Nous l’avons souvent dit et ne cesserons de le répéter encore et toujours : les préparations spécifiques sont une chose et l’année du coureur en est une autre.
On ne prépare pas un ou plusieurs 10 km en 4 à 6 semaines comme on ne prépare pas un marathon en 8 à 12 semaines.
Quelque-soit la distance visée, le pic de forme, parce que c’est bien de cela qu’il s’agit, ne s’atteint pas en quelques semaines.
Ce dernier demande une vraie planification avec l’alternance de périodes et de cycles d’entraînement comme de récupération.
Bien programmer son année de running
Un coureur visant la distance marathon peut envisager deux pics de forme dans l’année, (le plus souvent au printemps et à l’automne). Un coureur de 10 km et/ou de semi-marathon peut quant à lui envisager 3 pics de forme (par exemple Début Mai, Mi-Août et Fin Novembre).
Pour atteindre ces pics de forme, il va falloir dans un premier temps chercher à augmenter les capacités physiques, et donc s’entraîner, de manière fréquente et progressive, tout en s’organisant des périodes de récupération nécessaires.
A ce titre, la méthodologie de l’entraînement prévoit d’enchaîner quelques semaines d’entraînements après lesquels suit une semaine de récupération. Généralement, le rapport est de 2 à 3 semaines d’entraînement consécutives pour 1 semaine de récupération.
La planification de l’entraînement doit se découper en 4 périodes bien distinctes :
- La période de préparation générale
- La période de préparation spécifique
- La période compétitive
- La période inter-compétitive ou régénération
Au cours de ces différentes périodes, on assiste à une évolution permanente de la charge de travail tant du point de vue quantitatif (volume) que qualitatif (intensité).
La période de préparation générale
La période de préparation générale est dédiée, comme son nom l’indique, à la préparation de développement général.
Une augmentation progressive du volume d’entraînement puis de l’intensité servira de tremplin à l’obtention de l’état de forme qui sera exalté au maximum pendant la période compétitive.
Généralement, 2 à 3 mois sont nécessaires pour développer l’endurance, la force et la vitesse de base selon la distance préparée.
L’endurance avant tout
Au même titre que pour tout le reste de l’année, l’endurance constituera la base de votre entraînement quelque-soit la distance visée.
Courir en endurance va créer le socle fondamental et les conditions générales pour augmenter la charge d’entraînement en termes de volume et d’intensité.
En gros, il s’agit ici de poser les fondations de votre maison de coureur en améliorant tous les paramètres cardio-vasculaires et en renforçant vos muscles comme vos tendons ou encore vos capacités de récupération.
Classiquement, on parle d’endurance pour une intensité d’effort de 65-70% de VMA ou 70-75% de FCM. Si vous ne connaissez pas votre VMA ou votre FCM, prenez comme référence l’allure réalisée sur une récente compétition de 10 km et rajoutez-y entre 50 secondes et 1 minute.
Pour les moins rapides d’entre vous, l’allure d’endurance correspondra même à l’allure marathon. En terme de sensations, vous courez en aisance respiratoire avec la possibilité de maintenir une conversation.
Un peu de technique
Le volume d’entraînement n’étant pas encore à son maximum, profitez des séances d’endurance pour travailler votre technique de course.
Même si celle-ci va s’affiner avec le temps et les kilomètres, nous vous recommandons de travailler votre coordination motrice générale à raison de 10 à 15 minutes chaque semaine en début ou fin de séance d’endurance : marche sur pointe de pied, marche sur talon, déroulé talon-pointe, marche avec déroulé de pied dans l’axe avec flexion prononcée du genou, marche sur bord intérieur et bord extérieur…
Vous pouvez aussi intégrer quelques éducatifs comme des montées de genoux, des talons-fesses, des pas chassés, des ciseaux, des petits sauts dynamiques sur place voire des accélérations sur quelques dizaines de mètres appelées communément des lignes droites.
Une dernière chose concernant les séances d’endurance. Elles doivent être distinguées entre les séances continues faciles (45 minutes à 1 heure) et les sorties longues, un passage obligé dans la préparation au marathon.
Nous pouvons ainsi appeler une sortie longue une séance d’au moins 1 h 10 min à 1 h 15 min. Quelque soit le niveau du coureur, il faut que la durée soit assez importante de sorte à générer une fatigue musculaire et nerveuse et engendrer, après récupération, une amélioration de l’endurance et de la résistance.
On n’oublie pas le renforcement musculaire !
