Sébastien Larue, athlète du team i-run sponsorisé Asics, a réalisé une superbe performance dimanche dernier en explosant son record personnel sur semi marathon.
Il nous raconte tout ça dans les moindres détails !
Partie I : l’avant course.
« J’avais initialement prévu de faire le semi-marathon de VICHY, mais la course a été annulée cette année. J’ai donc regardé quelle autre épreuve courir pour préparer le marathon d’ANNECY. Il y avait le semi de BOURG LES VALENCES et celui de FEURS EN FOREZ, après avoir vu quelques photos sur internet des épreuves et l’architecture des 2 sites, je n’ai pas hésité à choisir FEURS.
Je scrutais la météo depuis quelques jours : les prévisions annonçaient 7/8 °C, vent 5 km/h, et pluie. Des conditions idéales pour moi, comme pour beaucoup. J’avais toujours en tête mon 34’40 à BLETTERANS il y a 2 semaines, dans la souffrance, la première fois que je chaussais mes asics gel tarther. Une énorme déception, car mes entrainements étaient bons et mes 3 derniers 10 km labellisés avaient été couru à plus de 18 km/h (Vénissieux 2011 33’14 ; Roanne 2012 33’18 ; Vénissieux 2012 33’15). J’espérais raisonnablement un 33’30/33’45. Cette course m’avait mis dans le doute, mais une semaine après des gars qui avaient couru à BLETTERANS (16°C, temps sec, soleil) ont recouru à VILLEURBANNE (météo pluvieuse + vent soutenu, 5°C) et ont nettement amélioré leurs marques, sans exception (un gars a fait 33’03 puis 31’58, un autre 34’13 puis 32’53…). Ça rassure… Un peu…
Je m’inquiétais aussi de la liste des inscrits, certes près de 800 coureurs, mais peu d’athlètes valant 1h14/1h15’. Ceci en raison d’un calendrier de compétitions surchargé en Rhône/Alpes – Bourgogne ce week-end. (Semi de FEURS – semi de BOURG LES VALENCES – 10 km THONON – 10 km CHAMBERY – 10 km CHALON – 10 km TASSIN – 10 km BOURGOIN. Toutes ces courses avec le label régional). Je sais bien que la densité et le niveau en Rhône Alpes sont très élevés et qu’il en faut pour tout le monde, mais là, c’est mal géré. Et le weekend prochain, aucune épreuve labellisée…
Cette semaine, je n’ai fait que du footing, le cœur n’a probablement pas dépassé le 145 BPM. J’expérimente (habituellement, la traditionnelle petite séance de rappel qualitatif pour ‘dérouiller’ les jambes en milieu de semaine). La veille de la course, je me suis gavé de pâtes pour avoir du carburant et ne pas caler le moteur après le 16ème km. Mais j’ai un peu abusé samedi soir, tellement que j’en ai très mal dormi, l’estomac surchargé. Le jour J, je suis réveillé très tôt, vers 4h15/4h30’. Je traine un peu, puis debout vers 5h (départ 9h30’) pour le dernier repas : café, barres gerblé, banane, 2 verres de vittel. Je traine encore, puis m’équipe et prend la route (1h30’ environ). Une petite pluie fine et un temps gris et frais m’accompagnent tout le trajet.
Sur place, tout est carré au niveau de l’organisation, de la bonne humeur chez les coureurs, nombreux, la pluie a cessée… Tout est OK. Dossard 692, échauffement soigné, seul. 9h20’, la tension monte, je chausse mes asics gel tarther pour la 2ème fois, en repensant une dernière fois à Bletterans et mon misérable résultat. Une dernière gorgée d’eau pour mouiller la langue, quelques accélérations relax allure 10 km (18 km/h), puis je me range sur la ligne. Mon record est de 1h14’39 en septembre 2011 (pour mon premier semi), et en février 2013, j’avais fait 1h14’46 sur un parcours vraiment exigeant et mesuré, certains coureurs m’avaient d’ailleurs dit : « tu vaux une minute de moins sur un parcours top ». Vite dit… Je pense vaguement à un 1h14’20/1h14’30 au départ, et décide de me concentrer sur les sensations et la régularité. La montre est OK, c’est quand ils veulent…
Partie II : Le semi-marathon.
