Pour ceux qui ne connaissent pas bien le personnage, René Rovera a été triathlète professionnel de 1997 à 2007 et a fait partie des meilleurs triathlètes mondiaux sur distance IRONMAN avec notamment une victoire sur l’Ironman de Lanzarote, une 3ème place sur l’Ironman de Zurich, 2 top 10 sur le mythique Ironman d’Hawaï (une 7ème place en 1998 et une 9ème place en 2004) et un titre de vice-champion du monde de duathlon longue distance à Zofingen. L’année dernière, il a effectué un retour éclair sur triathlon longue distance devenant champion du monde groupe d’âge à Hawaï.
U-Run : Bonjour René ! Avec ce sacre de champion du monde l’année dernière à Hawaï, la boucle est-elle définitivement bouclée avec le triathlon et l’Ironman ?
René Rovera : Oui je le pense dans tous les cas, j’ai eu le sentiment de tourner enfin une page. Terminer quelque chose que je n’avais pas très bien fini. J’ai enfin mis fin à ma carrière de Triathlète, une fin que j’avais loupé et mis entre guillemets pendant 6 ans ! Retourner à Hawaï, terminer cette histoire, était pour moi très important. Maintenant, je peux me consacrer pleinement au Trail avec un esprit libre et le sentiment que j’ai avec cette performance réalisé à Kona, encore quelques belles années devant moi pour réussir de belles performances ! Je suis un compétiteur, le sport et pour moi un mode de vie et une passion. Je n’ai pas encore lâché l’affaire, me préparer dur, accrocher un dossard et me battre contre moi-même et les adversaires, c’est une grande partie de ma vie, je l’assume et le désire ! Maintenant concernant le Tri et en particulier Kona, je retournerai surement un jour y courir, cette course est ancrée en moi, c’est comme ça …
U-Run : Quels sont les différences fondamentales et inversement les similitudes entre l’entraînement triathlon et l’entraînement trail ? Pratiques-tu encore le vélo et la natation ?
René Rovera : ça reste deux sports d’endurance où il ne faut pas être avare en heures d’entraînements et en kilomètres ! Il y a beaucoup de similitudes, le trail demande une grande adaptabilité. Courir sur des sentiers nécessite une longue période d’adaptation, c’est plus traumatisant pour le corps mais moins violent en terme d’effort. Du moins lorsque l’on compare un Ironman à une CCC ou à un Ultra. Je pratique encore beaucoup le vélo, toutes les semaines. Pour deux raisons, la première est que j’aime ça, le vélo c’est la liberté ! Et la seconde, c’est parce que ça me permet de faire des heures sans trop de traumatismes musculaires pour continuer à travailler la puissance et l’endurance musculaires.
U-Run : A quoi ressemble aujourd’hui une semaine type de ton entraînement ?
René Rovera : En hiver, j’ai moins de temps le mardi, mercredi et jeudi à cause du travail, je me contente d’un entraînement plus ou moins court le matin avant d’aller au travail. Ensuite, les autres jours, ben comme d’habitude je fais des kilomètres et des heures. Je n’ai pas perdu ce goût à la préparation à long terme d’un objectif défini aussi à long terme. Des entraînements jusqu’à 8/9h ne me font toujours pas peur et ils sont monnaies courantes.
L’été je travaille tous les jours pendant les deux mois estivaux. Là, je m’entraîne tous les jours le matin avant de venir au travail. Je commence à 15h ce qui me laisse du temps. Je profite de temps à autre des périodes creuses pour prendre des vacances et me faire des gros cycles d’entraînements. Des cycles de préparations intensifs à des moments stratégiques de la saison en fonction de mon objectif. Depuis l’an passé, Nico (Nicolas Lebrun a été notamment champion du Monde de XTERRA, de triathlon/duathlon des neiges et vice-champion du Monde de duathlon) a monté sa structure « OrgaNicoach », c’est lui que se charge de planifier tout ça.
U-Run : Tu fais partie du Team Garmin Adventure aux côtés notamment des frères Camus. Qu’est-ce que cela t’apporte dans ta pratique du trail ?
