C’est l’histoire d’un gars qui, fin 2016 après son 2ème Hawaii, avait dit qu’il arrêtait de faire des Ironman.
Et c’est ce même gars, 1 an et demi plus tard, qu’on retrouve sur la plage de Piqueyrot à 7h du mat’, bonnet jaune canari sur la tête, avec 445 autres athlètes pour participer à son 9ème « 226km ».
Ben ouais quoi, ça manquait trop. Et puis y’a que le long, comme ça, à base 3.8km de natation, de 180 bornes de vélo et d’un p’tit marathon qui me botte vraiment. Alors finis les longs déplacements, la corvée supra pénible de démonter le vélo pour la foutre dans une valise que tu seras le seul à voir comme un écrin donc bingo pour truc pas trop loin, pas trop chiant en terme de logistique … Go pour le Frenchman !
Comme en 2015 je vais donc me faire plaisir à côté (ou presque) de la maison sur cette course. Y’a tout pour moi pour être super bien : un parcours vélo oukeçavavite, une bicoque à 100m du PAV (génial, hyper pratique pour moi et la famille) et un truc super bien organisé.
Franchement le job a été fait, je me sens prêt notamment à vélo où je pense avoir passé encore un p’tit cap. Alors je me dis que sur un parcours comme ça, ça va déchirer sa reum mais grave, d’ailleurs j’ai viré le petit plateau : ))) #configgroslip
Ça reste un Ironman, donc y’a de l’appréhension mais pas tant que ça finalement ! Juste un peu peur de me prendre une rouste en natation à vrai dire. En 2018 je nage plus « que » 2 à 3 fois/semaine contre 3 à 4 les années précédentes.
NATATION :
Le start est bon … je prends direct les pieds de Gael Mainard ! … Euuuhh sur 50m en fait : ))) … mais au moins ça a le mérite de me faire rentrer correctement dans la course et de bien me placer. Ce n’est pas très dense donc je peux nager assez à l’aise et éviter ces angoisses de promiscuité aquatique qui m’embrouillent.
De suite je m’applique à prendre des pieds, j’arrive à suivre, c’est bon signe ! Rapidement on forme un p’tit pack de 3 ou 4 gars, je ratonne grave à l’arrière et dois faire l’effort plusieurs fois pour ne pas perdre les pieds. Passé la demi-heure, comme d’hab’, je me fais méga chier .. mais qu’est-ce que c’est long, bordel !
Un des gars doit trouver ça long aussi et se fait la malle. Oh bordel, ni une, ni deux, sans cligno ni rien je déboite et me fais un p’tit 50m pour aller le chercher. ‘tain j’suis trop content de moi, j’ai rarement su faire ça en compétition . Nous rentrons ensuite dans le port d’Hourtin et me détache même du groupe pour sortir en 10ème position en 58’.
Alors loin de moi l’idée d’avoir été tranquille mais, il me semble, je n’ai pas non plus trop puisé. C’est de bon augure pour la suite notamment car, normalement, j’ai bouffé mon pain noir sur cette 1ère discipline qui n’est pas mon point fort.
VELO :
Belle T1, propre et rapide ! C’est parti pour un chevauchement du Cervelo P5 pour quelques longues minutes maintenant. Je dois doubler 1 ou 2 gars dans les 1er kilomètres puis après c’est calme plat : personne devant, personne derrière … et pourtant avec ces longues lignes droites y’a de quoi voir loin :/
Ça cruise 260-280w instantané donc 10-20w supérieur vs la cible mais c’est prévu, là aussi, comme en natation, faut lancer la machine, rentrer dans la course pour temporiser ensuite. Passage dans Soulac (demi-tour boucle Nord) vers le 40ème km et j’suis grave déçu, la route est merdique, ça fait des virages à 90° et y’a pas grand monde.
Vers le 50ème, alors que je croise celles et ceux qui vont vers Soulac, je vois enfin du monde ! Alors je double bien 2 gars bien meilleurs nageurs que moi, dont Patrick Martinie qui est sorti en tête de l’eau, mais j’ai aussi 2 de gonz’ qui reviennent de l’arrière. C’est Luc et Seb ! ça va bien + vite que moi mais l’occasion est trop belle, un, de moins me faire chier tout seul et, deux, d’aller bien + vite avec l’aide psychologique que procure le fait d’avoir un point de mire.
