Une idée bien ficelée
J’avais depuis longtemps l’idée de découvrir cet Écotrail de Paris qui m’intriguait, non seulement par son parcours mais aussi par l’intérêt croissant qu’il génère chaque année. Avec la volonté dans un premier temps de suivre Erik Clavery pour mon club, son forfait ne m’a cependant pas empêché de faire le déplacement, bien que la météo maussade cherchait à mettre à mal mon organisation.
J’étais donc parti pour suivre le 50 Km, plus simple à suivre que le 80 Km vous vous en doutez.
L’occasion également de venir encourager Sylvaine Cussot qui endossait un maillot sur cette distance pour un dernier objectif hivernal, avec en prime un départ prévu dans les jardins du Domaine de Versailles que j’affectionne tant. En fin stratège que je suis (ou pas) et un planning convenablement ficelé, j’avais opté après maintes réflexions pour me poster au départ, à l’arrivée et aux deux ravitaillements du parcours en me déplaçant en RER. Pensant d’abord au vélo, j’ai vite écarté cette option en décelant ses inconvénients, à commencer par le risque de se perdre au milieu des bois, d’en faire un vrai fardeau dans les bouches du métro, ou d’être trempé par une éventuelle météo catastrophe. Sécurité avant tout, nous mettrons donc à contribution nos chers chemins de fer régionaux !
Arrivée à Versailles le matin pour un départ prévu à 10h45. Malgré un vent glacial et des températures fraîches, la pluie n’était pas au rendez-vous et je prenais de nouveau mon pied à évoluer au sein des jardins du château, pour une raison plutôt insolite cette fois-ci. Et pendant que nos Louis de France s’adonnaient à leurs footing quotidien entourés de leurs reines et de quelques touristes japonais, je m’engouffrais un peu plus loin dans le domaine en suivant les sportifs équipés de la tête aux pieds, prêts à affronter 50 bornes de sentiers et de chemins dans la région parisienne.
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Mon jardin de Versailles
Derrière les grandes haies et les bosquets taillés au peigne fin se cachait un troupeau multicolore bien vivant qui s’apprêtait à être lâché autour du grand canal de Versailles. Derniers réglages, vérification des ravitaillements et du matériel obligatoire, échauffements (ou réchauffement avec une boisson chaude), entassement des sacs dans une navette pour Paris et le coup de feu était donné. Des allures de chasse à court régnaient sur la zone de départ au son des cors conviés pour l’événement. Il ne manquait plus que Louis XIV à cheval pour arbitrer les débats. La place était ainsi toute trouvée pour l’impératrice Sissi qui nous promettait de jouer les premières places après un excellent début de saison.
Mon prochain point de rendez-vous n’étant qu’à Chaville pour le ravitaillement du 28e kilomètre, j’ai pris le temps d’arpenter les allées du jardin pour réaliser quelques prises de vue, avec en fond de toile cette longue ligne de traileurs qui s’animait au bord des bassins. Les premiers kilomètres dévoilaient déjà un sérieux peloton de tête, puis les 1300 coureurs suivaient derrière avec autant d’objectifs personnels, du plaisir d’une balade entre potes au défi du finisher, en passant par l’épreuve cruciale du programme de début de saison pour d’autres. Des ambitions qui se devinaient aux postures et aux démarches des athlètes, parfois droites et sérieuses, ou aux regards plus détendus et souriants. Mais c’était le début pour tout le monde, et il restait encore plus de 40 Km à parcourir.
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Un changement de cap inattendu
Direction Chaville pour mon 2ème Check-point, où j’allais rencontrer mon partenaire privilégié avec qui je partagerais le reste de l’épreuve, et qui n’était autre qu’Emmanuel Gault le compagnon de Sylvaine. A défaut de pouvoir courir cette épreuve qu’il connaît sur le bout des doigts (victoire en 2009 puis 3 fois 2ème en 2010-2011-2012), sa motivation et son énergie ont vibré au rythme de la course de sa protégée. Ma couverture générale de l’épreuve allait finalement se muter en un suivi personnalisé de notre représentante i-Run de talent avec un reportage complet. Une course dans la course toute aussi prenante et un choix que j’ai tout sauf regretté ! Saisir ces instants privilégiés de l’intérieur leur donne une saveur toute particulière lorsqu’ils nous tendent les bras.
