Première participation à cette course renommée dans mon secteur géographique : 29ème édition et un palmarès exceptionnel. Cela fait plusieurs années que je m’y intéresse, mais les années auparavant, je donnais la priorité à la piste et une préparation 1500m n’est pas vraiment compatible avec une course comme celle-là : La Montée du Poupet.
Par contre cette année, avec ma prépa marathon, je disposais en théorie du foncier, du travail de seuil et de la caisse nécessaire pour cette épreuve. Je comptais miser sur une entame de course «prudente», et produire un effort contrôlé pour prendre du plaisir plutôt que de subir.
J’appréhendais les 2 descentes, j’avais peur de me ‘’casser les cuisses’’ ou de subir le rythme de concurrents plus efficaces que moi dans ce domaine. A mon arrivée, la météo est fraiche (9/10°C) et est très humide (ciel gris et sol trempé par une belle averse quelques minutes plus tôt). Parfait pour moi. Je croise des amis, notamment Damien VULLIN, un athlète que j’apprécie et avec qui je ferraille souvent (ses records officiels : 33’16/1h13’39/2h38’49 ; les miens : 33’14/1h13’09/2h38’42). Il avait terminé 21ème l’an dernier en 1h13’ (chaleur), il connait le parcours et me rassure un peu sur les descentes en me disant qu’elles ne sont pas vertigineuses. On récupère nos dossards dans une ancienne saline, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO (quand même !!). Je suis impressionné par la charpente du bâtiment. A proximité des dossards, une grande affiche avec le profil du parcours plante le décor. Les bénévoles sont chaleureux. Tout est OK.
H-40’, je m’équipe, soigne mon échauffement, chausse mes asics gel tarther, dépose mon sac dans les navettes qui montent vers le sommet après une dernière gorgée d’eau. Prend place sur la ligne de départ, je suis détendu, rien à voir avec le stress de mon semi ou de mon marathon. Je reconnais Willy Nduwimana, le détenteur du record de l’épreuve et plusieurs fois victorieux ici (RP 29’09 sur 10 et 1h02’12 sur semi), Emmanuel Nduwayo (RP 29’27 et 1h02’41), Eric Niyonsaba (- de 30’), Philippe Robin, Khalid Chahid, un Russe venu avec 3 féminines Russes de compète dont Helena SEDOVA (récemment 54’11 au 15 km du Puy en Velay malgré un soleil vif ce jour-là) … Bref, y a du gros !
Je n’ai pas d’objectif précis, je pense un peu à un top 20 et au niveau chrono, j’avais remarqué sur les précédentes éditions (sauf 2012 : trop chaud) que la plupart des coureurs réalisaient environ 3’/3’30 de moins que sur leur meilleur semi. Avec Damien à mes côtés sur la ligne on est d’accord sur le fait que 1h11’/1h12’ serait déjà une bonne course.
La course
Bang, c’est parti. Je fais tout aux sensations. Rapidement, la route se redresse et beaucoup de téméraires commencent à reculer. 3’35 au km 1 en montée douce, les jambes répondent, Damien est quelques places devant. 7’24 au km 2 (plus pentu). J’ai déjà trouvé mon rythme. Avec ma prépa marathon, je pense que j’ai amélioré d’un cran la connaissance de mon corps et aux sensations je détermine rapidement l’allure que je vais pouvoir maintenir. L’intensité de l’effort correspond à du gros seuil, avec un aspect musculaire différent quand même, il faut de bonnes cuisses et être bien synchro et relâché au niveau gestuel.
