On adore tous courir. On préfère en général être dans la foule des coureurs que sur le bord de la route avec celle des spectateurs.
Pourtant de mon côté, j’aime bien être sur le bord de la route aussi. Pas de stress d’avant course, d’échauffement 45 min avant l’heure du départ, pas d’inquiétude de dernière minute où d’un seul coup tu as envie de faire pipi mais tu ne veux pas trop t’éloigner… Imaginez un peu: vous entendez le speaker au loin annoncer le départ imminent de l’épreuve. Vous vous cachez tant bien que mal entre deux voitures, vous faites ce que vous avez à faire, et puis l’horreur… on est parti sans vous!! Quel mauvais rêve!
Bref! L’autre fois je me suis retrouvé comme spectateur sur une course. C’était un 10 km, il pleuvait. Mais j’avais quand même une petite tension intérieure parce que je vais voir les premiers arriver, je vais pouvoir « lire » le déroulement de la course de l’extérieur, voir leurs visages, les défaillances, les remontées inattendues, toutes ces choses qui font le charme de ce sport. Et j’allais être servi!
Premier passage, je suis vers le 2è km. Le premier arrive, puissant, dynamique, il est bien dans son effort. Le second ne doit pas le connaître car il tente désespérément et avec une certaine souffrance de le suivre, c’est un solide devant. Tactique qui ne marchera pas bien entendu. Puis derrière, ça défile. Je vois que des groupes sont déjà formés. Moi, je suis armé de mon appareil photo, je mitraille! J’adore les photos de sport. C’est beau l’effort sur le visage des gens! Les grimaces, les rictus… Je vois si les gens sont concentrés, s’ils regardent droit devant eux, ou à l’inverse lancent des coups d’oeil derrière. Je vois passer aussi les copains et les connaissances! L’un d’entre eux -c’est le comble- me demande si ça va! Peut être a-t-il cru que j’étais blessé… Ceux qui ne me connaissent pas voient tout de même quelqu’un qui les prend en photo et qui les encourage, on voit que ça leur fait du bien. Je vois, malgré l’effort, des sourires. C’est gé-nial!
Deuxième passage, je suis au même endroit, 8è km. Les écarts sont faits, ils sont plus importants qu’à l’aller. Je sens que les groupes qui se sont constitués sont comme soudés dans l’effort. Au début, on essaye de faire sa course, à la fin, on s’entraide pour en terminer. Je n’ai pas bougé d’endroit, et ça leur fait du bien de voir quelqu’un! Je suis le seul dans cette ligne droite. Je continue à mitrailler car j’ai un peu plus le temps de m’appliquer. Je me disais que je pourrais les diffuser sur mon blog comme ça les gens pourraient retrouver leur photo! Le défilé continue, la tête baissée vers le sol pour certains, le regard vers l’objectif pour d’autres. Bien sûr, tous ne sont pas là pour les mêmes raisons. Mais que ce soit en 35 min ou en 55 min, l’implication est la même pour ceux ou celles qui veulent performer. Les autres accompagnent quelqu’un ou partage l’aventure d’un 10 km tout simplement, de façon détendue. Une fois qu’ils sont tous passés, direction l’arrivée pour discuter avec un peu tout ce monde, où chacun explique sa gestion de course, ce qu’il a aimé ou pas aimé… c’est top!
J’étais aussi spectateur lors de la grande course des Templiers. Il fallait en vouloir pour s’exposer au vent, attendre les coureurs parfois pendant plus d’une heure alors qu’il faisait -3°C, et malgré toutes ces couches de vêtements, ça ne suffisait pas… Le froid était plus fort… Mais à chaque fois que je suis sur le bord, je me dis que les coureurs ont énormément de mérite de produire un effort pendant plusieurs heures et dans ces conditions. Et nous, la moindre chose que l’on puisse faire, c’est les encourager, faire du bruit! Des heures dans la souffrance et enfin un peu de chaleur humaine, malgré les traits tirés on nous remercie. Comme ce petit qui a la bonne idée de taper dans les mains des coureurs sur leur passage… C’est quand même chouette des moments comme ça!
Même à l’entrainement, c’est pas mal d’être spectateur. L’autre fois je suis allé au stade mais j’étais en repos car je commençais à faire du jus pour la compétition à venir. Et je me suis pris à observer le groupe, l’effort de chacun, et surtout leurs attitudes, leurs foulées. Et là encore une fois, je me suis régalé, car je comparais les styles, les allures. Le grand avec une foulée étriquée, le cycliste qui « mouline », celle qui court en forçant et en grimaçant, celle qui déploie sa belle et longue foulée dans le sprint final… Bref, une multitude de choses à observer de l’extérieur, qui sont sans doutes des répercussions de l’effort, de la souffrance, d’un certain type de gabarit, de blessures anciennes, que sais-je! Tout ce qui peut rendre efficace ou non-efficace cette marche en avant, cette dépense que chacun décide de produire selon ses propres motivations.
Quelques fois aussi, il est bon de se poser et de prendre le temps de regarder!
Mathieu BERTOS
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