On le sait, quand on décide de faire un bébé, il y a quelques concessions à faire. Mais qui ne sont en général pas considérées comme des contraintes quand on sait pourquoi (ou pour qui !) on les fait !
Pour les coureuses, arrêter la course à pied est une nécessité pour la santé de son enfant qui va naître. Cependant, pour les vraies passionnées et droguées, mettre les baskets au placard n’est pas toujours facile à faire …
Y a t-il des compromis à trouver entre tout arrêter et faire la bêtise de poursuivre sa passion sans se soucier des conséquences pour son futur enfant ? Sûrement ! En attendant, chaque cas est particulier et chaque grossesse est vécue différemment. Pour preuve ici, 4 femmes coureuses ont accepté de témoigner pour nous raconter la manière dont elles ont vécu leur grossesse alors même qu’elles ne peuvent habituellement pas se passer de course à pied !
Alexia : « j’ai arrêté peu après l’annonce … psychologiquement, ça été très dur, surtout quand on croise des coureurs devant la maison ! »
Alexia a découvert sa grossesse tardivement alors qu’elle était en pleine préparation de son tout premier ultra (Raid du Golfe du Morbihan). Elle a ainsi continué à courir (entraînement et compétition !) jusqu’au 5ème mois de grossesse avant de découvrir la surprise : » je fais partie des femmes qui ont connu le déni de grossesse. Et je peux assurer qu’il est possible de courir chaque jour, de faire des sorties longues, du trail et VTT avec un petit bout bien au chaud … » affirme t-elle. Mais Alexia a fait le choix de s’arrêter à l’annonce de la bonne nouvelle. Elle explique : « j’ai arrêté peu après l’annonce. Non pas par interdiction, bien au contraire j’avais le feu vert et les encouragements de mon médecin pour continuer à courir…uniquement sur route et sans aller à fond. Mais par pudeur je n’ai pas osé. Si jusque-là, j’avais le ventre plat, dès l’annonce j’ai pris du ventre et courir avec le ventre dans des tee-shirts près du corps me mettais mal à l’aise aux yeux des autres. »
C’est donc passés les 5 mois de grossesse qu’Alexia s’est mise au repos complet. Pas évident pour elle, qui n’avait pas préparé cette situation et qui était en pleine préparation d’objectifs … « j’ai très mal vécu la chose, surtout à 15 jours du départ du Raid. Et puis se dire « j’arrête de courir pour éviter les regards » était encore plus cruel. Psychologiquement, ça été très dur, surtout quand on croise des coureurs devant la maison ! Mais la parade était de trottiner après mon petit garçon âgé de 2 ans et demi à ce moment-là. Mais cela ne remplaçait pas les séances. »
Une reprise qui s’est par contre faite sans encombre après l’accouchement. Alexia se souvient : « la reprise s’est faite très rapidement. Deux mois après l’accouchement j’ai fait mes premières séances de rééducation du périnée avec seulement quatre séances nécessaires et de là, j’ai repris les entraînements (c’est-à-dire au bout de 2 mois et demi). J’ai repris les bonnes habitudes… « Courir comme avant » et en vue d’un 10 km. Ma reprise a été faite mi-janvier et début mars j’attaquais mon retour en compétition sur 10 km puis trail. Les sensations étaient là, la reprise a été plus que bonne et les podiums sont tombés de suite. »
Virginie : « j’ai arrêté 8 jours avant d’accoucher »
Ce n’est pas le cas le plus fréquent, je vous l’accorde ! Mais du coup pour Virginie, pas de frustration, elle n’a pas coupé, mais a juste ralenti et au fur et à mesure de l’avancement de sa grossesse et a adapté sa pratique en fonction de son état de fatigue. Elle explique qu’elle a fait ce choix parce qu’il lui a semblé cohérent avec son état d’esprit : « je fais du sport depuis l’âge de 6 ans, sans interruption, donc il était pour moi inenvisageable d’arrêter, en sachant que mon métier était éducateur fitness, j’ai donc travaillé jusqu’à mon congé maternité. Donc, tout c’est fait naturellement, sans me poser de question. »
Sans se poser de question mais avec l’avis de spécialistes quand même : « mon médecin généraliste et mon ostéopathe me connaissent bien et ne m’ont jamais interdit, ils savent très bien que je connais mon corps, que je me connais. Mon gynécologue m’a dit: si le bébé est bien accroché, il n’y aura aucun problème mais de toute façon, s’il doit y avoir un souci, il y en aura même sans courir. (A savoir que j’ai mis 5 ans pour réussir a tomber enceinte). Donc il m’a bien rassuré a ce sujet… » Et aujourd’hui, Virginie ne regrette rien, elle est ravie d’avoir fait confiance à son gynécologue : « Thomas est arrivé à 2 jours du terme, 3kg550, 51cm, et hypertonique… Et aujourd’hui c’est un bon sportif !! »
Peggy : « compet’ jusqu’au 3ème mois … J’ai fait du vélo et de la natation après mais à partir du 7ème mois c’était long… «
