Buis les Baronnies, un village de la Drôme Provençale idéalement situé, aux pieds du Ventoux et entouré d’un paysage de montagnes juste majestueux !
C’est d’ici que partent et arrivent tous les coureurs du Trail de la Drôme Lafuma qui a eu lieu le WE dernier. Une course magnifique à laquelle j’avais déjà eu la chance de participer l’an dernier. Et après y avoir goûté, on est obligé d’avoir envie d’y retourner, même si c’est un trail difficile et exigeant et qu’il nous en fait bien baver …
3 parcours sont proposés, 11km (530D+), 21km (1000D+) et 37km (1800D+), et chaque année de nombreux coureurs viennent s’y frotter, et pas que des mauvais …!
Le plateau est relevé, sans doute aussi parce que le 21km est une manche du TTN (Trail Tour National). Encore du beau monde annoncé pour cette édition 2013. Et un beau WE de printemps en prévision, ça s’annonçait plutôt bien pour les coureurs et les organisateurs cette histoire …!
Une ambiance chaleureuse sur le village de Buis les Baronnies dimanche matin
Pour ma part, après m’être essayée sur le 21km en 2012, je décide de basculer sur le 37km cette année, tout en sachant qu’il va me falloir m’accrocher ! Toutes les coureuses du team Lafuma sont annoncées, ça va galoper vite devant. Et puis les gros dénivelés, ce n’est pas vraiment ma spécialité. Je bosse dur pourtant pour mieux les encaisser mais mes cuissots ont encore quelques progrès à faire je crois. Bref, dans tous les cas, c’est toujours une bonne expérience à prendre, même si j’ai pas mal enchaîné en début de saison et que je ne prévois pas une grande forme ce dimanche là, étant donné mon état de fatigue ces derniers jours. Direction la Drôme Provençale donc sous un soleil de plomb et une belle chaleur de printemps !
1600 traileurs se sont retrouvés dimanche matin sur la place du village de Buis les Baronnies pour participer à l’une des 3 courses au programme. Autant dire que la place était animée de bon matin … Qui plus est avec un Jean Pierre Buix au micro ! Départ commun pour le 21 et le 37, à 9h. le 11 partira une heure plus tard. Il fait déjà super doux, débardeur et short sont de rigueur. Ça fait quand même du bien de ne pas s’échauffer avec 15 épaisseurs sur le dos … L’heure du départ arrive très vite et rapidement les coureurs impatients s’entassent sur la ligne, pressés d’en découdre ! Je me faufile pour ne pas partir trop loin, Virginie Govignon à mes côtés, Nathalie Mauclair et Julien Jorro juste devant moi, ça sent le Lafuma tout ça !
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Une première bosse plutôt bien négociée après un démarrage poussif
Départ donné, à peine quelques mètres effectués et le parcours commence dangereusement à se resserrer, plusieurs coureurs évitent même de justesse de s’étaler … 2km de bitume pour lancer la machine, mais déjà on sent le faux plat montant. Je sais que je ne me suis pas assez échauffée et que je risque de le payer. D’ailleurs, quelques minutes après, je suis déjà asphyxiée ! Ok, il va falloir gérer parce qu’on n’est pas arrivé … Je ralentis légèrement, je me concentre sur ma foulée, ma respiration, je suis dans les talons de Karine Herry (team Lafuma), je vais essayer de ma caler ici. Les choses sérieuses démarrent, on commence la « vraie » grimpette. En file indienne, certains se mettent à marcher, je me dis : « oh non, pas déjà ! ». Je suis Karine qui tente de doubler sur le côté. Je me rappelle qu’un bon nombre de coureurs ne font que 21km, il ne faut pas se laisser emporter …
On grimpe, on grimpe, ça paraît long et ça l’est en effet … Et ça va même continuer jusqu’au premier ravito. 12-13km pour arriver au sommet si je me souviens bien. Les coureurs du 21 et du 37km restent ensemble jusqu’au 18ème km, lieu du 2ème ravitaillement. Du coup c’est vrai que les sentiers sont quand même bien chargés jusque là, pas toujours évident de doubler et de trouver son rythme sans se gêner les uns les autres. Il fait déjà très chaud et je bois beaucoup pour éviter la déshydratation. A la moitié de la première bosse, j’avais déjà bu la moitié de mon bidon ! Grosse erreur, je n’ai pas mis de casquette et pas de bol, on se prend le soleil en pleine figure … 9ème kilo, une voix connue : »allez Sissi !! » C’est Manu ! il n’a pas réussi à accéder au ravito du 11ème mais il est là pour nous crier dessus, c’est bon ! Il m’annonce 2ème derrière Nathalie Mauclair, ça veut dire que Karine Herry qui est toujours devant moi est sur le 21.
