Le succès du marathon est incroyable de nos jours. Autant il y a quelques années, l’épreuve était l’objectif des spécialistes de la course sur route, autant aujourd’hui, c’est complètement ouvert à la masse et même aux coureurs qui, parmi elle, n’ont que très peu d’expérience.
L’effet de « l’épreuve mythique » y joue pour beaucoup dans l’inconscient des coureurs, et même du public.
Pourquoi, et d’où ça vient ? Pourquoi le serait-elle plus qu’une autre…?
L’histoire
On ne va pas vous refaire l’histoire, mais vous connaissez sans doute le récit de ce soldat grec (Philippidès) pendant la bataille de marathon qui aurait couru une quarantaine de kilomètres pour faire passer un message, et mourir ensuite d’épuisement.
Une version historiquement inexacte selon les spécialistes du genre. Dans tous les cas, on retient l’acte héroïque derrière l’effort. La légende est née !
Une épreuve qui renaît avec les Jeux Olympiques, à Athènes, en 1896. Mais c’est en 1908, à Londres, que la distance est établie à 42 km 195 à la demande de la royauté qui souhaité voir arriver la course devant sa loge. Une distance qui bouge un peu mais qui est définitivement adoptée en 1924 à Paris. En tout cas, même la distance kilométrique a été soumise à un coup de pouce de l’histoire.
Dans l’historique plus moderne, on se souvient de la médaille d’or d’Alain Mimoun en 1956 à Melbourne sous un soleil de plomb, qui marque encore l’imaginaire de ces fous qui arrivent complètement épuisés.
On pense aussi à Abebe Bikila, vainqueur en 60 (Rome) pieds nus, à Kathrine Switzer et son histoire avec l’organisateur qui avait tenté de l’expulser à Boston. On pense au succès du marathon de New York, ou encore à cette barrière des 2h franchie par Eliud Kipchoge lors des tentatives « Breaking 2 » avec Nike.
42 km 195, concrètement
Appuyé par des légendes comme Zatopek (« Si tu veux courir, cours un kilomètre, si tu veux changer ta vie, cours un marathon ») et tous ceux qui ont fini au bord de l’épuisement, l’effort de 42,195 km a été sacralisé. Il y avait aussi ce fameux « mur » du marathon, aux environs du 30è km.
Mais à quoi correspond-t-il ? De façon très concrète, le muscle a besoin notamment de glucides pour fonctionner. On sait qu’il fonctionne aussi avec les graisses, mais les glucides sont le carburant le plus accessible et le plus direct. Ce qu’il se passe, c’est qu’au bout de 1h30 / 2h courues à cette allure (disons le seuil) l’organisme a épuisé le stock des glucides et passe ensuite sur une grosse consommation des lipides. Ce qui a pour effet de faire ressentir un effet de transition, et une difficulté accrue. Il faut dire aussi que la casse musculaire augmente, ce qui n’aide pas.
Mais aujourd’hui, de plus en plus de monde est entraîné avec sérieux, on a des connaissances scientifiques qui permettent de mieux se préparer, de mieux gérer ses allures et sa nécessité de consommer glucides et boisson pour compenser.
On court même des négatives split, et à haut niveau, on a souvent un 10 km du 25 au 35è ou du 30è au 40è km qui est plus rapide. Et si c’était auparavant la plus longue distance courue, dorénavant on court aussi des 6h, 12h, 24h, des 100 km etc. Est-ce que le marathon est toujours un effort mythique ?
Le mythe est imaginaire
Concrètement, le mythe du marathon est imaginaire, et idéalisé. Pourquoi un effort sur 1500 m ne serait pas plus difficile ? Courir à une intensité maximale, qui provoque la montée en flèche du lactique et vous soumet à des souffrances tellement violentes… n’est-ce pas plus dur ?
Pourquoi ne serait-ce pas le 10 km, qui impose d’avoir des qualités de coureur complètes, entre la tonicité musculaire, l’efficacité, un cardio haut de façon prolongée, à la limite de la rupture ? Pourquoi cela ne serait pas le semi-marathon qui, sous l’impression d’un effort sous-maximal, répète tout de même à intensité élevée des chocs musculaires difficilement supportable ? Et on pourrait passer en revue chaque type d’effort, chaque distance existante.
La valeur de l’effort, son idéalisation, c’est ce que chacun en fait. On court sur des distances par appétence physique, sensorielle, mais aussi par intime conviction, volonté d’aller découvrir son potentiel et son imaginaire, par défi personnel, par philosophie. Influencé ou pas par l’histoire pré-existante, ou à la quête de la sienne, d’un ailleurs. Il n’y a rien qui vaut mieux qu’un autre.
C’est juste une question d’expérience.
Par M.BERTOS /Photo : Marathon Valence (Facebook)
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