Une date qui était cochée dans l’agenda depuis un moment : Trail de Faverges, samedi 15 juin. Course qui ne m’avait pas vraiment réussie l’an passé (Trail des Sources du Lac), mais à cette époque là, il faut l’avouer, je n’étais pas du tout préparée … Les trails et moi, on commençait tout juste à s’apprécier. Et ceux qui étaient trop montagneux n’avaient même pas tendance à m’attirer.
Cette année c’est sur le long parcours que je décide de m’élancer, le Maratrail (43km et 2500mD+), mieux préparée et après un début de saison qui me conforte dans mon envie de persévérer sur les distances plus longues. Un gros plateau est annoncé, effet TTN oblige ! Chacun va essayer d’aller chercher des points pour remonter dans le classement…
Je n’y allais pas pour faire un podium, je savais pertinemment que je n’avais pas le niveau pour rivaliser avec les meilleures annoncées favorites, mais pour me confronter une nouvelle fois à la montagne, à ces parcours exigeants et difficiles, et parce que je savais que cette course allait m’apporter pour la suite ! Bon bien sûr, j’étais bien résolue à donner le meilleur de moi même quand même avec les possibilités du jour, cela tombe sous le sens, d’autant que j’avais aussi très à cœur d’honorer ce partenariat naissant avec Asics …
Départ prévue à 7h30 samedi, ça veut dire arrivée tardive à Faverges vendredi soir après la journée de boulot et un réveil très matinal vers 4h30. Ce n’est pas l’idéal mais on fait avec, c’est pour tout le monde pareil ! Le manche longue est déjà de trop à … 6h30, ça promet ! Mais là encore, même combat pour tous les participants. D’ailleurs, avec un premier ravitaillement au 19ème kilomètre après déjà une belle ascension, je crains manquer d’eau, mais mon porte bidon ne peut contenir qu’une seule gourde, donc on va faire avec et gérer au mieux. Après avoir pointer tous les dossards au départ, quelques minutes avant de s’élancer, les dernières recommandations sont faites par l’organisateur au micro : On ne coupe pas, on porte assistance aux personnes en danger, on suit bien les balisages, on est prudent en descente … Heureusement que je ne suis pas du genre stressée au départ parce que ces interventions sont certes très utile, mais mettent bien la pression aux coureurs aussi ! allez cette fois fini de parler, le coup de feu a été donné, nous voici bien lancés, le peloton commence déjà à s’étirer.
Je me suis placée un peu loin de la ligne de départ, du coup je fournis un petit effort pour me replacer dès les premières foulées. J’ai l’impression de partir vite, sensations qui ne me plaisent pas du tout … Une très courte portion de plat laisse rapidement place à l’entrée sur les sentiers et déjà le début de l’ascension. A peine 15′ de course et je suis en nage, complètement essoufflée, les jambes coupées, les bras lourds et la foulée pesante. Au sol les pierres sont glissantes, l’herbe est humide et mes appuis très instables : je glisse, ça m’irrite un peu parce que ça me rappelle des mauvais souvenirs (chute sur le trail courir pour les pommes), j’ai peur de tomber, je ralentis. Stéphanie Duc et Christel Dewalle sont déjà loin (mais ça c’était prévu !), j’avais Aline Coquard en ligne de mire un moment, mais pour le coup je n’avance pas, je ne la vois plus (je finis seconde à 4′ derrière elle au Gruissan Phoebus Trail, je m’étais dit qu’il fallait que je l’accroche si j’étais dans un bon jour). Cathy et Laurent Ardito du Team Asics m’encouragent au 7ème kilo : « 5ème féminine » !
Les choses sérieuses démarrent ici, on est à 800m d’altitude et on doit grimper à 1840m pour atteindre le sommet du télésiège qui est placé aux environs du 14ème kilomètre. Je ne suis pas au mieux mais je reste confiante, ça peut se débloquer dans la montée comme ça m’arrive parfois. Objectif : conserver ma 5ème place en haut de cette première ascension, ça serait top ! Je me concentre, j’écoute mes sensations mais elles ne me disent pas des choses très positives … Mal au ventre, les jambes molles, pas de jus … Je n’arrête pas de boire, mais je sens que je suis de plus en plus lente et vraiment sans force. L’ascension est un véritable calvaire ! Je me fais doubler par une féminine, puis 2, puis 3 ! Je me fais pitié tellement je n’avance pas ! Habituellement je cours dans ces dénivelés mais là, impossible, je marche tant bien que mal, les mains sur les cuisses en me répétant : « ça va passer, allez, accroche toi, ça va passer !! » Et bien finalement, j’ai subis jusqu’en haut. Le panorama est exceptionnel, on se retrouve même à courir dans la neige, mais je n’arrive pas à savourer tellement je souffre. A peine 1/3 du chemin parcouru et je n’arrive plus à lever les pieds … A ce moment là je n’avais qu’une chose en tête : « ne serait ce pas plus raisonnable de mettre le clignotant au ravitaillement » ?
