décide donc de prendre le départ, avec un bon strap gentiment fait par un coureur kiné (merci Thibaut !!) et dans l’optique de jouer à fond la carte de la prudence ! D’ailleurs j’emmènerais mon appareil photo dans mon porte bidon en cas d’obligation de mettre le clignotant … que je ne me sois pas levée à 5h du mat pour rien quoi !
Après une belle soirée passée en compagnie de l’équipe organisatrice et quelques autres coureurs, une nuit sans dormir (on s’habitue, si si !!) et un réveil matinal pour un petit déjeuner sportif et copieux, nous nous dirigeons tranquillement (sans se presser pour une fois que nous ne sommes pas en retard !) vers le lieu de départ, ce charmant petit village de Barcelonnette. 1224 coureurs engagés au total, dont 400 sur notre parcours : 42km et 2600D+. Le départ est prévu pour 8h. Il fait grand soleil, l’air est encore frais à cette heure ci, mais pas de doute sur la tenue à enfiler, il va faire chaud dès que le soleil sera plus haut : short-tee shirt, légèreté obligée ! Mes ASICS Fuji Trail Attack aux pieds, bas de compression sur les mollets, porte bidon plein à craquer (2 gels, 2 barres, sifflet, couverture de survie, appareil photo, 3 topettes de boisson Isostar et eau !), me voilà prête pour l’aventure ! J’ai choisi de partir avec un peu plus d’eau que d’habitude : pas envie de manquer et comme il y a des risques que je sois contrainte de freiner, je préfère assurer, tant pis pour le poids supplémentaire, je pars de toute façon sans aucune prétention !
Le départ est donné à 8h pétante, quelle ponctualité !
J’ai opté pour un échauffement d’avant course limité à quelques foulées, on m’avait annoncé 6km de plat pour démarrer … en effet, on commence par longer la rivière de l’Ubaye, avec une bonne portion de bitume. Ça me va parfaitement pour la mise en route ! Premières sensations plutôt bonnes avec des foulées légères, je laisse faire et profite de ces bonnes jambes du départ, je suis Aline Grimaud (la grande favorite de l’épreuve !) qui est juste devant moi, a priori nous partons en tête. Son allure me convient bien pour le moment, donc je reste dans sa foulée. Nous quittons la route (j’avoue que c’était bien sécurisant pour ma cheville) pour s’engager sur un terrain un peu moins stable … Ma cheville part en vrille une première fois, ça me rappelle à l’ordre, je ralentis et redouble de vigilance, la course est encore très longue. 6ème kilomètre, premier ravitaillement, que je passe sans m’arrêter, mes bidons sont encore pleins, tout va bien.
Les choses sérieuses commencent ici, la première ascension démarre …
Je suis toujours aux côtés d’Aline mais je la laisse prendre de la distance, j’ai peur de me mettre dans le rouge à essayer de la suivre et j’ai aussi peur de prendre trop de risques pour ma cheville. On a environ 600m de dénivelé positif à grimper en 5km pour atteindre la premier col (Baume -Longe). Sentier étroit et boisé, mais la montée peut se courir tranquillement, à petites foulées. Je trouve mon rythme, le souffle est bon, je vais tenter de maintenir cette allure et d’être régulière. Je ne me préoccupe pas de devant ni de derrière, je me concentre sur mes appuis … Au premier sommet, l’ambiance est au RDV et les supporters qui nous encouragent annoncent Aline juste devant moi. On bascule ensuite vers Villars d’Abas avec environ 400mD- à effectuer pour se rendre au 2ème ravito, au 15ème kilomètre. Je crains les descentes avec cette fragilité à la cheville, le sentier en single reste assez propre mais casse pattes et très piégeux (le gars derrière moi a d’ailleurs failli faire un vol plané qui aurait pu lui coûter très cher !) : je mets clairement le frein à main et du coup j’attends le moment où je vais me faire doubler … Mais non, j’atteins le second ravitaillement en 2ème position toujours. 1h44 de course déjà, pas encore de signe de fatigue, ça va !
Je fais le plein d’eau et repars en direction du Col des Cloches !
Quasiment 1500mD+ en 9km, autrement dit, on risque d’arriver au sommet bien fatigués et les cuissots en feu ! Mais à ce moment là, il ne faut mieux pas y penser … La montée qui nous emmène jusqu’au ravitaillement du km20 est bien raide cette fois ! Nous sommes en plein soleil, je m’efforce de bien boire mais je sens la fatigue me tomber dessus … Je garde le moral, c’est peut être juste passager. Je prends un gel en me disant que ça me permettra peut être de retrouver un peu d’énergie. Pas vraiment d’amélioration, mais j’essaye de ne pas lâcher dans la tête, la route est encore longue. J’arrive au Col des Cloches tant bien que mal, sans m’être faite doubler, on va dire que j’ai limité les dégâts ! Il reste 2km avant de rejoindre le 3ème ravitaillement, c’est une portion en herbe et en faut plat qui nous y emmène. Alors que je commence tout juste à me remettre de cette difficile ascension, je vois soudainement 2 féminines me doubler. Puis une 3ème ! Elles vont vite ! Mais d’où sortent elles ? Je comprends quelques minutes après en rechargeant mes bidons au ravitaillement, ce sont les coureurs du 23km qui nous ont rejoints … Nous poursuivons l’ascension à droite et eux filent à gauche, ok !