Il est capital de travailler et de développer la force et la puissance musculaires ; qui plus est quand on a le temps et que les échéances compétitives sont encore loin.
Le travail de la force et de la puissance musculaires peut se faire de différentes façons : la musculation, la PPG au poids de corps et le gainage. De par l’utilisation de charges additionnelles (lests, poids, haltères, barres), la musculation favorise le développement de la masse et de la force musculaires.
Il est préférable pour le coureur à pied de travailler à des intensités proches de la force maximale, autour de 90% du poids que l’on est capable de déplacer sur une seule répétition.
Si vous n’êtes pas fan de musculation, pas de souci. Des expériences ont montré que la réalisation de 3 exercices basiques comme le squat à 90°, les fentes et les sauts sur place pieds joints en fin de séance permet d’améliorer les chronos sur longue distance.
Commencez par 10 répétitions de chaque exercice et augmentez de 3 répétitions par séance pour arriver à 30 répétitions de chaque exercice.
Enfin, le travail de gainage ou « core-training » vise à renforcer les muscles « centraux » et posturaux du corps, à savoir particulièrement la ceinture abdo-lombaire. Ces muscles ont un rôle important dans l’équilibration du bassin et de la colonne vertébrale, soutiennent tout le haut du corps, apportent un effet protecteur pour le bas du dos (évitant une lordose trop importante), assurent un meilleur maintien de la colonne vertébrale et une bonne solidarité entre les membres inférieurs et supérieurs, et améliorent la chaîne de transmission des forces entre les membres inférieurs et supérieurs.
Une étude suggère même que la fatigue de ces muscles peut constituer un facteur limitant la performance en course à pied et qu’il est judicieux d’entraîner les muscles posturaux et respiratoires. Idéalement vous pourrez réaliser 20 à 30 min combinant PPG et gainage après 40 min à 1 h d’endurance.
Le fractionné pour progresser
Si courir en endurance peut suffire pour préparer des courses allant du 10 km au marathon, l’entraînement ne devient optimum que s’il est synonyme de variété.
Il peut s’agir de varier le profil des parcours, les temps d’effort et/ou de récupération mais surtout et en premier lieu les intensités d’effort ou allures de courses. C’est ici qu’entre en jeu l’entraînement fractionné ou intermittent qui, contrairement à l’entraînement continu, prévoit l’alternance de course rapide et de course lente au sein d’une même séance.
Au début de la période de préparation générale, nous vous proposons le fartlek version kenyane en alternant 1 min vite et 1 min lent ou 2 min vite et 2 min lent ou encore 2 min et 1 min lent. 20 à 30 min de corps de séance seront parfaites pour préparer le travail d’entraînement fractionné plus codifié comme les séances VMA (vitesse maximale aérobie).
En pratique, la VMA correspond à la vitesse que vous êtes en mesure de soutenir pendant environ 6 à 7 minutes. Si cette vitesse peut vous être utile pour définir et contrôler vos allures de course à l’entraînement comme le proposent nos différents plans, la développer va vous permettre d’être plus rapide sur les courtes distances comme sur les plus longues.
La VMA peut être développée par le biais de séances spécifiques appelées d’ailleurs séances VMA dont la dénomination peut changer en fonction de la durée ou de la distance des sessions d’efforts : VMA courte, VMA moyenne et VMA longue.
Enfin, des compétitions préparatoires peuvent être insérées dans cette période pour contrôler les progrès réalisés, se rassurer ou réajuster le programme d’entraînement, et surtout pour entretenir ou développer la motivation.
La période de préparation spécifique
La période de préparation spécifique fait suite à la période de préparation générale et représente la dernière période préparatrice à la compétition.
Son objectif est clair : l’obtention du pic de forme.
Le développement des qualités d’endurance et de vitesse restent primordial lors de cette période. Concernant l’endurance, le volume peut être augmenté via l’ajout d’une séance hebdomadaire et surtout, pour le marathonien, par l’allongement de la sortie longue.
Pour ce qui concerne la vitesse, des séances de VMA ou de fartlek doivent entretenir la vitesse de base tandis qu’une séance par semaine visera le travail de vitesse spécifique, autrement dit l’allure de compétition.
A ce moment de la préparation, il est indispensable de s’entraîner à courir à des vitesses ou intensités proches de celles que l’on souhaite maintenir le jour J.
Si la séance d’allure spécifique dépend donc de l’allure de course visée, sa conception dépendra également de la distance de course visée :
La progression des séances alliera l’augmentation des distances de fractionnés, du volume et la réduction des temps de récupération.