René Rovera : De partager ce fabuleux sport en Équipe avec mes amis ! On s’éclate ensemble, on est sur la même longueur d’onde même si nous avons tous des caractères bien distincts. Avec Seb (Sébastien Camus, 2ème de la CCC 2013), je fais quasi tous mes entraînements les plus longs et durs à Sospel. J’ai même déménagé l’hiver dernier et quitter Cannes pour Sospel pour pouvoir vivre plus en harmonie avec mes idées et être sur un terrain qui correspond mieux à la pratique du trail ! Avant, j’étais le plus souvent seul. Seb et Sylvain (Sylvain Camus a aussi été 2ème de la CCC mais en 2010), ont commencé la pratique du trail bien avant moi, j’avais beaucoup à apprendre. Je les ai observés à chaque entraînement et j’ai pu gagner du temps et une expérience plus rapidement.
U-Run : Dans une interview, tu disais t’être orienté vers le trail par amour de la nature et parce que de grandes courses te faisaient rêver. Peux-tu nous dire lesquelles ?
René Rovera : Presque toutes les courses sur le circuit d’Ultra sont des courses magnifiques, dans des décors de rêve où j’aimerais aller courir. J’aime les grands espaces, la nature, la montagne et les voyages. C’est à ce titre qu’il y a des tas de courses que je souhaite faire. Mais comme toujours j’ai mon Graalr ! Kona était celui du triathlon, l’UTMB sera celui du trail !
U-Run : Tu as frappé fort récemment avec une 4ème place sur la CCC après avoir été longtemps en seconde position. Peux-tu nous raconter ta course et le problème technique que tu as rencontré dans les derniers km ?
René Rovera : Depuis Kona l’an passé j’ai coché deux cases sur mon agenda. Le premier était la CCC 2014. Je suis très heureux d’avoir répondu présent sur ce grand rendez-vous que je m’étais fixé. La course s’est déroulée de la meilleur des manières, j’ai été prudent et patient jusqu’à Champex en ne pensant qu’à m’alimenter et regarder où je mettais les pieds. J’ai essayé à chaque pointage de grappiller place après place. Comme je me l’étais dit en juin lors de ma reconnaissance, je lâcherais les Watts à Vallorcine. Lorsque j’y suis arrivé, j’étais déjà 3ème au coude à coude avec d’autres traileurs. J’ai mis tout ce que j’avais dans la Tête au Vent si bien qu’après avoir rattrapé le second et lâcher mes poursuivants, je pointais au sommet à la Flégère en seconde position avec 2 min d’avance sur mes deux poursuivants. Malheureusement dans la descente et dans l’endroit le plus technique et sombre, ma frontale a « flashé », plus rien ! J’ai essayé de continuer sans car il ne restait que 2/3 kilomètres avant d’arriver sur la piste finale qui mène à Chamonix. En vain … Mes deux poursuivants m’ont rattrapé et déposé dans une partie trop technique pour avoir une chance de pouvoir rester avec eux. Je tiens à dire pour éviter toute ambiguïté que la frontale que j’avais était une frontale récupérée au ravito de Vallorcine. Comme le règlement le stipule, je possédais bien sur moi dans mon matériel obligatoire les deux autres frontales obligatoires. Simplement, je n’ai pas fait le choix d’en sortir une des deux sachant pertinemment qu’elles ne me seraient d’aucun secours, du moins pour courir vite dans un chantier pareil !
U-Run : Tu vas participer bientôt à la Diagonale des fous. Comment s’est passée ta préparation depuis la CCC et quel objectif t’es-tu fixé pour cette première ?
René Rovera : Pour être honnête, ma préparation n’a pas été à la hauteur de ce que je peux qualifier, en ce qui me concerne, de vraie préparation ! J’ai juste essayé d’entretenir et récupérer. Soigner toutes les petites tensions et bobos de la saison.
Avec la CCC fin août et la Diagonale le 23 octobre, soit même pas deux mois pour récupérer et se re-préparer ; pour moi ce n’est pas possible ! Je m’explique : courir la Diagonale en bonne condition physique oui ! Être à mon Top non ! J’y vais donc sur mes acquis et sans aucune prétention, avec humilité et respect pour cette grande course. Mon seul objectif est de la terminer proprement, le mieux possible physiquement, sans me blesser, et de marquer les points qui me manquent pour l’UTMB 2015. J’ai encore besoin d’apprendre et de découvrir ce que c’est que de courir 170km. Je ne les ai jamais courus ! Il me faut plus de temps. Après, sur un malentendu comme il en arrive parfois en sport, tout est possible !
Avec Seb et Nico, on est partis sur un projet de trois années pour réaliser le meilleur résultat possible sur l’UTMB. Je ne suis qu’à la fin de la première, laissez-moi encore un peu de temps et j’espère que nous pourrons d’ici là en reparler avec le sourire ! 😉
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