Sont-ils fous d’ultra… ou ultra fous ?
La normalité, c’est comme une ligne d’horizon : c’est dur à définir. Est-ce que ces gars sont normaux ? Impossible à dire.
Ce que l’on peut dire, c’est qu’aller vite, c’est compliqué, c’est difficile, c’est en partie génétique, jusque dans le pourcentage de fibres rapides inscrites dans notre ADN.
Une fibre rapide ne se crée pas. On peut travailler un peu sa vitesse, mais dans de faibles proportions. Par contre, la transformation en fibres lentes, c’est avéré. Tout le monde peut se mettre à marcher / courir sur d’immenses distances. Mais faire moins de 10s au 100 m, ça c’est autre chose.
L’homme, depuis la nuit des temps, est fait pour se déplacer facilement sur de longues durées : il lui suffit de boire, de se ravitailler un peu, et la sueur lui permet de prolonger l’effort en faisant baisser la température du corps. Pratique pour pourchasser sa proie jusqu’à épuisement !
Oui, mais le coureur qui prend le départ d’un ultra n’a aucune envie de chasser. A part, peut-être, son chrono. Peut-être ses démons… Mais il n’y a rien de vital, immédiatement.
Alors on se demande bien pourquoi des gens courent et marchent 1, 2 ou 3 jours / nuit durant. Ont-ils des choses à se prouver ? Répondent-ils seulement à un défi lancé au détour d’un verre…?
Quelques-uns, soyons honnêtes, oui, ils sont fous !
D’autres, sont très jeunes (trop même). Certains sont trop peu entraînés. C’est vrai que le défi hors norme astreint le coureur à une quantité d’heures dans la nature, qu’il faut être capable d’assumer et d’inclure dans le quotidien.
Et puis concrètement : courir ou marcher dans les cailloux, dans la pente, sous la pluie ou le soleil, dans le froid, c’est… dur. Surmonter des fringales, c’est compliqué. S’abîmer les pieds, avoir les muscles qui tiraillent, c’est beaucoup de souffrance.
Certains subissent même des hallucinations, comme s’ils étaient dans un état second, de fatigue extrême, ou bien comme si la drogue faisait son effet après coup.
Alors, pourquoi ?
Pourquoi… chacun a sa réponse. Pour aller chercher ses limites physiques et psychologiques. Courir pour quelqu’un qui ne le peut plus. Courir pour trouver des réponses…
Car quelques fois, ils ne l’ont pas avant de partir, et vont essayer de la trouver en chemin. Courir pour demander à son corps le maximum de performance.
Courir pour trouver de l’entraide en chemin, et partager ses moments de souffrance…
En tout cas, ils sont de plus en plus nombreux. Le long, ça passionne. Le très long, ça étonne. L’ultra, ça surprend et suscite les interrogations.
La seule chose, c’est qu’on a tendance à brûler sa santé par les deux bouts : on voit de rares carrières sur l’ultra, encore moins parmi les « amateurs ». Mais on ne pense pas à cela. Plutôt à ce qu’on va vivre avant.
Par Mathieu BERTOS / photo : JP Lapeyrade, groupe Dépêche
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