Bang ! Ça part correctement… C’est rare. Aucun kamikaze et aucun avion de chasse. Sans doute occupés ailleurs où les enveloppes sont bien garnies (en Rhône-Alpes, ils y a des « managers » qui font venir en France des athlètes burundais ou kenyans au printemps et en automne pour qu’ils écument les course labellisées, et se servent sur les primes récoltées). Je suis en 3ème position au premier km, 2 athlètes ont 10 m d’avance. 3’26. Impec. Les jambes sont là. Je pense déjà à une belle place au scratch, mais je viens pour me tester et faire le meilleur chrono possible, donc, si je suis seul, ça va être compliqué. Je connais un seul gars à proximité, plus fort que moi (Maxime THIBAUD 32’07 au 10 km de Roanne 2012), je me dis : « tiens, il doit le faire en séance marathon ». Je recolle sur les 2 de devant, me sens bien et passe devant pour mener à mon tour. A ma surprise, ils me laissent filer petit à petit. Même les ouvreurs à vélo sont incrédules.
Km 2 : 6’48 (+ 3’22)… Je suis trop vite par rapport à mes allures habituelles, mais je décide de poursuivre à cette intensité, me sentant bien. Je me dis même : « Tu vas peut être la gagner celle-là ». Km 3, seul, 10’12 (+ 3’24). Ça se passe bien. J’entends que ce n’est pas bien loin derrière. Km 4 (3’28’’5) un gars recolle, celui qui avait mené le premier km. Il reste derrière. 500 m après, je demande entre 2 souffles : « objectif ? » Il me dit « 1h12’/1h13… » Ha… Il reste derrière, devant je m’applique sur les trajectoires, les zones de la routes les plus favorables… Km 5 : 17’07 (+3’25). Pour moi, c’est énorme comme temps de passage sur semi. Les sensations restent bonnes, même si je sens que ça va être dur de maintenir cette allure. Au km 5.5, un mec en bleu recolle. Je demande « objectif ? », il me dit « 1h13 ». Ha… Ce dernier passe devant, et imprime un rythme 2/3’’ au km plus rapide, je cède rapidement et il emmène avec lui celui qui m’avait accompagné du km 4 au 6. Me voilà seul… Hoho ! J’essaye de courir avec régularité, le parcours très plat et l’absence de vent aident. Je continue à « taper » les km, tout entre 3’28 et 3’31. Faut tenir comme ça le plus longtemps possible…
Au km 8 (27’38), le mec en bleu se fait contrer et semble légèrement marquer le coup. J’essaye de revenir, mais il y a 30/40 m à boucher, et je grignote vraiment peu. On n’est pas encore à la mi-course, et je sens déjà que la 2ème boucle va être vraiment dure… Au km 10, il relance devant un peu de public au début de la 2ème boucle (un peu plus grande que la précédente) et s’en va, j’ai compris… Je passe en 34’35. Très satisfait, mais je crains la suite… Soudain, un peu derrière, j’entends 2 montres bipper, et j’entends juste après « 34’38, un peu lent, faut relancer… ». Je pense alors « si tu accroches ces 2 gars un moment, ça forgera un joli chrono ». En 300 m ils établissent le contact. Passent, 1, 2, 3, 4 mecs (dont Maxime THIBAUD et Damien GONCALVES) !! SI J’AVAIS SU (qu’il y avait un petit groupe en chasse derrière moi) ! Km 11 : 38’05 (+3’30). Je me cale en dernière position et je serre les dents, je sais déjà que tôt ou tard, je vais sauter du groupe. Et peut-être même avant le km 12… Car c’est dur, et on attaque seulement la 2ème moitié…
Les gars sont très réguliers, et passent bien leurs relais. C’est vraiment le bon wagon, faut tenir le plus possible. Au km 13 (45’05), je cède quelques mètres avec un autre gars, je me dis : « Au moins on est 2 à lâcher, c’est mieux que finir seul ». Devant, ils ne prennent pas davantage que 10 m, alors nous recollons péniblement et provisoirement. Je suis vraiment à la limite, 1’’/km plus vite et je saute par l’arrière… Mais on est toujours 5, il faut que je tienne le plus possible. Km 14 48’31 (+3’26). 2/3 de fait, je peux encore exploser. Les gars ne relâchent pas. Km 15 52’00 (je me dis, « même en faiblissant, la fin en 22’ c’est jouable, donc 1h14’00 »). J’espère presque que l’autre gars à la limite se relève un peu pour pouvoir souffler. Mais il s’accroche aussi. Je repense à une phrase de Séb CHARNAY : « sur un marathon, il y a des moments plus difficiles que d’autres, il faut le savoir et faire avec». Les gars relancent encore. Km 16 55’25 (+3’26), mes jambes brulent doucement… Encore 5000 m… ça ne tiendra pas.