Lors de la période de préparation spécifique, des compétitions préparatoires peuvent être insérées : le marathonien pourra par exemple participer à un 10 km, puis à un 15 km et enfin à un semi-marathon environ 1 mois avant son marathon. Un coureur de 10 km privilégiera plutôt un 5 km, un cross court ou une corrida toutes les 3 semaines.
La période de préparation spécifique durera en général 6 à 8 semaines pour l’objectif 10 km, 8 à 10 semaines pour un semi-marathon et entre 8 et 12 semaines pour le marathon.
Attention, après de longues semaines d’entraînement, le coureur peut osciller entre des jours de grande forme et des jours où l’état de fatigue prend le dessus. Pour connaître le pic de forme, il va falloir éliminer au maximum cette fatigue grâce à quelques jours d’affûtage et une baisse pouvant aller jusqu’à 60% du volume d’entraînement.
La période de régénération
La période de régénération constitue la période de transition entre deux programmes d’entraînement. Traditionnellement, il s’agit de la coupure de fin d’année souvent placée après un marathon et des compétitions plus courtes de l’automne et avant la période de préparation générale de l’année à venir.
Cette période de régénération a pour but, comme son nom l’indique, de récupérer physiologiquement et psychologiquement. Sa durée peut varier de 3 semaines à 2 mois même si plus communément les coureurs optent pour une période de 3 semaines suivie d’une autre période de 4 semaines consistant plus en une reprise de l’activité course à pied et des habitudes d’entraînement.
D’autres coupures, dites aussi de régénération, peuvent être planifiées pendant l’année et sont généralement plus courtes (2 à 3 semaines maximum). Marquées par la perte temporaire de l’état de forme suite à la fatigue engendrée par la ou les courses objectif, elles permettent de récupérer avant la programmation d’un nouvel objectif.
Dans le cadre d’une coupure annuelle (4 à 5 semaines environ), le repos complet s’impose et peut durer jusqu’à 1 semaine. Après cela, l’activité physique sera reprise par le biais d’autres sports (vélo, natation, tennis,…) au grès des envies de chacun avant de repartir pour quelques footings légers.
Pour ce qui concerne les autres périodes de régénération, il est indispensable de réduire au minimum toutes régressions de la condition acquise lors des phases du programme d’entraînement. Cela coûte beaucoup plus cher à l’organisme en fatigue de perdre et de récupérer son niveau d’entraînement plutôt que de l’entretenir.
Bien que la charge d’entraînement soit faible, il convient donc de continuer à solliciter l’organisme régulièrement à de faibles intensités : course lente de 40 à 50 min.
Si plus de 90% de l’entraînement va se dérouler en endurance, il convient donc de maintenir un peu d’intensité par le biais du travail technique avec des gammes (montée de genoux, talons-fesses, pas chassés, griffé du sol, foulées bondissantes,…), des accélérations ou des lignes droites.
La réduction du volume d’entraînement permet aussi de libérer du temps pour pratiquer de façon plus importante les étirements.
Reprogrammer un nouveau pic de forme
Suite à la période de régénération, inutile de repartir sur un programme d’entraînement interminable qui pourrait amener à un trop de fatigue aussi bien physique que mentale. En effet, si le 2ème programme d’entraînement doit respecter la même planification, les préparations générale et spécifique seront réduites dans le temps.
Des adaptations peuvent être faîtes en fonction des qualités que chacun doit ou veut travailler pour améliorer ses performances. Elles doivent surtout se faire pour s’adapter à la saison : on ne peut pas forcément s’entraîner de la même façon en hiver par 0°C et en été par 30°C.
A titre d’exemple, nous vous proposons de remplacer les séances VMA avec des séances de côtes. Ces dernières consistent à parcourir rapidement une côte et à récupérer en la redescendant.
Si le travail en côtes peut s’effectuer sur différentes distances, privilégiez les côtes courtes demandant 20 sec à 1 min d’effort. Véritable alternative à la musculation et à la PPG, le travail en côtes vous permettra également de développer la force de vos jambes comme de votre mental !
Idéalement, la côte choisie sera à proximité d’un point d’eau. Si ce n’est pas le cas, il faudra absolument amener avec vous une source d’hydratation.
Vous l’aurez compris, la réussite de votre année 2025 dépendra de votre capacité à planifier et à vous tenir à un programme structuré, diversifié, complet et évolutif dans le temps.
Bonne année 2025 !
Par Jérôme Sordello
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