Le dopage fait partie de l’actualité et le cas du traileur équatorien Gonzalo Calisto s’ajoute aux faits. Cependant, si les réseaux sociaux ont vite fait de condamner tout acte et toute personne, il est bon de connaître les différents éléments. Ainsi, une note de l’ITRA (International Trail Running Association) a été portée à notre connaissance suite au contrôle positif à l’EPO de M.Gonzalo Calisto.
L’ITRA est un organisme ouvert à tous les acteurs du monde du trail, dont le but est de développer et promouvoir ce sport, de véhiculer les valeurs d’authenticité, d’humilité, de fair-play, d’équité, de respect et de solidarité. Il contribue à la qualité des organisations, à mettre en place des actions pour la santé des pratiquants et pour la lutte anti-dopage, à améliorer une pratique respectueuse de l’environnement. Elle permet également de mettre en avant la pratique au niveau national et international, ainsi que de collaborer avec les organismes et fédérations concernées.
Ainsi, le 29 juin 2016, la Fédération Internationale d’Athlétisme (IAAF) dévoile une liste où figure des athlètes sanctionnés pour dopage, dont Gonzalo Calisto pour un contrôle positif à l’EPO le 29 août 2015 à l’arrivée de l’UTMB (un des événements trail les plus importants du monde soutenu par l’ITRA).
La politique de santé de l’ITRA vise à aider coureurs et organisateurs dans le but d’accroître la protection et la prévention de la santé du sportif. Elle est uniquement constituée de médecins et vise à renforcer la surveillance médicale pour la sécurité, la santé et le secours du coureur. L’espace santé mis en place permet de compléter un profil pour améliorer la chaîne des secours en laissant traces de ses propres informations spécifiques. On peut renseigner son groupe sanguin, ses allergies, ses médicaments et les éventuelles AUT (Autorisation d’Usage à des fins Thérapeutiques).
Cette politique permet également de soutenir les organisations lors des bilans médicaux qui précèdent les épreuves (analyses sanguines-urinaires-capillaires). Elle peut viser à une simple prévention médicale ou à une mise hors-compétition en cas de résultats anormaux. Cette politique vise en premier lieu les coureurs « élites » mais elle peut concerner tout les participants. Elle ne se substitue pas à la réglementation en vigueur de lutte anti-dopage mais permet aux sportifs volontaires de déceler des anomalies, des pratiques d’auto-médication ou dopante non volontaire pouvant induire un comportement en relation avec le dopage.
Le programme Quartz s’adresse aux coureurs élites. Il s’agit d’une étude pilote de 6 mois, basée sur le volontariat des coureurs. Les coureurs s’engagent à se soumettre à de nombreuses analyses et à déclarer leurs données « santé » comme le personnel médical qui les suit, leur localisation, la délivrance d’AUT ou encore les médicaments utilisés. Dans le cadre d’une démarche de transparence, le coureur peut rendre publiques l’ensemble de ses données de santé. Via son espace santé ITRA le coureur reçoit régulièrement des demandes d’analyses (sanguines, urinaires ou capillaires) à effectuer dans un laboratoire de son choix. Au total, ce sont 66 marqueurs biologiques qui peuvent être observés, permettant une vision très large de la santé du coureur à l’aide de différents modèles d’analyses scientifiques. Ce système vient en quelques sorte en complément de la lutte anti-dopage comme par exemple le passeport biologique. 16 coureurs ont rejoint le programme, un premier bilan sera fait fin octobre.
Chronologie et cas de Gonzalo Calisto
Dans le cadre de cette politique de santé, le coureur équatorien a subi un premier prélèvement sanguin le 28 mai 2015 lors des mondiaux de Trail à Annecy. L’analyse a révélé des valeurs anormales. Convoqué le 29 mai avant le départ, il en ressort que le profil particulier du coureur vivant entre 2800m et 5500m d’altitude, peut définir un profil hématologique atypique (et non anormal, ce qui impliquerait la prise d’EPO) selon la littérature scientifique. Il est autorisé à prendre le départ.
Il subit un second prélèvement sanguin le 27 août 2015 avant le départ de l’UTMB. Les mêmes constatations sur son profil et la même décision est appliquée: il peut prendre le départ. Les contrôles antidopage urinaires organisés à l’arrivée concluent à un contrôle positif. Il est suspendu du 17 mars 2016 au 17 mars 2018. Ce temps de latence s’explique par la suspension provisoire, les audiences, recours utilisés par l’athlète… Vous l’aurez compris, l’administration doit suivre.
Explication et défense du coureur
Plusieurs points sont amenés par le coureur qui a posté 4 pages sur son profil d’athlète Facebook. En particulier, la situation géographique de l’Équateur et son altitude (de 3000m à 5000m) qui favoriserait un taux élevé d’EPO dans le sang , qui pourrait être confondu avec un dopage volontaire.
Il termine sa lettre par plusieurs questions pointant les incohérences qu’il a relevé pour sa défense, précisant que le trail n’a pas de fédération en Équateur, qu’il n’est pas un coureur professionnel et qu’il est bien sûr pour un sport loyal et équitable.
Parmi celles-ci :
Sous quelle autorité ou juridiction l’IAAF me sanctionne de deux dans alors que je ne suis pas un athlète lié à une fédération?
Pourquoi m’a-t-on laissé participer sans licence fédérale dans une catégorie où on réalise des contrôles qui l’exigent?
Il espère que son cas servira pour clarifier et modifier la norme sur le trail running au niveau mondial. Le débat concernant le statut du trail dans le monde du sport (fédérations diverses, championnats) va sûrement être relancé, tandis que la plupart des pratiquants sont plutôt pour des organisations locales et proches des coureurs. Les intérêts du trail et de la pratique de haut niveau sont pourtant défendus par les principaux acteurs, mais la clarté doit être de mise, ce qui a du mal à se faire et à être saisi par tous.
Mathieu BERTOS