Les premiers étant passés, dont Benoît Nave, le futur vainqueur, je m’étonnais de l’importance des écarts qui s’étaient formés depuis le départ. Les hommes aux avant-postes se retrouvaient souvent seuls dans les bois de la région parisienne. Sylvaine se faisait attendre autour de la trentième place. Le temps est toujours long dans ces conditions, et chacun scrutait au loin les indices de son arrivée. Elle apparaissait finalement derrière un petit groupe au terme de 2h24 de course. Première féminine, le regard serein, une santé physique et morale au beau fixe, tout allait pour le mieux pour la néo-traileuse. Deuxième lors de la première manche du TTN au trail de Gruissan sans forcer, ce parcours plus roulant ne pouvait que lui convenir.
Un parcours qui donne envie. Les tracés exploitent au mieux les domaines forestiers et parcs de l’ouest de l’île de France. Seule la dernière portion sur les Quais de Seine laissent les coureurs sceptiques avec ce brusque changement en milieu urbain au sein duquel il est difficile d’évoluer. Les terrains étaient un peu gras et glissants, mais pas de bourbier redouté suite aux chutes de neige des jours précédents qui menaçaient le bon déroulement de la compétition.
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Le stress inéluctable
Changement de poste en voiture électrique, Écotrail oblige, aux côtés de mon nouveau camarade de route pour rejoindre le second point de ravitaillement situé au 40e Km, dans le domaine de Saint-Cloud qui offrait une vue imprenable sur la capitale. Un lieu qui m’était inconnu jusqu’alors.
Nouvelle attente de Sylvaine, et je me prenais au jeu de cette tension et du stress qui accompagne cette attente, surtout lorsqu’il s’agit d’une athlète qui se bat pour la victoire comme me le rappelait tout justement Emmanuel. Suivre de l’intérieur et au plus près des athlètes engagés dans une aventure créé toujours de moments d’attache et d’immersion, à l’image d’un rendez-vous crucial de sport collectif où l’on vibre pour les joueurs. Plusieurs de ses articles font mention de ces expériences atypiques. On s’étonne presque d’entrer si vite dans ce petit monde étonnant et un peu stressant : l’attente, les nouvelles, la recherche d’infos… Je me souviens de la Diagonale des Fous d’Erik Clavery l’an passé où les impressions étaient similaires sur les réseaux sociaux, assis devant mon écran d’ordinateur. Mais rien de tel que de vivre l’instant présent en direct !
Les écarts étaient toujours importants en tête de course, et l’on croisait ces visages familiers qui précédaient l’arrivée de Sylvaine et annonçait indirectement son approche. Elle pointait toujours en tête, au bout de 3h30 de course, la fatigue en plus mais toujours sereine. La 2ème féminine se situait alors à 5 minutes. Une avance relativement confortable si Sylvaine maintenait son rythme jusqu’à l’arrivée. Je tente quelques vidéos maladroites dans le feu de l’action. Tant pis pour la finesse et la précision de l’image.
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Le plaisir du partage
10 Km nous séparaient désormais de l’arrivée sur le Quai Branly au pied de la Tour Eiffel. Dernière navette pour nos âmes d’accompagnateurs aguerris qui vivaient au rythme de la performance de la traileuse en herbe. La famille d’Emmanuel Gault était au rendez-vous, fidèle au poste depuis plusieurs années, prête à accueillir la première féminine de ce 50 Km. Mais avant-cela, une dernière ligne droite de 9 Km le long des Quais de Seine attendait les coureurs comme un dessert empoisonné. Une ligne droite interminable avec la Tour Eiffel synonyme d’arrivée en ligne de mire, et des passages sur le bitume à casser les pattes. Une dernière difficulté finalement passée sans encombre et un joli succès pour Sylvaine qui bouclait cette promenade pédestre en 4h25. De belles émotions sur la ligne d’arrivée, des yeux humides, des mots de félicitation qui fusent et des coups de fil pour annoncer la bonne nouvelle. La récompense d’un bon potentiel sur le trail et les longues distances. Pas de triomphalisme, mais la satisfaction du travail qui paye et du sérieux de l’entraînement. Versailles-Paris, c’était le voyage du succès en ce mois de mars 2013.
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Le corps tremblotant, l’appel du repas chaud et d’une bonne douche se laissaient désirer comme le plus beau des trophées après cette arrivée victorieuse. Instants partagés dans le village de l’organisation et au moment du podium pour conclure cette belle journée aux côtés d’athlètes généreux, sympathiques et attachants.
N’allez pas croire que la niaiserie m’emporte, mais la sensation d’avoir recueilli une grande bouffée d’air et d’énergie était plus que certaine. Qui l’eu cru à Paris ?
Rémi Blomme
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Retour sur cette matinée en vidéo …
Versailles-Paris, un aller simple vers la victoire from Rémi Blomme on Vimeo.