4km vraiment difficiles débutent vers le sommet du célèbre Chapeau du Gendarme.
Je retrouve un peu de forme, ça tombe plutôt bien parce qu’il va falloir tout donner sur cette portion là, vraiment raide et technique. Je lève la tête et regarde le sommet où nous sommes sensés passer, erreur à ne pas faire !!! Il me paraît tellement haut et loin ! Le sentier étroit serpente, on peut voir les coureurs devant avancer doucement comme des petites fourmis … Je décide de ne plus regarder en haut, de débrancher le cerveau et de me concentrer sur mes pieds et ma foulée : un pied devant l’autre, on avance, ça va bien s’passer ! C’est plutôt propre au sol pour le moment et ma cheville va plutôt bien, il faut positiver. J’ai mal aux jambes, je sens mes cuisses brûler mais je sens le sommet s’approcher … On arrive sur la partie « escalade » : finie la course à pied, mains sur les rochers, il faut lever les jambes et tirer sur les bras pour avancer. Des cordes ont même été installées pour nous sécuriser et nous aider à grimper ! Mais quand on regarde autour de nous et qu’on pense à la vue qui nous attend en haut, je peux vous dire que ça motive !! L’effort est intense, mais la récompense est belle, c’est juste magnifique d’être perchée ici … J’aurais bien envie de m’y arrêter mais j’évite de perdre trop de temps quand même, je vais déjà en perdre beaucoup dans la descente.
On souffle, on respire cet air frais là haut, on photographie ce paysage qui marquera probablement le plus cette course et on enchaîne avec la descente ….
Direction le Col du Gyp puis le Col de Fours. Ce n’est vraiment pas un terrain fréquentable pour une cheville qui se remet d’une entorse encore récente … Je prends conscience que je prends des risques énormes sur cette portion, mais bon, il faut bien descendre maintenant que je suis montée là haut ! De nouveau avec le frein à main et avec une grande vigilance, je cours à travers les cailloux. Ça roule parterre, c’est glissant et dangereux, il faut faire attention à chaque appui. Mes bidons sont vides, je commence à manquer cruellement d’eau, j’espère que le ravitaillement n’est plus très loin … Un poste de secours est positionné au Col de Fours, on m’annonce 1′ derrière Aline et le gars me rassure : « c’est loin derrière, tu peux gérer ta descente tranquille« . Oui mais il reste plus de 12km et je ne peux pas envoyer comme j’aimerais dans cette descente, j’oublie l’idée de recoller, j’avais promis de jouer la carte de 3P (plaisir, prudence et pas de bobos !) 😉 J’avais noté un dernier ravitaillement au km32, mais a priori, il a disparu !! J’ai pourtant absolument besoin de boire … je suis desséchée complet et je ne suis pas la seule à l’attendre apparemment …
C’est finalement au 36ème kilomètre que nous atteignons le dernier ravitaillement…
Juste avant le passage à « Super Sauze », on peut donc enfin faire le plein d’eau ! Il était temps … Je ne m’attarde pas, j’ai retrouvé la patate, je ne sais comment l’expliquer, mais tant mieux ! J’ai réussi à maintenir la seconde place jusqu’ici, ce n’est pas le moment de me faire rattraper. C’est peut être l’approche de l’arrivée qui me donne des ailes … Je pense à Manu qui doit être arrivé, j’espère que ça s’est bien passé pour lui. Après un passage sympa dans un décor un peu lunaire, et une de belles successions de montées/descentes, je croise Robert Goin qui m’encourage sur le côté, prêt à me « flasher » au passage. Merci pour les encouragements Robert ! Les 3km avant de rejoindre Barcelonnette se sont faits sans grosses difficultés, tout en gestion, avec comme seul objectif de conserver cette 2ème place et de garder ma cheville telle qu’elle ! Contente d’avoir retrouvé des supers jambes pour terminer, je passe la ligne avec le sourire en 5h30, 2ème féminine derrière Aline (bravo à elle !) et 67ème au scratch.
Contrat rempli, j’ai limité la prise de risque mais j’ai quand même fait essayé de donner le meilleur avec les capacités du moment ! Seul regret : ne pas avoir sorti l’appareil photo du porte bidon … Avec tout ça je l’avais oublié ! 🙂 Un grand grand merci aux organisateurs qui nous ont vraiment bien tous accueillis et qui nous ont tracé un beau parcours varié et coloré ! RDV l’année prochaine, sans strap aux pieds ! 😉
Sylvaine CUSSOT
[nggallery id=522]