Pendant 10 bornes c’est vraiment le panard puis le Seb, en tête, pose une mine … derrière je me retrouve pas loin d’être à PMA donc je lâche l’affaire. A ce moment-là nous sommes en bordure d’océan, du côté de Montalivet, c’est sûrement super joli mais j’en ai un peu rien à foutre. A nouveau je vais rider solo et ça m’fait chier bien comme il faut : ((
En plus j’vous ai pas dit mais par 2 fois j’ai perdu mes bidons d’iso derrière la selle, à la fois à cause de la route mais aussi parce que, dans la précipitation, je le repositionnais mal dans la cage. A posteriori je pense vraiment que ça a joué dans mes mauvaises sensations : un peu mou, mal au dos et une obligation de me détendre plus qu’à l’accoutumée.
Bref ce n’est pas le pied, le soleil a beau pointer, bien comme il faut, le bout de son nez, je n’ai pas la patate quoi ! A mon grand étonnement j’ai même à plusieurs reprises l’envie soudaine de relâcher mon effort et finir tranquille. M’en souviens au km 60 m’être dit : « Pffff …. Non mais encore 120 bornes comme ça .. naaan mais ça va pas le faire » !
Je n’arrive pas à comprendre car c’est mon 9ème IM et c’est la 1ère fois qu’une telle lassitude arrive si vite, souvent même elle n’est pas du tout arrivée alors vous voyez l’bazar, cette sorte d’incrédulité qui m’habite à ce moment-là : /
Km92 on repasse proche de T1 à Hourtin, il y a du monde et je tire une tronche pas possible. Même si j’ai pensé stopper là je poursuis, bien évidemment, mon effort. J’aurais été sans doute honteux de poser pied à terre ici parce que j’en avais juste ras-le-bol.
On m’annonce 7ème à 6’ de la tête il me semble. Enfin du concret qui va m’occuper l’esprit quelques minutes : Alors devant y’a les 2 qui m’ont passé au km 50, il en manque 4 : le polonais #4, Antoine Méchin #1, Gael Mainard #8 et l’autre je ne vois pas (ie il s’agit de Peter Kern l’irlandais). En fait le polonais a été mis hors course (3 cartons a priori) et c’est Rudy Paqui, sorti 2ème de l’eau, qui fait le 6ème.
Sur le reste du parcours, boucle sud, ça ira un peu mieux dans les sensations. Je ne fais rien d’exceptionnel mais je sors juste les watts qu’il faut, je mange, bois et m’asperge beaucoup en ayant toujours le secret espoir de voir au loin un p’tit cycliste. Mais y’a que dalle !!! Et j’apprécie même pas les feintes des cyclos du coin qui, en étant sur le parcours, me font de faux espoir : ))) Je doublerais juste Rudy Paqui au km 135.
Belle surprise au km 140 à Carcans, au ravito, où mes parents, ma femme et les enfants sont venus se positionner. Même si je tire une gueule de 3 km de long intérieurement ça me fait un bien fou de les voir et les entendre. Ensuite Maubuisson, quelques coup-de-culs salvateurs pour casser la monotonie et enfin la route forestière. Je la redoutais mais ça passe super bien.
C’est vrai qu’on a la chance aussi d’avoir le vent favorable ici (l’impression de l’avoir toujours défavorable sur le reste du parcours) donc ça va vite et à moindre coût (ça récupère avant le marathon, quoi ;))
Groooos soulagement de poser le vélo en 4h44 après 181km. J’ai trouvé ça loooong mais loooong c’est abusé ! Et je ne pense même pas au marathon, je sais que les jambes sont pourries donc j’me dis qu’on verra bien sur les 1ères foulées.
MARATHON :
Belle T2, là aussi propre, rapide et focalisée sur ce qu’il y a à faire. Je prends bien 500m à me lancer et à installer mon attirail de coureur à pied avec la montre, le wirstband, le headband (que je vire aussitôt) et mes gels à placer dans les poches.
Au moment où j’suis ready, nous arrivons sur l’av. du Port d’Hourtin et sur cette longue ligne droite j’ai en ligne de mire 2 coureurs. Alors là c’est un gros boost, enfin du monde, bordel !!! Très vite c’est donc Gael #8 que je dépasse avec un p’tit mot d’encouragement mutuel au passage, 2 ou 3 km plus loin c’est Luc que je dépasse (meilleur temps bike en 4h35 – c’ui qui m’avait déposé au km60) et donc je suis (déjà) 4ème de la course à l’entame de ce marathon.