Km 17 : 58’52 (+ 3’27). A ce moment-là, je repense à mes sorties longues, lors desquelles, sur mes 3 X 15’ allure marathon, je couvre entre 4000 et 4050 m. Je me dis : « même en coinçant il reste maxi 15’, ça fera 1h13’52 » ! Je suis toujours au contact, en souffrance. Km 18 : 1h02’18 (+3’26), c’est imminent, je vais être lâché… Mais un gars qui passait les relais s’écarte et rétrograde inexorablement, ça m’occupe l’esprit quelques hectomètres « on est tous pareil, à la limite ». Je repense à ce 1h02’18 au km 18 et j’espère finir en 11’ les 3100 derniers mètres. J’insiste encore. Maxime coince à son tour ! Ça motive ! Je ne pense même pas à mon gel énergétique. Au 19ème : 1h05’48 (+3’29). J’entends au loin la voie du speakeur qui annonce une belle lutte pour la 3ème place. Le petit groupe éclate, je suis en 5ème position, un gars 15 m devant et un autre encore 15 m devant. C’est le dénouement. Je vois au loin un truc blanc sur le bord de la route… Le 20ème… « Allé !! Donne encore !! ».
Je réalise un moment que je ne vais peut-être jamais avoir une telle météo, une telle forme, un tel groupe, une telle occasion de faire un gros coup sur semi. J’essaie de relancer, je me dis « puise en toi », mais je n’ai plus rien, la foulée se dégrade, je perds le contrôle de mon souffle, l’acide commence à remonter dans les bras, ma tête veut aller en arrière… Je reviens néanmoins sur le 4ème, le passe, et enclenche une tentative de finish pour jouer la 3ème place. Je vois au loin 1h12’45, 46… Je jette tout, le 3ème se retourne, il me sent revenir… Sur la ligne, je termine à 1 mètre de lui, je tape la montre. 1h13’09. Record explosé ! Je titube, la respiration sifflante, je suis démonté… Mais voilà probablement ma plus belle performance en course à pied. YES ! Hoooo happy Day !!
Ça efface la mauvaise course de BLETTERANS et ça valide le travail et les bonnes sorties de la prépa marathon. Je vais savourer cette énorme satisfaction et continuer à préparer le gros objectif printanier du 21/04. Je me suis définitivement réconcilié avec mes asics gel tarther ! Le vainqueur Khalil ZAHNOUNE s’impose en 1h11’26 (ex record à 1h12’22 à NANCY 2012), le 2ème réalise 1h12’34. J’espère que les copains profiterons eux aussi, comme ils l’espèrent, de ces excellentes conditions atmosphériques.
Le parcours est plat, plaisant, l’organisation est bonne et les résultats ont été affichés très vite. Je reviendrais. »
crédit photo : organisation