Pas de temps perdu au passage du ravitaillement, le second n’est que 7km plus loin mais il reste encore quelques dénivelés à grimper. J’ai quand même refait le plein d’eau, histoire de ne pas manquer. Je fais un bout de chemin avec Anne Claire Aveyrous du Ca Balma, mon ancien club. Elle est sur le 21km. Les écarts commencent à se creuser et les coureurs peuvent trouver leur rythme sans se gêner. Je me sens bien mieux, les jambes, le souffle, tout est revenu à la normal, ouf, c’est rassurant. Quelques alternances de montées, descentes, avant d’arriver vraiment au sommet et d’entamer les dénivelés négatifs pour redescendre vers Buis. Je m’efforce à lever la tête de temps en temps pour profiter de ce magnifique panorama qui s’offre à nous. Splendide !!
A la bascule, je suis toujours seconde, les voyants au vert. Bras lâchés, on peut enfin souffler … La descente passe très vite, 18ème kilomètre, second ravito, Manu est là pour m’encourager. Ça tombe bien, mon bidon était vide. Je lui tends le vide, j’en attrape un plein. « Super Sissi, t’es toujours 2ème, y’a que Nathalie devant ». A droite, les coureurs du 21km qui descendent vers Buis les Baronnies, à gauche ceux du 37km qui repartent pour la 2ème belle grosse bosse … Pas facile moralement mais il faut se remotiver, on n’est qu’à mi course, ce n’est pas le moment de faiblir.
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2ème bosse et l’arrivée de l’hypo …
On entame donc la 2ème bosse, toujours le soleil de face, il est super chaud. Je décide alors de m’arroser un peu le coup, la tête, le visage …Mais avec l’eau que je porte sur moi. Si javais su que j’allais payer cher ce que j’étais en train de faire … le prochain ravitaillement est loin, et cette eau, elle était sacrée. Oui mais à ce moment là, je n’y pensais pas. Bref, du coup, j’ai malheureusement très, trop, rapidement épuisé ma réserve et j’ai réalisé trop tard que j’allais devoir faire plus d’une dizaine de kilomètres, à sec ! Misère ! Je pensais avoir mis des gels dans mon porte bidon mais en fait non … Je n’ai rien à manger, rien à boire, j’le sens pas là… ça grimpe dur, il fait de plus en plus chaud, personne derrière, personne devant (forcément on a perdu un bon nombre de coureurs qui ont tourné à droite au 18ème pour boucler le parcours des 21), seule au monde avec ma misère… Le début du calvaire. Tant pis, je m’accroche, j’ai bien envie de la garder cette seconde place quand même ! J’alterne marche, course, c’est pentu ! Je sens malgré moi que je suis en train de gravement faiblir. La tête commence à tourner, je n’ai plus de jus pour avancer. Je me fais presque pitié … Nadia (team Lafuma) me double. Je l’encourage, elle me répond : « tu vas me redoubler dans la descente ». Non non, là ça m’étonnerait …
Je la vois s’éloigner de moi progressivement, la seconde place s’envole avec elle. Je passe donc 3ème. J’ai toujours une place sur le podium, il FAUT que je m’accroche. Je puise au fond fond de mes réserves et un instant je me demande si j’aurais vraiment la force d’aller au bout dans ces conditions. C’est dur. Aucune idée de la distance parcourue depuis le ravito du 18ème, je suis concentrée pour ne pas marcher et tenir, tenir … Au moins jusqu’au prochain ravito. J’ai trop soif ! Le haut de la bosse ne doit plus être très loin là … Quelques faux plats descendants, montants, et je pense que qu’on y est. Je me sens ailleurs, complètement déconnectée. J’aurais bien pu « mendier » un peu d’eau à quelqu’un, mais je déteste faire ça. On est tous dans le même cas et je paye mes erreurs, normal ! Je crois qu’on entame la descente quand j’entends derrière moi un souffle féminin. Virgnie Govignon (team Lafuma) ! ah non, c’est le podium qui va s’envoler là … Elle me double mais je n’ai vraiment aucune force pour m’accrocher, en hypo complet !