Arrivés au sommet (1841m), nous basculons vers la descente. Je suis à sec depuis déjà un moment, j’ai super soif mais le ravitaillement n’est qu’au 19ème kilomètre. J’ai complètement décroché dans la tête, je sais que ce n’est pas une solution mais je n’ai vraiment rien dans les jambes là. il fait chaud, mais je n’y pense même pas, je suis concentrée sur mes appuis pour ne pas tomber. La descente n’est pourtant pas technique, le chemin est large, mais comme je ne lève pas les pieds, le risque est grand de me retrouver le nez à terre ! Encore une féminine qui me double dans la descente, je n’essaye même pas de riposter, je l’encourage et la laisse me distancer … Fou ces sensations aussi pourries !! Le son des cloches, du bruit, des encouragements, le ravito de la Sambuy n’est pas loin, j’espère y voir Cathy et Laurent du Team Asics pour leur dire que je pense plus prudent d’abréger mes souffrances ici …
Je les cherche des yeux, « au secours, sauvez moi ! » Ah Laurent est là, il me tend un bidon, je lui dis timidement (et honteusement !) que ça ne pas du tout, que je n’ai rien, pas de jus, pas de jambes et que j’ai presque envie d’en rester là. Il écoute, me regarde et m’encourage : « allez continue un peu, on te récupère dans quelques kilomètres si ne va vraiment pas ! » Ok, ok, je continue alors. Je lui réponds ok mais dans ma tête je n’y suis plus, j’ai carrément lâché et je suis encore plus désespérée quand je pense que nous ne sommes même pas à la moitié … A ce moment là je suis partagée entre l’envie de tout arrêter et de continuer quitte à la faire complètement en dedans. Je sais que je n’ai que quelques minutes de réflexion, puisque je retrouve le camion Asics sur le bord de la route peu après : « ça va mieux ? » me demande Laurent ? « non, j’suis KO mais j’ai envie d’aller au bout. Je vais poursuivre tranquillement« , je lui réponds. C’est à ce moment là qu’une deuxième partie de course commence … Nous sommes au km21 et je pense être en 12ème position !
Une fois la décision prise, il fallait reconnecter le cerveau, il restait encore peut être le plus dur à faire, mais il était nécessaire de se remotiver et se remettre dedans, la course n’était pas finie ! Je bois beaucoup, mon second bidon est plus sucré que le premier, je sens radicalement la différence et ça me fait un bien fou ! Étais je en hypo toute la première moitié ? Bonne question ! En tout cas, je retrouve mes jambes et le mental revient avec … J’enclenche la seconde, ça grimpe bien, on entame la seconde ascension vers le chalet de la Sarve. Je cours à bonne allure, je double un paquet de coureurs qui marchent, je me sens bien. Je rattrape la féminine qui m’avait doublé dans la descente, je l’encourage, elle me répond « ça va mieux on dirait toi, c’est à mon tour d’avoir un coup de mou ! » Je poursuis tranquille en gardant en tête que la montée va encore être longue. Un point d’eau, je remplis sans m’attarder, pas de temps à perdre, j’en ai déjà plein en retard !
Je double une seconde féminine, puis une 3ème. S’en suit une longue portion de sentiers étroits alternant montées puis descentes, le genre de parcours qui me plaît bien. Je suis seule, j’ai distancé le petit groupe avec les filles derrière moi, pourvu que ça dure. Je bois, je mange, pas envie de me retrouver dans la situation du début de course. Je reste vigilante aux balisages, mais à un moment donné je prends conscience que je fais fausse route : demi tour ! La suite et fin de course ont été relativement régulières et les kilomètres se sont enchaînés sans vraiment trop de peine (par rapport au début !). La variété des paysages, les bénévoles et supporters sur le côté, les coureurs de l’autre parcours (Trail des Sources du Lac) rencontrés … autant de choses qui, à ce moment là, aident à avancer ! Mais j’ai pris trop de retard, je n’arriverais pas à recoller … 3km et c’est l’arrivée !
Le résultat ne sera pas brillant, mais je vais la passer cette fichue arche d’arrivée !! Restait maintenant plus qu’à dérouler et à continuer d’essayer d’aller chercher … J’ai pourtant tout donné quand j’ai vu une place à gagner dans la dernière ligne droite mais ça n’a pas été suffisant, je suis arrivée quelques secondes après. Heureuse d’en avoir enfin terminé, soulagée d’avoir (un peu) sauvé les meubles en seconde partie de course, consolée de retrouver ma moitié, mais très déçue d’avoir ce sentiment d’être complètement passée à côté. Je finis finalement 8ème féminine et 91ème au scratch sur 531 partants. La suite me donnera quelques explications sur cette contre-performance puisque je traîne depuis la course une bonne crève …!
Sylvaine CUSSOT
(Crédit photos : Jean Louis BAL)
Résultats du Trail de Faverges, 44km.
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