Peggy n’a rien changé à ses habitudes jusqu’au 3ème mois de grossesse, en poursuivant sa pratique plutôt intensive de l’entraînement ainsi que les compétitions qu’elle avait planifiées. Mais son envie n’était plus la même, comme bloquée psychologiquement : « après avoir appris qu’un petit bébé était en train de « pousser » dans mon ventre, je n’ai finalement absolument rien changé à mes habitudes. J’ai poursuivi le même rythme d’entraînements, en nombre et en intensité (3 par semaine). J’ai glané quelques podiums sur des 10km dans ma contrée sarthoise au cours du mois de mai et fait un bon chrono au semi du Mans (1h31’). Et là, même si mes jambes allaient bien, mon corps aussi d’ailleurs, ma tête ne voulait pas vraiment me voir souffrir… J’ai donc fait cette course en prenant du plaisir mais sans me mettre dans le rouge ! Je n’avais plus la hargne pour me dépasser. »
C’est donc tout naturellement et sans se forcer que Peggy s’est mise au repos au début du 4ème mois de grossesse : « je n’en étais pas vraiment fâchée. La saison avait été longue et la trêve avait sonné ! Et ce p’tit bébé, il l’avait sûrement bien intégré car 2 jours après mon corps a changé et le bidon à commencer à poindre le bout de son nez ! Seulement au bout de 2 semaines d’arrêt de sport, j’ai commencé à « psychoter » (enfin pt’ être même que j’ai toujours un peu « psychoté » ;-)) sur la modification de mon corps, entraînant chez moi 10000 questions à la seconde : est-ce que je vais retrouver mon poids ? Est-ce que je vais retrouver mon niveau (même s’il reste modeste) ? Est-ce que je vais pouvoir refaire du sport ? J’avais un peu de mal à me voir changer physiquement. »
Mais hors de question de se laisser aller à la paresse quand même ! Peggy a continué quelques exercices de fitness pour garder la forme : « alors j’ai poursuivi le travail de gainage et aussi beaucoup de fessiers jusqu’à la fin de la grossesse au moins deux à trois fois par semaine (environ 1h). J’ai également emprunté le vélo d’appartement de maman que j’ai dépoussiéré … »
Céline : « Pour le 1er, la pause course à pied m’a fait du bien surtout que je pouvais toujours nager, marcher… Mais pour le 2ème, très dur de ne plus rien faire … »
Céline a connu 2 grossesses et elle a fait le choix d’arrêter de courir dès l’annonce des nouvelles : « je ne voulais pas risquer une fausse couche. La course à pied est assez traumatisante et secoue pas mal donc j’ai préféré jouer la prudence ! » explique t-elle. Mais ce repos sportif forcé n’a pas été vécu de la même manière pour ses deux bébés : « pour mon premier, la coupure m’a fait du bien psychologiquement car je sortais de plusieurs années à faire des triathlons longs (format half-ironman) donc qui demandaient énormément d’entraînements. Mais pour le second, très dur d’arrêter, le sport me manquait. J’avais pu reprendre un peu entre les 2 grossesses mais loin de mon niveau donc un peu frustrée d’arrêter, surtout que mon dernier trail avant d’apprendre que j’étais enceinte était le dodo trail de Maurice donc paysages et organisation tip top qui me donnaient envie de vite en refaire… Mais non ! Notre tit dodo (petit cadeau que l’on s’est offert à Maurice !) est arrivé très vite donc stop la course à pied ! »
Plus de course à pied, mais Céline a pu se rattraper avec la pratique d’autres activités sportives : « ma première grossesse était sans douleur donc j’ai fait du vélo, de la marche et beaucoup de natation (jusqu’à la veille d’accoucher !). Pour mon deuxième, c’était plus compliqué, j’ai aussi eu très tôt des douleurs dans le bas du ventre dès que je marchais un peu trop, et même en nageant. J’ai donc fait le choix de ne pas trop insister pour éviter toute complication et risque pour le bébé. La santé du bébé était la priorité !
Côté reprise, Céline a fait les choses sans précipitations … : »après mon premier bébé, j’ai repris la course à pied après avoir fini la rééducation du périnée soit environ 4 mois après l’accouchement. Mais pendant ma 2ème grossesse, le sport m’a tellement manqué que j’ai très vite eu envie de reprendre, surtout avec le beau temps ! J’ai commencé par du vélo (tranquille) au bout de 2 mois. Pour la course à pied j’ai attendu 3mois et j’ai commencé très cool car je n’avais pas fini la rééducation du périnée (chut ne rien dire à ma sage femme car je n’ai toujours pas fini…). J’ai commencé par des petits footings en alternant avec de la marche pour voir comment réagissait le périnée. Et comme ça avait l’air d’aller j’ai allongé progressivement le temps pour atteindre 1h fin juillet. Mais je cours à faible allure. Je n’ai commencé à faire des 30″-30″ que mi-août. Tant que la rééducation du périnée ne sera pas terminée je vais aller assez cool (les jambes et le souffle doivent aussi se réhabituer progressivement). Je préfère y aller doucement mais sûrement ! Je continue aussi le vélo et j’ai repris la natation qui me font du bien au dos et pour le cardio ! »
Chaque femme vit sa grossesse différemment et même si le fait de mettre la course à pied entre parenthèses n’est pas toujours évident, cela n’enlève en rien le bonheur que procure le fait d’être maman !! Et puis (comme c’est le cas pour d’éventuelles blessures) garder en tête que le retour n’en sera que meilleur et que vous aurez même un supporter de plus sur le côté, fier de sa maman sportive !
Sylvaine CUSSOT