Je ne pense qu’à une seule chose à se moment précis, débrancher le cerveau et rallier le ravitaillement du 32ème pour essayer de faire remonter cette glycémie et retrouver un brin de peps pour pouvoir au moins aller au bout. Et si je peux conserver cette 4ème place ou reprendre un peu sur Virginie, tant mieux, mais à ce moment là, ma priorité c’était boire et manger ! J’aperçois au loin quelqu’un qui marche, on dirait Xavier Thevenard du Team Asics … Il a dû lui arriver quelque chose. A ses côtés je ralentis, « ça va Xav ? » Le pauvre, il a des ampoules sous chaque pied, impossible de courir sans souffrir le martyre, il va devoir mettre le cligno au prochain ravito. J’ose, je lui mendie un gel, j’ai honte mais c’est une question de survie. Haaaann il en a, merciiii Xav !! Hop, je le prends, sans eau, tant pis, je n’allais pas en plus lui piquer ses réserves, il est déjà assez mal comme ça le pauvre. « Courage mon Xav ! » Un peu de sucre me fait du bien et me permet de retrouver le rythme et la force de descendre à meilleure allure jusqu’au 32ème …
Les 5 derniers kilos les plus longs de ma vie
Mamamia, enfin, le voilà, la ravitaillement, mais qu’il a été long à atteindre !! Je me jette littéralement sur la première bouteille d’eau venue et je bois sans m’arrêter quasiment la moitié. Manu me tend les gels qui était restés dans le sac à dos (quelle bêtise !), une nouvelle gourde remplie avec de la boisson sucrée, je lui raconte vite fait mes malheurs : « non ça ne va pas, je n’ai plus de jus du tout, je ne sais pas comment je vais aller au bout là ». Il m’encourage : »allez allez, 5km et c’est l’arrivée !! Virginie n’est qu’à 1′ devant, tu peux la remonter ! » Sauf que j’ai tellement touché le fond que pour remonter ça allait vraiment être très compliqué … On va déjà essayer de terminer en limitant les dégâts. Et du 32ème au 35ème, ça monte sévèrement … Des gros rochers, les mains dessus pour les traverser, de la petite caillasse qui glisse sous les pieds, les dernières grosses difficultés avant les 2 derniers kilomètres de plats pour franchir la ligne d’arrivée.
On retrouve alors un peu de civilisation et quelques encouragements qui font du bien au moral. « Courage, 2km et c’est l’arrivée ! » 2 seulement ok, mais qui m’ont paru une éternité. Du bitume, du faux plat, j’ai les jambes et le corps qui n’en peuvent plus, c’est juste le mental qui me permet d’avancer. La voix de Jean Pierre Buix au micro, l’effervescence des différentes arrivées, et enfin, l’arche bleue … Des preuves que ça y’est, dans quelques mètres le calvaire sera bel et bien terminé.
Je franchis la ligne en 4h29, 3′ derrière Virginie et 7′ derrière Nadia. On va dire que j’ai limité les dégâts … Une grosse erreur dans ma gestion des ravitaillements que j’ai fortement payée bien évidemment mais qui feront aussi avancer pour la suite. C’est aussi dans les échecs que l’on apprend ! Malgré tout un parcours de toute beauté, et une organisation qui a, encore une fois, super bien géré. Une Nathalie Mauclair (team Lafuma) IMPRESSIONNANTE qui remporte la course d’une incroyable facilité et un Thomas Saint Girons (team Asics) heureux de rentrer avec une belle victoire en poche !
L’ensemble des résultats du Trail Drôme Lafuma sont en ligne sur leur site internet.
Sylvaine CUSSOT
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