C’est vrai que je cours vite à ± 3’50/km, je me calme ensuite pour me caler sur du 4’05/10 au kil suivant qu’on ait le vent avec ou contre.
Très vite c’est clairement identifié que je cours + vite que Peter (2ème) et Sébastien (3ème). Antoine quant à lui est sur une autre planète, j’ai l’impression qu’il court un 10km lorsque je le croise : ))
Fin du 1er tour, je suis sur les talons de Seb et le passe même avant le u-turn. Peter est, lui, à 3’30 … a priori je lui ai repris + de 5’ sur ce tour. Mon objectif est clair, il faut aller chercher cet irlandais, mais j’ai le temps … aucune précipitation ! La course est longue, elle n’a d’ailleurs pas commencé, hein ; )
Toujours bien concentré, du coca® à tous les ravitos, les gels qui vont bien et roule ma poule. Vers le 15ème km je double Peter qui, gentleman, m’envoie avec son accent so british un « très bon » … je n’ai même pas besoin de forcer l’allure, je reste concentré. Pouaaaahh ça y’est je suis second de la course, et pouaaah ça m’fait quelque chose ! Ce n’est pas rien quand même ….
Contrairement au vélo, là sur la cap, je me sens fort, je sais que ça va ± craquer mais reste à savoir l’ampleur du truc. Grosse vigilance tout de même à l’arrière. Comme on a la chance de se croiser je peux ± observer les gros coureurs qui peuvent revenir. J’ai une ou deux inquiétudes mais dès le 3ème tour je suis rassuré. Il me faut bien ça car ce 3ème tour est vraiment dur, l’orage monte, ça se couvre franchement et il finit par pleuvoir des cordes.
Les jambes durcissent fortement, je perds ± 15’’ au kil mais je sais que ça va le faire ! Un œil au chrono marathon et je me dis, qu’avec même un p’tit craquage, je vais sans aucun doute passer sous les 3h. C’est toujours un truc-qui-fait-bien, qui me rend très fier, plus que le sub9 pour moi : ) Alors je ne lâche rien, toujours bien concentré sur mon alimentation etc .. mais aussi aux racines, aux autres concurrents .
Ça sent grave l’écurie et j’arrive même à accélérer sur les 3 derniers kilomètres, la pluie redouble d’intensité mais il ne peut plus rien m’arriver sur ces derniers hectomètres tout rectiligne.
Forcément l’émotion me gagne alors qu’il me reste une centaine de mètres à parcourir, je sais qu’il y a ma femme, les enfants, mes parents .. et je sais qu’ils vont tous être très contents et super fiers de ce que je viens de réaliser. Ce n’est pas rien là non plus d’être une petite fierté pour sa famille, hein 🙂
C’est donc en 8h38 que la ligne est franchie, en seconde place derrière un La Méche (8h24) intouchable.
A chaud c’est du bonheur et un soulagement extrême d’en terminer, surtout dans un chrono pareil, notamment au regard de mon état au bout de 3h de course. Un marathon de 41.2km à 4’13/km (2h52’ 44 officiel) c’est ma meilleure perf’, on valide très largement le -3h et ça c’est que du bonheur.
Merci à mon ancien coach Nicolas HEMET qui m’a ancré dans la tronche que j’étais un coureur capable de courir sub3 sur IM, sans lui je ne l’aurais sans doute jamais fait … et encore moins à 42 ans !
A froid, même si je reste hyper heureux d’avoir à nouveau casser la barre des 9h sur IM, j’ai un goût d’amertume sur le fait de n’avoir pas été un peu plus acteur de la course. Ça me rappelle mon pote Benji (qui fait 3ème sur le Frenchman 2017) qui est revenu au prix d’un marathon de folie et qui avait ce même sentiment.
J’aurais grave aimé être aux avant-postes vélo ou tout du moins gratter du temps (là j’ai perdu 4’ en plus des 3/4’ minutes de la natation) pour poser avec ou pas loin de la tête. Cela n’aurait sans doute pas changé le résultat final mais j’aurais vécu une tout autre course. Et mentalement ça aurait été plus facile sur le vélo : )
Le podium est complété par notre ami Peter l’irlandais qui là aussi au terme d’un marathon bien géré a pu conserver sa 3ème place. Bon voilà clap de fin sur ce Frenchman 2018, plus d’IM cette année mais il m’en faudra un 10ème, c’est obligé ; )
Christophe Noclain, ambasadeur i-Run
Infos sur la course : TRIATHLON FRENCHMAN