La première montée me parait longue, je grignote quelques places et passe les premières féminines à mi pente au km 4. Au poste de ravitaillement, j’attrape une petite bouteille de Vittel et m’hydrate et m’arrose, c’est plus facile qu’avec un verre souple. Au sommet du premier col, je bascule avec 2 gars du même club, Damien est 80 m devant avec Eric Mazimpaka. J’essaie de relancer pour recoller dans la descente. Je suis habituellement assez moyen en descente, mais de voir Damien devant m’occupe la tête, je ne pense pas à mes cuisses, aux secousses, à mes pieds qui claquent, je me concentre sur la chasse à mener et m’applique sur les trajectoires. Je m’épate moi-même ! Les 2 autres décrochent derrière et l’écart se réduit sur Damien et le kenyan, j’arrive à me libérer dans cet exercice. Je me sens vraiment très efficace. Au bout de 2 km je recolle (km 8.5 environ). Je reste avec eux, et la stupeur, Damien me dit : « Allé Séb, on fait une course monumentale, on est dans les 10 ». Confirmation 300 m plus loin, des spectateurs nous compte : 9/10/11. Wouaw !!
Au km 10 (ravitaillement + public nombreux) la route se redresse à nouveau pour la 2ème ascension, mais je ne peux pas suivre les 2, dès le pied, ils me distancent. Je ne m’affole pas, derrière c’est à 50/60 m. Je remets le régulateur sur le cran « seuil plus », option pente à 6 % pour les cuisses. Les 2 creusent un avantage au rythme de 8/10’’ au km. Ils sont plus forts. Pourtant je ne coince pas du tout, mon effort reste soutenu et maîtrisé. Je double un couple à vélo dans cette montée. La femme, jette un œil à son compteur et me dis : « pourtant je suis à 14 ». Oh ! (je pense, ‘redis moi-ça, ça fait du bien’ !). Au sommet, je suis seul, Damien et Éric sont une vingtaine de secondes devant. J’attrape à nouveau de l’eau et consomme mon gel. Puis je relance dans la descente, je la passe bien, mais je pense que les 2 compères devant ont pris soin de maintenir davantage vissé que sur la descente n°1, car je réduis beaucoup moins l’écart et la descente est par ailleurs nettement plus courte.
L’écart est pratiquement resté le même en bas, je vais donc finir 11ème, car je me sens capable de contenir les poursuivants dans le Mont Poupet. Montée que je ne connais pas. Un virage en épingle à droite, un public déchainé, un orchestre, un speaker, des marquages au sol, une pente à 10/12%… On y est ! Musculairement, du 6% et du 10/12% ça n’a rien à voir ! Avec la pente et la logique réduction de vitesse, tous les écarts se compressent. Mais 20’’, ça reste 20’’ !! Je mets le régulateur sur « je crame tout le plus linéairement possible sur le Poupet ». Devant Damien a décramponné Mazimpaka dès le pied et monte fort. Mazimpaka ne creuse pas sur moi par contre, et à mi pente, j’ai même la légère impression qu’il faiblit. Il n’explose pas, mais faiblit. Je toute façon, moi j’ai paramétré mon régulateur, je n’ai qu’à poursuivre comme depuis le pied, je sue à gogo, je respire fort et je regarde devant… 50 m… 45 m… (…) juste avant le 17ème km je suis au contact. Il s’accroche, 150 m (c’est long dans le Poupet !), puis cède : enfin !!
Je suis content d’en finir ! Ma puce bug au passage sur la ligne. Damien m’attrape après la ligne. On se félicite mutuellement et on réalise parfaitement le niveau de notre prestation : INESPERE ! J’ai 1h08’29 sur ma montre et 17.180 km au Garmin, soit 15.1 km/h là-dessus. Avec Damien, on est tous les 2 d’accord sur le fait que ça vaut assurément moins de 1h14’ au semi. On est heureux. Willy gagne, one more time, 8’ devant moi (ça calme !). Le Russe est 3ème, Sylvain DODE 4ème, les autres burundais font, il me semble 5 et 8. Philippe Robin, 4ème en 2012, et auteur de 2 semi en 1h11’ cette année fait 1h06’22 (6ème), le 7ème est Khalid Chahid du Dijon UC. Je rentre très satisfait, 10ème sur près de 1000 concurrents, à 15.1 km/h de moyenne, et surtout : je me suis senti solide au seuil + j’ai fait de bonnes descentes : Youpi !
Sébastien Larue
Résultats de la Montée du Poupet 2013
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