Kilian Jornet était bien présent aux 10km de l’Equipe pour la bonne cause : Mécénat Chirurgie Cardiaque. L’annonce de sa participation a fait beaucoup jaser dans le monde du running. En effet, tout le monde connaissait les exploits en trail et en montagne du jeune espagnol. A le voir grimper de fortes pentes à ces allures, sur des kilomètres, et l’admirer descendre en roue libre sur des crêtes vertigineuses, on imaginait que le rendement sur route puisse être également d’un excellent niveau. D’autant que sa Vo2Max, donnée chiffrée relevant de sa consommation d’oxygène, est estimé entre 85 et 90ml/kg/min…
Une certaine curiosité s’était alors emparé de pas mal de monde. La première question était de savoir s’il allait vraiment faire ce 10 bornes, c’est à dire à son plein potentiel. La deuxième fois, les paris étaient lancés: en combien allait-il le réaliser ? Si la Française des Jeux avait été sur le coup, elle aurait pu faire fortune! 29’30, 30’30, 32’28, 34’45, 36’11… Faites vos jeux !
Chaque coureur donnait ses arguments en fonction de son expérience, chacun pensant être bon et juste dans son estimation. Bizarrement, deux groupes se sont dessinés petit à petit : les coureurs route, et les coureurs trail. Pourquoi ? La course à pied n’est pas une famille entière, qui s’apprécie et qui se respecte ? La variété et l’accessibilité de ce sport permettent pourtant des aller-retours entre différentes disciplines, tout le monde peut s’essayer, tout le monde peut y goûter. Là, on avait les « routiers » qui pensaient que le jeune espagnol serait bridé en vitesse dans un effort trop différent. Les traileurs de leur côté voulait voir Kilian faire mal à pas mal de coureurs sur route. Un héros pour ces derniers, qui n’avait pas tant de pouvoir que ça pour les autres…
Mais Kilian est bien au dessus de tout ceci. Son temps final est de 38’42. Mais un résultat chiffré ne suffit pas, il faut avoir le contenu pour analyser. Et quand on prend tout en compte, que ce soit l’histoire de Kilian, l’avant course, pendant l’effort et l’après-course, on ne pouvait s’attendre à autre chose. Il était bien venu pour soutenir l’association Mécénat Chirurgie Cardiaque. Bien sûr sa réputation sert aussi à ces causes et c’est tant mieux ! Mais il n’aime pas la médiatisation. Il fait le métier, il comprend le système. Dans l’interview proposée par le magazine Joggueur, il précisait qu’il n’avait pas de plan d’entraînement particulier. Son dernier fractionné : il avait 14 ans… Pendant la course, des coureurs pourront dire qu’ils ont couru auprès de lui : il a fait les premiers hectomètres en faisant des allers-retours au milieu de la foule. Un coureur d’endurance n’est pas forcément solitaire : plutôt solidaire d’ailleurs.
Et l’après-course ? Le résultat du chrono c’est 38’42. On sait donc qu’il peut faire plus. Mais avait-il surtout intérêt à le montrer ? Le montrer à qui, pourquoi ? Pour faire plaisir à qui ? A des curieux ? A des gens qui vont le juger ? Kilian est quelqu’un de « nature », et il l’est resté. En forçant sur bitume, il aurait pu risquer une blessure. Il aurait pu risquer de se faire juger, de ternir son image. Salomon nous expliquera (ou pas) ce qu’ils en ont dit… Mais le jeune homme est intelligent. Il n’a pas à prouver sa valeur, son potentiel. Son terrain, c’est la montagne.
Bravo à toi Kilian, et que la famille des coureurs cesse de se diviser, nous partageons le même sport !
Texte : Mathieu BERTOS
Photos : Mécénat Chirurgie Cardiaque
[nggallery id=481]